Pourquoi ne pas rentrer chez vous ?
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Julien HueSi en Angleterre, l’idéal du multiculturalisme a volé en éclats, la France a récemment opté pour l’assimilation avec la mise en place d’un ministère de l’Immigration et de l’identité nationale.
11,75% de la population mondiale émigrée aurait déjà frappé aux porte de l’Europe, selon un rapport de l’Union européenne datant de 2003. Pour juguler ce flux et favoriser une meilleure intégration des populations, les Etats membres ont récemment opéré un transfert de compétences au profit des institutions européennes.
Mais comment l’Union européenne peut-elle faire pour que les 25 millions de ressortissants extra-communautaires actuellement résidant dans son espace se sentent chez eux ?
La mosaïque britannique vole en éclats
Les pays accueillant une importante population immigrée, comme la Belgique, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas, l’Espagne et l’Autriche, doivent souvent faire face à des tensions, liées au défi permanent que représente l’intégration. Les attentats qui ont frappé Madrid en 2004 puis Londres en 2005 ont contribué à alimenter dans l’opinion publique le sentiment que l’immigration pouvait constituer une menace pour la sécurité et la stabilité d’un pays.
Ces évènements tragiques ont notamment été l’occasion d’un cruel constat dans une Grande-Bretagne qui s’est longtemps targuée d’une politique d’intégration modèle : lors d’un sondage, 25% des musulmans du pays ont déclaré comprendre les motivations des poseurs de bombes.
Le modèle britannique a longtemps été vu comme étant le vecteur d’intégration le plus efficace. Sa philosophie se fonde sur l’ambition de faire d’un pays une mosaïque multiculturelle. Les différents groupes culturels et religieux se voient ainsi reconnaître le droit de conserver leur héritage, tout en prenant part à la vie civique, sociale et économique de leur patrie d’accueil. L’assimilation d’individus culturellement distincts demeure donc essentiellement le fruit d’une démarche personnelle volontaire.
Malgré d’évidents avantages, le modèle britannique ne saurait représenter un idéal. Ses détracteurs, à l’instar du journaliste anglais Martin Wolf, soulignent notamment que « le multiculturalisme est dangereux car il détruit la communauté politique. Il est dégradant, dans la mesure où il déprécie la citoyenneté. »
En clair, le multiculturalisme n’encourage pas suffisamment le ‘vivre-ensemble’, pas plus qu’il ne met en valeur le sentiment d’une identité nationale commune.
L’immigration ‘à la française’
De l’autre côté de la Manche, les choses sont également compliquées. La France compte près de 7 millions de personnes d’origine extra-européenne, dont 5 millions issues de culture musulmane. Le débat sur l’identité nationale a récemment pris place au cœur du modèle français d’intégration républicaine.
Contrairement au cas du Royaume-Uni, les étrangers s’installant en France sont tenus d’adapter plus étroitement leur culture aux valeurs fondamentales de la République. Une devise qui tient en trois mots : ‘liberté, égalité, fraternité’.
Mais dans la réalité, ces étrangers se montrent rarement enclins à abandonner une part de leur identité personnelle, faite de religion, coutumes et valeur. Le débat mouvementé autour de l’interdiction du port du voile en février 2004 en a fourni une illustration éloquente.
Par ailleurs, le fait d’afficher un solide parcours académique et de parler couramment le français ne suffit pas à se protéger du risque d’exclusion socio-économique. Des incidents embrasent fréquemment les banlieues les plus pauvres des métropoles françaises, où vivent essentiellement des populations issues de l’immigration.
Pour expliquer le déclenchement des émeutes en France à l’automne 2005, les principaux médias s’accordaient pour souligner l’impact de conditions socio-économiques, en constante dégradation, de ces populations résidant dans les quartiers pauvres. Il conviendrait d’y ajouter une discrimination raciale dont la réalité est encore mal mesurée.
L’Europe a un besoin d’immigration !
Il est paradoxal de considérer l’immigration et le multiculturalisme qui en découle comme une menace. L’Europe subit de façon constante la faiblesse de son taux de croissance, révèlant un besoin criant d’immigration afin de stabiliser l’économie et les systèmes de retraite. Selon un rapport de l’ONU (2000), l’Europe pourrait faire face d’ici 2025 à un déficit de main d’oeuvre, nécessitant près de 35 millions d’immigrés.
Paradoxalement, la xénophobie se nourrit de la crainte de voir des travailleurs étrangers, non qualifiés, dérober le travail habituellement dévolu aux Européens. Or, la réalité démontre que ce sont généralement les travailleurs immigrés qui se chargent de tâches délaissées par les Européens, voire qui montent leurs propres entreprises, contribuant à la valeur ajoutée des économies nationales. La diversité culturelle gagnerait donc à être présentée comme une base solide de la force créative d’un pays.
Dès 1990, la Convention de Dublin avait fixé les principes et les étapes d’une politique commune en matière de protection des réfugiés et d’asile politique. Pour autant, les avancées en la matière sont laborieuses : la Commission européenne même reconnaît éprouver des difficultés à rassembler les données nécessaires à la compréhension des grandes tendances des migrations.
On mesure bien l’ampleur du problème, lié au fait que les données sont recueillies à partir d’institutions et d’appareils statistiques nationaux, chacun utilisant des méthodes différentes de compilation de l’information. Ne reste plus qu’une tâche à accomplir sur cette base : gérer les politiques complexes de migration à l’échelon européen.
Translated from How about going back to your country