Obama : des cris de joie pour quel « happy end » ?
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Floriane BoillotLe jour de son investiture au Capitole, Obama a tracé les grandes lignes d’un scénario à l’américaine : la reconstruction d’un pays et le « remake » émouvant d’un parcours politique comme celui de Lincoln à son époque. Mais quelle sera la chute ?
Les médias l’ont annoncé : nous étions plus de 2,5 millions de personnes dans le Mall (la grande esplanade en face du Capitole ou se situe l’obélisque). Beaucoup sont arrivés la veille de l’investiture d’Obama. Au petit matin du mardi 20 janvier, bien équipés ou pas, les gens supportent les mêmes températures ! Cela joue beaucoup pour moi, originaire de Malaga. Nous sommes sur place à 4 h 30 du matin, le Mall n’ouvre pas avant 7 h, et la queue est déjà si longue que nous nous contentons d’un emplacement devant le second écran, à côté du Lincoln Memorial, où s’élève la grande statue du président. Une chose est vraiment réussie : l’accueil des milliers de bénévoles placés tout le long de l’esplanade. Ils nous saluent et distribuent des petits drapeaux des Etats-Unis : « Bienvenue ! Tope là ! »
Des huées pour Bush
Les membres du comité arrivent ensuite à partir de 10 h, devant une mer de drapeaux et des « woo ! » de bienvenue chacun leur tour. Quand Bush apparait, les drapeaux ne bougent plus. Certaines personnes le huent et d’autres lancent : « Mesdames et messieurs : le pire président des Etats-Unis ». Les gens dansent et disent au revoir au président sortant. Peu après, Obama arrive. Et on le remarque ! Les gens sautent et agitent le drapeau adoré en criant son nom. Cela ressemble à un évènement sportif, et c’est d’autant plus étrange que toutes ces ovations sont à l’intention d’un leader politique. La folie s'arrête seulement quelques secondes quand Aretha Franklin monte sur le podium pour chanter l’hymne national.
Silence d'outre-tombe pendant le serment et le discours. On peut seulement entendre quelques « Yeah, man », comme si les mots du nouveau président établissent un accord entre le président, l’audience, et les responsabilités que le pays doit entreprendre. Certains pleurent, d’autres sourient, mais tous partagent la même espérance. Obama parle posément, avec clarté : le peuple américain doit de nouveau montrer au monde que les Etats-Unis est une terre d’hommes libres et d’opportunités. J’ai les larmes aux yeux mais je ne sais pas si c’est cette scène digne d’une superproduction à l’américaine qui m’émeut, ou bien si en tant que résidente de ce pays, je suis fière d’avoir cet homme comme leader.
« Obama est trop bien pour être vrai »
Si les Américains nous font rêver, c’est surtout au travers de leurs films. Mais les remakes sont parfois des gros ratages. Une étude explique d’ailleurs que les films hollywoodiens sont frustrants car ils créent des scénarios que le public ne retrouve pas dans la vie réelle. Le problème avec Obama, et ce depuis qu’il a commencé sa carrière en Illinois, c’est qu’on le compare avec Lincoln qui a aboli l’esclavage et surmonté la guerre civile. Et voilà qu’aujourd’hui, on se prend à rêver à une histoire encore meilleure.
Mais beaucoup d’Américains pensent aussi qu’un tel scénario n’aura pas forcément d’« happy ends » : « Obama est trop bien pour être vrai ». Comme si, tombé du ciel, il débarquait tel un sauveur biblique en terre puritaine. Les Américains croient qu’aujourd’hui tout va être meilleur car Obama est à la Maison blanche. Mais les choses ne changent pas d’un jour à l’autre, et une seule personne ne peut pas les changer. Relever le pays est le travail de tous les Américains. Obama a bien précisé ce point. Parce que faire un remake, c’est aussi reconstruire. Et Obama a déjà commencé par le plus dur, renforcer les fondations de toute une nation, faire croire que c’est possible. Pour que la maison ne s’enfonce pas à nouveau.
Translated from Obama en primera persona: Remaking America