Témoignage : Slovaque sur les papiers mais Hongrois en vérité
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Jean-François NominéAlors que les relations entre la Hongrie et son voisin slovaque se durcissent, les frontaliers vivent un quotidien teinté de xénophobie. Rencontre avec Szabolcs, étudiant slovaque de langue hongroise.
Les premiers ministres slovaques et hongrois n’ont pas réussi à alléger les tensions entre leurs pays, le 15 novembre dernier, quand ils se sont rencontrés dans la ville frontalière de Komárno (Lire l'article de cafebabel.com qui revient sur les origines de ces tensions). « Pourtant ces excuses mutuelles de la part des responsables des deux pays pourraient marquer un premier pas vers la coexistence pacifique », estime Szabolcs.
Xénophobie de stade de football
Un dimanche après-midi, dans un petit café de Budapest, je discute avec un jeune étudiant d’ici, mais originaire du pays voisin. Il ressent des liens très forts avec sa ville natale de Dunajská Streda, dans le sud-ouest de la Slovaquie. Chez lui, près de 80 % des habitants sont de nationalité hongroise et 15,3 % de nationalité slovaque (en 2001). Plus généralement, les Magyars forment 9,7 % de la population totale de la Slovaquie ; ils vivent tous dans la région de Dunajská Streda… comme Szabolcs. Sa petite ville a fait la Une des journaux le 3 novembre. A l’occasion d’un match de football Hongrie-Slovaquie, une cinquantaine de supporters des deux camps avaient été blessés. Le premier ministre slovaque Dušan Čaplovič a par la suite accusé des « hooligans » hongrois d’envenimer des relations déjà difficiles avec la Hongrie.
Szabolcs est citoyen slovaque de langue hongroise. Il est allé à l’école maternelle hongroise et se considère comme Hongrois. Il s’est fait traiter de « crétin de Hongrois » dans certaines situations de la vie quotidienne, comme à l’occasion de descentes de bus encombrées par la foule. Mais alors que la minorité hongroise constitue 80 % de toute la population de Dunajská Streda, il ne devrait pas souvent essuyer ce genre de réflexion.
Toujours supporter hongrois
Les amis de Szabolcs font tous partie de la communauté hongroise et n’ont pratiquement pas d’amis slovaques. Un ami d’enfance, qui est allé à la maternelle slovaque, mais qui a suivi les cours de la même école secondaire hongroise, a abandonné certaines des traditions magyares que Szabolcs tient pour vitales, ce qui n’est sans conséquence si l’on veut être activement intégré cette minorité. Son ami a de nombreuses relations chez les Slovaques. Et Szabolcs trouve qu’il fait peu cas de ses origines hongroises. Conserver des liens vivaces avec la mère-patrie et parler hongrois n’arrange pas les relations entre les deux communautés ces temps-ci.
Remonter aux racines culturelles et historiques communes permettra aux deux pays de comprendre leur passé conjoint. Ils accepteront aussi le fait que les sentiments nationaux blessés et les offenses de l’histoire doivent céder le pas à la volonté de se connaître mutuellement et de tenter de vivre côte-à-côte comme autrefois. Malheureusement cet espoir reste lointain et idéaliste pour le moment, déclare Szabolcs au moment de partir assister à un match de football, du côté hongrois.
Translated from Testimony: being young, Hungarian and a football-loving minority in Slovakia