Les journalistes croates, victimes de la censure d'Etat
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Josipa PavlićQuand le journaliste sportif de renom Zarko Susic a succombé d'une mort naturelle à 95 ans le 26 avril 2010, on ne pouvait s'empêcher en Croatie de douter sur les raisons de sa mort. Il faut dire qu'au classement de l'ONG Freedom House, la Croatie est bonne 85ème pour ses atteintes récurrentes à la liberté de la presse. En voici des exemples récents.
Entre le meurtre de journalistes de premier ordre et les petites attaques contre ceux qui prennent la parole sur des sujets où on préfèrerait les voir muets, on ne va pas vous mentir : la situation est loin d’être rose pour les journalistes croates. Ivo Pukanic, l’une des personnalités les plus influentes du pays, et son collègue, l’éditeur marketing Niko Franjić, ont été tués par une bombe posée dans leur voiture en octobre 2008. La justice va-t-elle être rendue à Ivo Pukanic, le fondateur et éditeur de l’hebdomadaire Nacional, aussi populaire que controversé ? Ses articles les plus en vue abordaient le thème de la « criminalité organisée » en Croatie et ressortaient des documents d’Etat confidentiels, ainsi que de nombreuses affaires impliquant des dirigeants politiques de l’époque.
IFEX, le réseau international de défense de la liberté d’expression basé au Canada, décrit le meurtre comme « une des attaques les plus graves de ces dernières années dans toute la région du sud-est de l’Europe, et qui pourrait sérieusement réduire les chances de la Croatie de rejoindre l’Union Européenne ». Pukanic avait informé le public et la police à plusieurs reprises de précédentes tentatives de meurtres. Quand il a été agressé par un homme armé en avril 2008, on l’accusa d’avoir monté cette histoire pour se faire de la publicité. Et comme le confirme le Comité de protection des journalistes (CPJ) basé à New-York, « l’agresseur n’a pas été interpellé ».
Dusan Miljus
Selon Jutarnji List, le premier quotidien du matin en Croatie, 40 journalistes ont été attaqué en Croatie durant les 15 dernières années. Ce chiffre comprend un de leurs journalistes, Dusan Miljus. Le grand reporter a été gravement blessé par deux hommes masqués et armés de battes de baseball en juin 2008 à Zagreb. Miljuš a écrit sur le crime organisé en Croatie pendant des années. Mais les journalistes d’investigation de sa trempe ne sont pas en odeur de sainteté en Croatie. Dans le classement de Freedom Press, une organisation indépendante américaine, le pays « est passé de la 38ème à la 40ème place, à cause des renvois et des procédures judiciaires engagées contre les journalistes qui écrivent sur les crimes de guerre, le crime organisé et la corruption »
Ana Jelinic
Le mot d’ordre de la journée mondiale de la presse du 03 mai 2010 est « liberté d'information », un principe qui a coûté son job à Ana Jelinic. En novembre 2009, la directrice des programmes de dossier.hr a été renvoyée pour « faute grave » par le directeur de la chaîne HTV (la chaîne de télévision croate Hloverka Novak-Srzić). Son erreur ? Accepter de diffuser le 12 novembre 2009 un programme intitulé « La Croatie dans la mafia, réseau criminel et corruption » Quelques jours plus tard, des journalistes de la télévision publique ont symboliquement scotché leur bouche ainsi que leurs caméras en signe de protestation silencieuse.
Photos : Manifestation de journalistes; Ivo Pukanic via Wikimedia; Dusan Miljus avec l'autorisation aimable de ©Dusan Miljus Facebook page
Translated from Three Croatian journalists to remember on world press freedom day