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Saint-Valentin, parade kitsch

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Politique

Le 14 février est un jour spécial dans la plupart des pays : celui de l’amour. En a-t-on réellement besoin ou s’agit-il simplement d’une imposture marketing ?

À la fin des années 80, encore adolescente, je n’avais jamais entendu parler de la Saint-Valentin. La Pologne était sous le joug du régime communiste et nous avions beaucoup d’autres jours fériés, comme la Fête du Travail le 1er mai ou l’anniversaire de la libération le 22 juillet 1944. Aujourd’hui, si les enfants polonais n’ont plus la moindre idée de ce que signifient ces dates, ils connaissent parfaitement la Saint-Valentin et la célèbrent comme s’ils l’avaient fait durant des siècles.

L’histoire commence…

Bien qu’il n’y ait aucunes certitudes sur les origines de la Saint-Valentin, plusieurs légendes laissent penser que ces festivités seraient issues de l’histoire de Valentin, un prêtre romain martyrisé pour avoir refusé de renoncer à sa foi chrétienne sous le règne de l’Empereur Claudius II. Le jour de sa mort, un 14 février de l’an 269 après J.C., il laissa une lettre destinée à une jeune fille qui lui rendait régulièrement visite, l’aidant à garder espoir durant son incarcération. Le billet était signé « de la part de ton Valentin ». C’est ainsi qu’est née la tradition d’échanger des mots doux anonymes et que Valentin est devenu le saint patron des amoureux. Un tel jour consacré à l’amour existait déjà depuis bien longtemps dans certaines contrées : quelques fêtes comme celles des « Lupercalia » en Italie ou de « Kupala » en Pologne et en Ukraine étaient organisées en l’honneur des dieux païens et permettaient aux hommes et aux femmes de l’époque de se rencontrer, de danser, de mieux se connaître et d’exprimer leurs émotions.

Quelles coutumes ?

Pendant des siècles, le 14 février a été synonyme de la fête de l’amour célébrée sous des formes très variées. Au Danemark, il est courant d’échanger des poèmes, des bonbons et des perce-neiges (« snowdrops »). Les Danois offrent également à leur dulcinée une « gaekkebrev » (carte accompagnée d’une devinette) qu’ils signent anonymement à l’aide de points. Si le destinataire devine le nom correct, l’expéditeur aura droit à un œuf de Pâques. En Italie, la tradition a toujours été de passer ce jour à l'extérieur : se promener dans des jardins, écouter de la musique, lire de la poésie et marcher en compagnie de l’être aimé. Les Catalans sont très peu nombreux à célébrer les amoureux le 14 février puisqu'ils disposent d'une autre date, celle de la Saint-Jordi le 23 avril. Etrange coutume : le 14 février au Japon, seules les femmes offrent des cadeaux à leur petit ami ou leur mari. Mais aussi à leurs collègues de travail. Pour le patron, ce sera une élégante boîte de chocolats, et pour l’être aimé, un gâteau au chocolat en forme de cœur, fait maison et avec plein d’amour !

Partout dans le monde, l’usage est d’envoyer des cartes contenant des mots doux, d’offrir des fleurs (particulièrement des roses), des bonbons et, pour la personne la plus importante, de célébrer l’occasion par un dîner dans un restaurant chic, un week-end romantique, de la lingerie, du parfum ou des bijoux. Il n’est pas surprenant que, d’une année sur l’autre, on ait tendance à dépenser de plus en plus pour cette occasion si particulière. Une attitude vénale bien loin de la chanson des Beatles « l’argent ne peut pas m’acheter, mon amour »(« Money can’t buy me love »).

Gros business

Un coup d’œil au merchandising Saint-Valentin et l’on ne peut s’empêcher de penser que tout tourne autour de l’argent. Le pays numéro 1 en matière de dépenses valentinesques reste les États-Unis, avec un montant total de 13 milliards de dollars dépensé pour ce jour très spécial rien que pour 2005. Les Européens sont néanmoins loin d’être en queue de peloton. On dépense chaque année davantage d’argent pour démontrer notre affection. « La Saint-Valentin est devenue un très gros business pour les revendeurs dans une période représentant traditionnellement l’un des mois les plus mous de l’année », explique Tracy Mullin, PDG de la Fédération Nationale américaine de vente au détail (NRF).

Des millions d’experts en marketing à travers le monde sont à l’affût d’idées de célébration plus branchées les unes que les autres, même si la majorité des gens préfèrent rester fidèles à leurs cadeaux « testés et approuvés ». Mais on trouve toujours des personnes intéressées par l’offre d’une agence de voyage proposant une « semaine de plongée en Égypte spécial Saint-Valentin », ou par l’idée de remplacer le sapin de Noël par un sapin Saint-Valentin afin de pouvoir y accrocher mots d’amour et cœurs pour les membres de la famille.

Tendance de ces dernières années, il est désormais à la mode de célébrer le 14 février non seulement avec son amoureux mais aussi avec ses collègues ou professeurs. Comme le souligne la NRF, « les consommateurs incluent dans leurs dépenses de Saint-Valentin le bien-aimé, le partenaire, d’autres membres de la famille, les amis, les camarades de classe et les professeurs, les collègues, ainsi que d’autres personnes, y compris les voisins ou les baby-sitters ». Bref, pas mal de gens à qui faire plaisir…

Concernant le choix de cadeaux proposé aux consommateurs, la qualité et la valeur artistique des articles sont nettement en déclin. La production de masse et l’aspect commercial de la Saint-Valentin donnent naissance à des produits plutôt kitsch. Comme beaucoup, Sarah, étudiante belge, ne sait absolument pas quoi acheter à son petit ami. « Je pense que je vais tout simplement faire du e-shopping, et je choisirai peut-être un sous-vêtement rigolo ». Toujours mieux que miser sur une rose artificielle ou un affreux ange en porcelaine…

Translated from What’s love got to do with it?