Législatives en Algérie : votera, votera pas ?
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anne-laure aucherAlors que 24 partis et de nombreux candidats indépendants se présentent aux législatives, la campagne peine à intéresser des électeurs.
26 avril 2007, Une du quotidien francophone Liberté. La caricature du jour, réalisée par le célèbre dessinateur kabyle Ali Dilem, annonce que les Algériens s’apprêtent à se rendre aux urnes. En guise d’illustration, un électeur muni de son bulletin demande au scrutateur : ‘la corbeille, s’il vous plaît’. La scène est on ne peut plus symptomatique de la menace d’abstention massive qui pèse sur le scrutin parlementaire du 17 mai prochain.
Car aujourd’hui, le Parlement algérien est mené par une coalition qui regroupe le Front national de libération socialiste (FLN)– qui était jusqu’en 1989 le parti unique algérien –, emmené par le Président Bouteflika ; le Rassemblement national démocratique (RND), créé en 1997 ; et le parti islamiste modéré ancien Hamas rebaptisé Mouvement de la société pour la paix (MSP). Plus que la traditionnelle lutte entre opposition et majorité au pouvoir, l’enjeu de cette élection réside dans la confrontation entre les trois partis de ce l’on appelle traditionnellement l’« alliance présidentielle ».
En finir avec la malédiction
En Algérie, depuis la naissance du multipartisme en 1989, les élections ont toujours terni l’image démocratique que le pays souhaitait se donner. En 1991, les premières échéances parlementaires s’achèvent sur un coup d’état militaire alors que le Front islamiste du salut (FIS) – aujourd’hui interdit – était sur le point de les remporter. Le pays plonge alors dans dix années de guerre civile qui oppose le gouvernement et les militants du FIS. De 1992 à 2002, le conflit fait 150 000 victimes.
Les législatives suivantes, en 1997, sont marquées par des fraudes massives entachant le scrutin, constatées à la fois par les observateurs locaux et internationaux. En 2002, c’est l’abstention qui jette le doute sur la crédibilité des résultats. Les élections sont boycottées. Le taux de participation n’atteint ainsi pas les 50%. Dans certaines villes, comme Tizi Ouzou ou Bejaia, il ne dépasse même pas les 3%. Des facteurs historiques qui expliquent que beaucoup d’Algériens ne croient pas que leurs députés soient à même de changer les choses.
2007, un début de solution
Pour tenter d’inverser cette tendance, les 12 229 candidats aux 389 sièges parlementaires ont travaillé à clarifier leur programme. Le Parti travailliste a ainsi proposé de mettre un frein aux privatisations et aux investissements étrangers pour redonner du poids à la souveraineté nationale. De son côté, le Rassemblement national démocratique a axé ses 140 propositions sur l’interventionnisme social, la réduction de la pauvreté et la diversification économique du pays.
Dans le même temps, les Egyptiens ont démontré leur envie de changement avec des taux de participation permettant aux députés de bénéficier d’une véritable légitimité populaire. Enfin, le gouvernement a promis de veiller à la transparence des élections cette année.
L’Europe, une influence de poids ?
Côté européen, l’Allemagne, qui préside actuellement l’Union européenne a d’ores et déjà exprimé ses espoirs quant à la tenue d’élections « libres et justes » par la voix de son ministre des Affaires Etrangères, Frank-Walter Steinmeier.
Plusieurs raisons peuvent expliquer l’intérêt que les Vingt-Sept porte à la politique de cette république francophone. En premier lieu, la situation géographique a son importance. En effet, la proximité de la ville côtière d’Oran, située à moins de 200 kilomètres de la cité espagnole d’Alicante, soulève de nombreuses questions relatives à l’immigration et à la sécurité entre les deux continents.
L’Europe a également investi, pour la période 2007-2010, dans un programme de collaboration bilatérale avec l’Algérie, qui inclut une enveloppe de 220 millions d’euros. Il faut aussi tenir compte du fait que ce pays d’Afrique du Nord est un important producteur de gaz et de pétrole : environ 90% de ses exportations de pétrole brut sont destinées à l’Europe de l’Ouest. L’Italie en est le principal bénéficiaire, suivie de peu par l’Allemagne et la France.
En tout état de cause, malgré sa politique islamiste – certes modérée – et conservatrice, le gouvernement d’Alger a montré des signes d’ouverture et de tolérance. Des fatwas et des décrets ont ainsi été lancés pour lutter contre l’immigration illégale et les attentas-suicides. Néanmoins, les Européens continuent de craindre une arrivée massive de migrants et de potentiels terroristes fuyant l’Algérie.
Aucun candidat ne semble obtenir les faveurs de l’Europe. Pourtant, sur le long terme, l’objectif de l’Union européenne pourrait bien être – comme l’a d’ailleurs annoncé le nouveau Président français, Nicolas Sarkozy – d’inviter les douze pays du bassin méditerranéen, parmi lesquels l’Algérie, à un partenariat euro-méditerranéen qui fasse le « trait d’union entre l’Europe et l’Afrique ».
Translated from Abstaining Algerians