« Si les Etats-Unis attaquent l’Iran, je me battrai pour défendre mon pays »
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Fernando GarciaMohammed Hossein est un étudiant iranien expatrié au Royaume-Uni. Il apprécie la vie londonienne et désapprouve Mahmoud Ahmadinejad, tout en soulignant la force du patriotisme iranien.
Mohammad Hossein, 23 ans, a grandi à Téhéran où il a obtenu un Master en administration publique. En septembre 2005, il quitte pour la première fois son pays natal et part s'installer au Royaume-Uni où il poursuit actuellement des études à la London School of Economics (LSE).
Pourquoi avoir choisi de venir vivre au Royaume-Uni ?
Je suis venu à Londres pour élargir mon horizon et découvrir une autre culture. Même si pour le moment je ne peux pas retourner dans mon pays car je suis censé y faire mon service militaire, je ne me considère pas comme un réfugié politique. Je suis parti, non pas parce que j'y ai été contraint, mais parce que mon souhait le plus cher était de voyager et d'étudier à l'étranger.
Que vous apporte votre expérience anglo-saxonne ?
La vie ici est une source réelle d’enrichissement. Il s'agit de mon premier voyage en Occident mais je n'ai pas ressenti de « choc culturel » car internet m’avait auparavant permis de m’ouvrir au monde. Le web avait influencé ma manière d’appréhender les sociétés occidentales puisque j’avais déjà l’impression de connaître les lieux alors même que je n’y avais jamais mis les pieds. Londres est une ville vraiment étonnante et c’est son caractère cosmopolite qui la rend si spéciale. Les gens sont fiers d’appartenir à une communauté et la ville est riche de toutes les nationalités et les cultures qui la composent. C’est exactement ce que je recherchais en venant ici.
Comment expliquez-vous qu'un ultra-conservateur tel que Mahmoud Ahmadinejad ait pu remporter les élections présidentielles iraniennes de 2005 ?
Le candidat modéré Akbar Hashemi Rafsanjani est présent depuis trop longtemps sur la scène politique. Il a été Président de 1989 à 1997. Il est donc normal que le peuple iranien n’ait pas vu en lui l’homme capable de changer les choses. Il ne faut pas oublier non plus que l’Iran a traversé plusieurs années de crise et s’est vu infliger de lourdes sanctions économiques qui n’ont pas été sans conséquences sur l’économie du pays et sa population. C’est dans ce contexte qu’a pu être élu Mahmoud Ahmadinejad. Populiste, simple, il a su jouer de ses atouts lors de la campagne électorale et ses arguments ont convaincu un grand nombre d’électeurs. Si l’on prend en compte les années d’ingérence hostile occidentale en Iran, on comprend que les discours emplis de haine d’Ahmadinejad ne sont que le reflet des sentiments de beaucoup d’Iraniens à l’égard de leurs agresseurs. Les modérés eux-mêmes en viennent à penser que c’est en raison de cet historique tumultueux qu’un ultraconservateur a pu être élu à la tête du pays. Pour ma part, même si j’aurais préféré voir Rafsanjani réélu, je peux comprendre le ras-le-bol du peuple.
Vous êtes aujourd’hui plongé dans un environnement multiculturel, quel est votre sentiment face aux déclarations du Président Ahmadinejad concernant Israël ?
Je pense que le discours du Président résulte d’un calcul politique. En 1979, alors qu’il était le leader de la révolution islamique, l’Ayatollah Khomeini avait déjà eu des mots très durs à l’égard d’Israël. Ahmadinejad suit tout simplement la voie tracée par Khomeini. Il exprime en fait une opinion traditionaliste très répandue parmi les Iraniens qui affirme que les Occidentaux ont imposé aux pays islamiques la présence d’Israël et que les Israéliens doivent à présent quitter leurs terres. La stratégie d’Ahmadinejad me paraît contre-productive et nuit à la réputation de l’Iran dans le monde. En revanche, d’un point de vue politique, ses revendications sont fondées puisqu’elles trouvent un écho auprès d'une grande partie de la population.
Pensez-vous qu’il faille permettre à l’Iran de se doter de l’arme nucléaire ?
Je pense que le développement du nucléaire civil est un droit souverain inhérent à la République d’Iran. Le but de Téhéran n’est pas d’acquérir l’arme nucléaire dans une optique militaire mais plutôt de façon préventive.
Il est hypocrite de la part de l’Occident d’invoquer le Traité de non-prolifération (TNP) pour justifier son refus de voir l’Iran relancer son programme nucléaire. Trop d’exceptions ont été faites par le passé : je ne parle pas seulement d’Israël mais aussi du Pakistan et de l’Inde. Pour être honnête, la crise actuelle n’a strictement rien à voir avec tout cela. Il s’agit d’une question de principe. C’est le droit de l’Iran de rester seul maître de son avenir qui est en jeu. Les Iraniens sont persuadés que si le gouvernement cède sur le dossier du nucléaire, alors l’ingérence des Etats-Unis se manifestera dans d’autres domaines. Au vu de tout ce qui s’est déjà produit, cela est parfaitement inacceptable.
Au cours des deux dernières années, l’Union européenne, et plus particulièrement le Royaume-Uni, l’Allemagne et la France, a tenté de trouver un compromis. Que pensez-vous des efforts déployés par les diplomates européens ?
J’admets que leurs efforts pour aider mon pays à enrayer la crise qu’il traverse sont les bienvenus, toutefois je ne pense pas qu’il faille réellement compter dessus. La situation présente n’est que la suite logique de 20 années de relations houleuses entre les Etats-Unis et l’Iran. Ce n’est pas l’Union européenne qui trouvera la solution à un problème qui, selon moi, ne concerne que les Etats-Unis et la République iranienne et que eux seuls peuvent régler.
Que feriez-vous dans le cas d’une intervention militaire en Iran ?
Prix Nobel de la paix en 2003, Shirin Ebadi a été la première femme à devenir juge en Iran en 1974. Elle a récemment déclaré qu’elle retournerait défendre son pays s’il était attaqué, en dépit de son mépris pour le gouvernement d’Ahmadinejad. J’agirais exactement de la même façon. Bien que je n’approuve pas la politique d’Ahmadinejad, je rentrerais immédiatement faire mon service militaire. Personne ne devrait sous-estimer la force du patriotisme du peuple iranien. Plus l’Occident fera pression sur l’Iran, plus les Iraniens se rangeront derrière leurs leaders.
Translated from "If Iran was attacked I would defend my country"