Témoignage d’un Ossète turque
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Philippe-Alexandre Saulnier100 000 Ossètes du Sud résident actuellement dans l’UE. Le 7 août dernier, à trois heures du matin, quand le conflit armé entre les forces russes et géorgiennes s’est déclenché, Engin Polat Tkhostati dormait. Il nous livre ici ses impressions.
« En 1864, mon grand-père a été déporté en Turquie. C’est là que je vis aujourd’hui avec ma famille. A 3 heures du matin, je dormais quand les soldats géorgiens attaquèrent l’Ossétie. Le souvenir du massacre commis en 1991 me revint aussitôt en mémoire. Je me suis senti immédiatement concerné à cause de la présence de certains de mes proches et amis vivants sur ce territoire. Je m’entretiens régulièrement par e-mails avec un ami qui vit à Tshinkvali, la capitale de l’Ossétie du Sud. J’ai essayé de le joindre, mais la connexion était coupée. J’ai appris par la suite que son domicile avait été détruit au cours de l’attaque. Depuis il a dû rejoindre un camp de réfugiés situé à Vladikafkas.
Durant le conflit et l’invasion de la Géorgie, l’Ossétie du Sud a été partiellement détruite. Tout comme l’immeuble qui abritait le Parlement dévoré par les flammes, un grand nombre d’édifices ont été endommagés. En se retirant, les forces russes ont laissé des Ossètes innocents à la merci de l’armée géorgienne, les exposant ainsi à un éventuel génocide. La guerre a déjà causé la mort de 2000 personnes. A la fin du siècle dernier, quand la Géorgie envahit une première fois l’Ossétie, 18 000 habitants de ce pays succombèrent et 50 000 autres furent contraints d’émigrer. Malgré tout, en 1991, l’Ossétie avait réussi à repousser l’envahisseur.
« J’aimerais vivre en Ossétie du Sud, bien que je sois originaire de Turquie. »
Il semble que l’Occident soit victime d’une campagne de désinformation. Par exemple, on recense comme Géorgiens des morts qui sont en réalité Ossètes. L’actuel Ministre des affaires étrangères français prétend même que ce sont les Russes qui perpétuent un génocide contre les Géorgiens. En fait, ce sont les Russes qui protègent jusqu’à présent, les Ossètes contre une campagne de nettoyage ethnique orchestrée dans le passé par les Géorgiens. Les conseillers de Mr Bernard Kouchner montrent, par ces affirmations, leur ignorance de la situation. En revanche, je crois que les citoyens de l’Union européenne apportent leur soutien aux droits des 70 000 Ossètes qui ont déjà eu à souffrir des attaques de la Géorgie depuis plusieurs années.
Nous attendons donc que le monde entier reconnaisse officiellement à l’Ossétie du Sud, une indépendance qui, depuis 16 ans, n’est qu’officieuse. Les pays qui se disent respectueux de l’indépendance du Kossovo doivent avoir la même attitude vis-à-vis de l’Ossétie. Si l’économie de ce pays pouvait être stabilisée, les deux pays seraient alors heureux. Mais, en Ossétie comme en Géorgie, l’impéritie des dirigeants ne fait qu’envenimer la situation.
La Géorgie est un voisin. J’espère que nous saurons à l’avenir vivre en paix de chaque côté d’une frontière précise comme celle que la France et l’Allemagne ont réussi un jour, enfin, à définir après tant de souffrances causées par les deux guerres mondiales. J’irai en Ossétie au mois de septembre prochain. C’est là que j’aimerais vivre, bien que je sois originaire de Turquie. »
Translated from Voices: a South Ossetian in Turkey