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Les interconnexions électriques : La clef d’une nouvelle solidarité Européenne ? 

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Flavie Prieux

Bruxelles

Les interconnexions sont la clef de la construction d’un marché commun de l’énergie. Mais, pour qu’elles fonctionnent correctement, la solidarité doit rester la valeur essentielle. Avec le Brexit, l’UE a plus que jamais besoin de rester solidaire et unie.

Depuis 2003, les lois facilitent l’accès aux réseaux pour des échanges d’électricité transfrontaliers. En 2013, selon le Réseau européen des gestionnaires de réseau(x) de transport d’électricité (REGRT-E), la consommation d’électricité européenne a atteint un pic de 3 307 terawatt-heure. Maintenir et développer les lignes électriques, le réseau, tout en sécurisant la fourniture en Europe sont des priorités majeures pour l’Union Européenne.

Les interconnexions, la solidarité et leurs bénéfices.

Les interconnexions sont des connexions physiques entre les pays, qui permettent à l’électricité de se déverser avec plus d’efficience et plus rapidement entre les pays. Depuis 2014, 17 pays européens sont réunis sur le marché commun de l’électricité. De nombreuses régions sont connectées. Pour le dire autrement, un algorithme trouve l’optimum économique dans le but d’avoir une convergence du prix sur le marché européen et de réduire les congestions. Les échanges en sont ainsi facilités.

Les surplus de production sont alloués aux régions qui en ont besoin : c’est le principe de solidarité. Ces 17 pays réunissent environ 75% de la totalité de l’électricité consommée en Europe. Selon Alain Fiquet le vice-secrétaire général de Réseau de Transport d’Electricité (RTE) : «  Les interconnexions sont en train de changer : elles sont (maintenant) basée sur un système qui privilégie l’assurance », comme les systèmes de retraites, entre les personnes actives et retraitées. En effet, de nos jours, les interconnexions sont basées sur la solidarité.

Mais quels sont les avantages d’un tel système ?

Avant tout, les interconnexions sont bénéfiques d’un point de vue économique. Les objectifs de la connexion des marchés, la méthode pour intégrer les marchés d’électricité de différentes zones, sont d’avoir un prix convergent dans la zone connectée, et pour optimiser l’utilisation des capacités des interconnexions. Le marché couplé est basé sur la méthode de calcul basée sur les flux (une méthode de calcul qui identifie la capacité d’échange immédiatement disponible à l’interconnexion), qui en allouant l’électricité, déplace les capacités d’échanges commerciaux aux frontières où elles sont les plus utiles, facilitant les échanges et l’harmonisation des prix en rendant transparente l’information de la capacité disponible. 

Deuxièmement, les interconnexions et l’unification du marché permettent de sécuriser la fourniture d’électricité et d’éviter les coupures. Par exemple, les interconnexions entre la France et l’Espagne sont opérationnelles depuis 2015. En 2008, RTE a décidé avec son homologue espagnol, Red Eléctrica de España (REE), de mettre en place ce projet à l’aide d’une société commune ; Inelfe.

Cette ligne électrique de 65km est un succès technologique qui a dû surmonter des challenges techniques et économiques pour exister. Cette ligne est entièrement souterraine. Le projet doit doubler la capacité d’interconnexion entre la France et l’Espagne, améliorer la sécurité de fourniture, équilibrer le système, fournir en énergie le « TGV Espagnol » et optimiser l’énergie éolienne espagnole ; permettant un pas de plus vers la transition énergétique et la décarbonisation.

Cependant, une commission sur la régulation de l’énergie a publié en 2015 un rapport qui souligne que, même s’il y a une meilleure fourniture d’énergie, la capacité d’échange ciblée ne sera pas atteinte, à cause d’entraves sur le réseau interne espagnol. Cet exemple souligne une des problématiques que les interconnexions doivent surmonter pour être efficientes : le manque d’homogénéité et de coordination de la régulation entre les pays européens.

Enfin, la coopération entre les opérateurs des systèmes de transmission européens (i.e. les entités d’exploitations des réseaux électriques)  permet d’adopter des codes qui harmonisent les règles d’administration des réseaux d’électricité entre les Etats membres. Ces codes de conduite pour les réseaux permettent que le secteur de l’électricité soit plus sûr, plus compétitif et plus durable.

Les challenges et les risques qu’impliquent les interconnexions : Avons-nous besoin de moins de solidarité pour plus de sécurité ?

En Novembre 2006, 15 milliards d’Européens avaient connu des coupures électriques. La raison principale de ces pannes était un manque de coordination entre les opérateurs des systèmes de transmission. Mais derrière ces problèmes de coordination, ce sont aussi des challenges économiques qui découlent de ces interconnexions. D’abord, certaines conditions doivent être remplies pour que les interconnexions soient efficientes. Les conditions de production et de consommation et les prix nationaux doivent être assez différents entre les deux pays pour que l’interconnexion soit bénéfique. C’est pour cela que les utilisations d’interconnexion sont assez faibles entre la France, l’Allemagne et la Belgique. Mais par exemple, l’Espagne, l’Italie et la Grande-Bretagne utilisent de nombreuses interconnexions parce que le différentiel de prix de l’électricité est assez important entre ces pays. De plus, la surproduction de capacité en Europe, la crise de la demande couplée à l’important développement d’énergies renouvelables qui ne sont pas en accord avec les besoins du réseau font baisser les prix dans les pays européens. Cela diminue et limite les différences de prix entre les pays européens. 

Deuxièmement, la Commission Européenne revoit son objectif de 10% d’interconnexion d’ici à 2020. Cette dernière semble viser les 15% d’ici à 2030. Néanmoins, cela signifierait un fort investissement pour certain état membres, à des coûts très importants, pour un objectif qui peut paraitre inatteignable pour le moment. Selon la Commission Européenne, le coût pour atteindre la cible des 10% est de 40 milliards d’euros. Si l’objectif est déplacé vers les 15%, cela signifierait des coûts encore plus importants.

Les interconnexions du système entrainent aussi une dépendance envers d’autres états pour le marché de l’électricité, moins de flexibilité nationale et moins de souveraineté. Si deux marchés sont liés par le principe de solidarité, d’un côté la fourniture en électricité est plus sûre, mais de l’autre cela peut augmenter le risque de la diffusion d’incidents d’un marché à l’autre.

Comme les marchés sont interconnectés et dépendants les uns des autres, si un marché est en difficulté, l’autre l’est aussi. Ainsi, si la connexion entre les pays réduits le risque de problèmes individuels, elle augmente le risque de problèmes collectifs. C’est l’un des principaux problèmes auquel l’UE est confrontée. Dans le but de limiter les risques systémiques et les contaminations d’un réseau à l’autre, des interfaces de sécurité ont été installées. C’est la même problématique que dans une cyberattaque : si un pays est touché, la contamination peut se propager par le système et toucher le réseau tout entier. Dans ce domaine, la cyber-sécurité est une priorité.

Le dernier challenge pour les interconnexions est d’ordre social. Les populations ne sont pas toujours en faveur des interconnexions et de la solidarité : ce sont des dépenses importantes qui profitent à d’autres pays, c’est une limitation du pouvoir de l’état membre et de sa souveraineté à décider de son mix énergétique, etc. Ainsi, l’interconnexion entre la France et l’Espagne a connu 14 années de négociations avant la conclusion d’un accord.

La solidarité implique la confiance envers un autre état et parfois, l’isolationnisme parait plus sûr que les interconnexions. Toutefois, l’Europe semble tendre vers plus de « souveraineté solidaire » que de « souveraineté solitaire ». En effet, grâce à l’harmonisation législative et les interconnexions, les risques et les opportunités ne sont plus nationaux mais régionaux et transnationaux. L’Europe doit prendre cela en compte.

Conclusion

Actuellement, la commission européenne a épinglé 12 pays, qui n’ont pas assez d’interconnexions électriques : L’Italie, L’Ireland, la Roumanie, le Portugal, l’Estonie, la Lettonie, la Lituanie, le Royaume-Uni, l’Espagne, la Pologne, Chypre et Malte. La commission tend vers une régionalisation du marché électrique, mais il y a encore des progrès à faire. Le paquet pour l’énergie propre de 2016 allait aussi dans ce sens, en introduisant des centres opérationnels régionaux chargés de rendre les opérations transfrontalières des réseaux plus fiables et efficientes.  Pour le moment, certains états membres sont assez sceptiques sur le rôle de ces centres parce qu’ils menacent le pouvoir de décision de l’état membre envers son mix énergétique et parce qu’il n’y a pas eu d’études claires sur l’impact de ces centres qui prouverait leur efficacité.

Cet article a été initialement publié sur le site web officiel de l’association Eyes on Europe.

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Crée en 2004 par un groupe d’étudiants, Eyes On Europe est une organisation qui traite des affaires Européenne. Au travers de leur magasine et de leur site web, ils font la promotion de l’Europe par la citoyenneté et le dialogue. Pour plus d’informations, vous pouvez consulter leur page Facebook  .

Translated from Electric interconnections: A new European solidarity?