Obama : l’Europe l’attend au tournant
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emilie sineauAvec l’économie, l’Irak, l’Afghanistan, Guantanamo et la Russie, l’Europe souhaite bon courage à Obama ! Après son élection le 4 novembre, on n’avait peut être jamais autant attendu d’un seul homme.
Dans la foule de 200 000 personnes qui a accueilli Barack Obama le 24 juillet 2008 à Berlin, certaines personnes ont réussi à emporter avec elles des bannières et des pancartes. Sur l’une d’entre elles, on pouvait lire « Obama » d’un côté et « contre le nombre de victimes » de l’autre. « Plus tard, nous pourrons dire que nous l’avions vu avant qu’il ne devienne président », confie une jeune femme excitée à la sortie de la Colonne de la Victoire.
« Nous pourrons dire que nous l’avions vu avant qu’il ne devienne président »
Cet évènement, et l’engouement pour Obama, illustre bien les grandes attentes d’un public déçu par l’alliance transatlantique et enragé par la politique du président sortant George W. Bush. Obama semblait alors incarner une fois de plus le rôle de grand frère que joue les Etats-Unis vis à vis du vieux monde. Barack Obama va devoir faire face à un vaste éventail de défis concernant la politique intérieure mais aussi extérieure et ceci dès sa prise de pouvoir le 20 janvier prochain. D’après les spécialistes, la présence de l’armée américaine en Europe ne devrait pas changer d’un iota. Obama est, après tout, le président des Etats-Unis en priorité et le dirigeant du monde ensuite. Voici seulement quelques-uns des problèmes que l’Europe voudrait voir résolus.
Les deux pieds dans la crise
Avec un taux de chômage à 6,1 %, des consommateurs dépensant peu, une population qui reste pessimiste face à l’avenir, les Etats-Unis est au milieu de la plus grosse crise économique depuis les années 30. Le premier défi d’Obama sera de dépenser intelligemment les 700 millions de dollars du fond de sauvetage dont il dispose, dans le but d’empêcher un écroulement massif de l’économie américaine. Son second défi sera de redonner confiance au consommateur américain pour relancer l’économie globale.
« Son second défi sera de redonner confiance au consommateur américain pour relancer l’économie globale »
Cette économie suit le schéma du système américain dit de Bretton Woods. Etablit dans les années 50, ce système est basé sur le libre-échange, le modèle capitaliste anglo-saxon. Obama devra définir un nouveau cadre avec l’Europe, le continent où se situe le plus grand ensemble de consommateurs au monde, une communauté qui a évidemment une grande place à prendre dans l’élaboration d’un « Bretton Woods 2 ».
L’Union européenne essaiera de créer un modèle économique basé sur un cadre stricte de contrôle et quelques principes de base de socialisme modéré. La droite américaine semblait penser pendant la campagne électorale qu’Obama est un socialiste affirmé, cependant sa philosophie économique est davantage centre-droite. Le président français Nicolas Sarkozy, lui, s’attend à ce qu’Obama soit réceptif aux idées de l’Europe.
L’Iran et l’arme nucléaire
Les deux côtés de l’Atlantique ont été en conflit dans la recherche d’une solution concernant les ambitions suspectées du pays à construire un arsenal nucléaire. L’approche jusqu’au-boutiste de l’administration Bush consistait à refuser toute rencontre avec les chefs d’Etat iraniens ou même d’établir un contact diplomatique. L’Europe a du prendre la tête des négociations sans l’appui militaire des Américains.
Obama a affirmé qu’il arrêtera la politique d’isolation diplomatique mise en place par l’administration Bush et qu’il ouvrira le dialogue avec l’Iran. Cependant, durant ses 100 premiers jours à la tête du pays, ne voulant pas apparaître faible, il pourrait finir par adopter une position dure, peut-être même plus dure que celle qu’aurait suivie le candidat républicain John Mc Cain. Obama a dorénavant quelque chose à prouver.
Afghanistan, une guerre impopulaire
La plupart des nations européennes se sont retirées du conflit en Irak mais elles sont toujours profondément impliquées dans la mission de l’Otan en Afghanistan. Les critiques viennent du fait que les Etats-Unis y ont engagés des ressources insuffisantes après la « distraction » de la guerre en Irak en 2003. Obama a promis de transférer d’Irak en Afghanistan des ressources militaires et du personnel pour résoudre enfin ce conflit. En attendant, le nombre de victimes continue d’augmenter dans une guerre qui reste impopulaire.
Une « war on terror » qui prend fin
L’administration Obama arrêtera sûrement d’utiliser ce terme. Et des changements de politique importants sont à venir. Obama a promis de fermer la prison, hautement controversée, de Guantanamo à Cuba. Il promet également de cesser le processus qu’on appelle « extraordinary rendition » dans lequel des terroristes présumés étaient secrètement enlevés de pays européens par la CIA puis expédiés via le territoire aérien européen dans des pays où ils pouvaient être torturés légalement.
Cette nouvelle administration devrait être plus coopérative pour faciliter le commerce et les voyages transatlantiques. Et le projet proposé par l’administration Bush qui consiste, pour les citoyens européens, à demander à l’avance l’autorisation de se rendre aux Etats-Unis pour voyager, pourrait bien partir aux oubliettes.
L’Europe divisée sur la Russie
La Russie est un des principaux sujets de politique extérieure qui suscite l’inquiétude. Les richesses engendrées par le pétrole ont donné au colossal voisin du continent européen, une nouvelle assurance. En effet, l’achat massif de pipelines a rendu l’Europe continentale de plus en plus dépendante en termes énergétiques de la Fédération russe. Les pays de l’est de l’Europe, membres du pacte de Varsovie, ont été particulièrement énervés par l’invasion de la Géorgie par la Russie le 8 août dernier. Celle-ci « provoquée » par la volonté apparente des Etats-Unis de vouloir les encercler de membres de l’Otan. La politique de Bush sur l’Otan a surement aggravé la situation.
Les Russes sont prêts à combattre : un jour seulement après la victoire historique d’Obama, le 4 novembre, le président Dimitri Medvedev annonçait que le pays installera de nouveaux missiles dans son enclave de Kaliningrad, hors de la portée de l’Union européenne, si les Etats-Unis ne reviennent pas sur leur projet de système de défense missile en Pologne. Les dirigeants des pays européens de l’est et du centre veulent probablement voir l’administration Obama durcir le ton contre la Russie, continuer les invitations envers l’Ukraine et la Géorgie à rejoindre l’Otan, et ne pas reculer sur le projet du système de défense en Pologne. Cependant, les dirigeants des pays européens de l’ouest et du sud, tout particulièrement l’Allemagne et l’Italie, préfèreraient voir l’administration Obama atténuer les tensions avec la Russie et tenter une approche plus diplomatique.
Translated from Dear Obama administration: Europe’s top five on the Christmas list