Avantage Grande-Bretagne ; Tony Blair au service.
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ariella baltiéLa volte-face anglaise vis-à-vis de l’organisation d’un référendum sur la Constitution européenne n’annonce pas la fin de l’Europe. Plutôt une renégociation, à l’anglaise.
Lundi, Jack Straw, actuel ministre des Affaires étrangères, a déclaré que la Grande-Bretagne annulera le référendum sur la Constitution européenne. Cette déclaration frappe de plein fouet les appels de la France et de l’Allemagne à poursuivre le processus de ratification. Mais en agissant ainsi, le Parti Travailliste veut à la fois gagner du temps avec son électorat eurosceptique et placer la Grande-Bretagne dans une position de force pour négocier avec la présidence européenne.
Merci pour le « non »
La déclaration de Straw est arrivée à temps, 30 ans jour pour jour, après un vote des Britanniques déjà appelés à voter sur l’Europe. Ils avaient alors choisi de rester dans le Marché Commun qu’ils avaient rejoint en 1973. En 1975, la Grande-Bretagne était aussi sous un gouvernement travailliste même si le gouvernement actuel n’est pas si enthousiaste à soumettre l’Europe à un vote public. En effet, c’est en avril 2004, sous la pression de plusieurs partis de l'opposition, que le Parti Travailliste a accepté d’organiser un référendum sur la Constitution. Censé se dérouler au printemps 2006, ce référendum aurait probablement fait de la Grande-Bretagne, nation habituellement eurosceptique, le dernier Etat à ratifier la Constitution. Un vote « non » catégorique semblait vraisemblable et aurait embarrassé le gouvernement britannique. Or, le vote de la France et de la Hollande ont permis à la Grande-Bretagne de réévaluer la situation et de l’utiliser à la fois comme un avantage national et international.
La Grande-Bretagne peut désormais prendre l’initiative
Une analyse de la rhétorique de Straw révèle un raisonnement machiavélique derrière la déclaration. Tout d’abord, en annulant le référendum pour le futur prévisible, le Parti Travailliste peut aisément détourner l’attention du problème de l’Europe et revenir à un meilleur programme national : qualité des services publiques, inflation peu élevée, taux de chômage réduit et croissance économique régulière. Cela arrête aussi les Conservateurs sur leur lancée car ils ne seront plus capables d’utiliser la Constitution pour gagner des points. L’enthousiasme des Travaillistes à se concentrer sur les problèmes nationaux était évident lors des campagnes électorales récentes et ils seront d’autant plus enthousiastes à poursuivre cette approche maintenant qu’ils ont perdu la majorité au Parlement.
Deuxièmement, il est important de noter que Straw n’a pas dit que le Traité était « mort » mais qu’il était simplement dans une impasse. La Grande-Bretagne pourra donc utiliser son tour à la présidence européenne pour mener la réforme de l’Europe. Elle garderait les meilleurs parties du texte de la Constitution (comme le veto anglais sur les taxes) et en s’en servirait comme point de départ à la rédaction d’un nouveau Traité. Les renégociations pourraient bien permettre au Royaume-Uni de conserver son très controversé rabais sur sa participation financière au budget européen, gagné sous Margaret Thatcher. Grâce à cela, le gouvernement britannique pourra contester l’accusation des eurosceptiques pour qui l’Europe est une conspiration franco-allemande dont le but est de saper l’influence du Royaume-Uni, et même vendre n’importe quel texte futur à son électorat.
L’héritage de Blair
Nous savons déjà tous que Tony Blair ne se représentera pas aux élections et que l’Europe lui donne maintenant une chance d’assurer son héritage et de prolonger sa vie politique. S’il peut prendre la tête de n’importe quelle renégociation, alors il aura une chance de partir sur une victoire. Le narcissique qui est en lui aurait sûrement préférer que l’histoire se souvienne de lui, non pas comme l’un des auteurs d’une guerre illégale en Irak, mais comme l’homme qui a tenté de réunir l’Europe.
Translated from Advantage Britain, Blair to serve