Mìdia Ninja: le mondial vu de la rue
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Timothée GrilletUn collectif de plus de 200 militants se prépare à raconter ce qui est sur le point de se passer en dehors de stades brésiliens accueillant le Mondial, dans une atmosphère de tension et de mal être qui ne laisse présager rien de bon.
Le Brésil, pays du foot, du soleil et du divertissement. Pas exactement... Brésil terre de souffrance, de pauvreté et de criminalité plutôt. Celle qui s’apprête à accueillir le Mondial est une nation déchirée en deux. D'un côté il y a ceux qui détiennent le pouvoir et qui sont appelés à gérer des montagnes de milliards. De l'autre, il y a une population épuisée par la criminalité, la pauvreté et le mal être social généralisé et qui, dès que l'occasion se présente, est prête à sortir dans la rue pour faire entendre sa voix. L’approche de l'édition brésilienne du Mondial 2014 ne rimait ni avec détente, ni avec entrain comme nous le pensions.
Depuis juin dernier (quand au pays se jouait la Coupe des Confédérations, "échauffement" traditionnel en vue du Mondial), des dizaines et des dizaines de manifestations ont eu lieu dans les allées des plus importantes villes du Brésil, dont beaucoup éclatèrent en violence. Aucun masque de carnaval ni notes de samba. D'une côté des troupes de policiers avec leur équipement anti-émeute, et de l'autre des citoyens accaparés à protester contre les coûts considérablement élevés, pour la majeure partie venant des fonds publics, concernant la construction et la modernisation des stades et qui, d’après eux, auraient du être destinés aux services de base tels le transport, l'éducation et la santé.
Depuis ce temps là, les grèves et manifestations ne cessent de se succéder. Au cours des dernières semaines, des fonctionnaires ainsi que d'autres catégories d'employés se sont mis en grève et, en plus de revendiquer "de meilleurs conditions de travail", ils ont également haussé la voix pour l'insuffisance des services de santé, d'éducation et de mobilité, services qui sont désormais sur le point de s'effondrer.
Mìdia Ninja, les journalistes du côté du peuple
Propre aux affrontements de rue de juin dernier, voilà qu'émerge Mìdia Ninja, un collectif d'écrivains, photographes, vidéastes et citoyens dont la principale intention fut depuis le début celle de sensibiliser l'opinion publique, brésilienne ou non, sur ce qu'il se passait dans les rues de toutes les plus importantes villes du Brésil. Ce projet, né de pas grand-chose, est lié à la sphère des mouvements de gauche et au circuit du collectif Fora do Eixo (organisateurs de festivals de musique et d'événements culturels). Ce projet a réussi en très peu de temps à "recruter" près de deux mille collaborateurs réparti sur plus de 100 villes de l’État de Rio de Jainero prêts à n'importe quelle heure du jour et de la nuit pour raconter ce qu'il se passe dans les rue des principales villes du Brésil.
Bruno Torturra, l'un des leaders du collectif, explique comment Mìdia Ninja, grâce à laide des nouvelles technologie et d'instruments multimédias, se propose comme une "alternative au journalisme traditionnel", faisant du "aucune coupure, aucune censure" leur principale caractéristique. Rafael Vilella, photographe du collectif, souligne au contraire l'utilité du travail que le groupe cherche chaque jour à mettre en avant, c'est-à-dire "offrir au public une contre narration qui soit capable de montrer tout ce qui n'apparait pas dans les médias traditionnels".
Armés de smartphones, caméras et masques à gaz
S'appuyant sur les médias sociaux utilisés comme plate-forme principale, Mìdia Ninja a marqué dès le début une profonde rupture avec les médias traditionnels. Des centaines de photos et vidéos, souvent amateurs, téléchargées sur la page Facebook ou Tumblr, ont permis de sensibiliser l'opinion publique sur les raisons des manifestations, et ont également réussi à signaler et dénoncer divers abus commis par les forces de l'ordre. Grâce à une vidéo, les manifestants ont même réussi à démasquer un policier en civil qui avait jeté un cocktail Molotov durant une manifestation, enchaînant une violente contre réaction.
Parmi les balles en caoutchouc perdues, les lacrymogènes, les pierres et les fragments de grenades, les nouveaux journalistes d'action version 2.0, armés de smartphones, caméras et masques à gaz ont réussi ces derniers mois à raconter ce qu'il se passait dans les rues d'une nation au sein de laquelle le contraste entre luxe et pauvreté s'est toujours et se fait toujours plus grand. Les airs de fête d'il y a 7 ans, quand la compétition fut décernée à la nation du foot par excellence, ont rapidement laissé le pas à ceux de la frustration et de la colère de la part d'une population de plus en plus pauvre face aux autorités. Sur les 200 millions de citoyens brésiliens, aujourd'hui seulement 50% se sont déclaré heureux d’accueillir la plus importante compétition de football de la planète. Les autres, on les retrouvera probablement dans les rues, manifestant poings levés contre les injustices et contre la pauvreté toujours plus opprimante. En attendant, nous autres, les occidentaux, nous serrons trop occupés à jouer les supporters pour nos pays bien aimés. Mais entre deux parties, jeter un œil sur le site de Mìdia Ninja ne vous coûtera rien et cela pourrait nous aider à nous rappeler que nous faisons tous partie de la même famille humaine.
Translated from Mìdia Ninja: i Mondiali visti dalla strada