Le Trio Joubran : « Qu'il est difficile d’être musiciens et palestiniens dans le monde ! »
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GerrySamir, Wissam et Adnan Joubran sont des musiciens de renommée internationale. Néanmoins, leur musique et leurs idées sont enracinées en Palestine, leur patrie.
Deux semaines avant que la Palestine ne demande d'adhérer en tant qu'État à l'ONU (à ce jour, l'Autorité palestinienne a décidé de présenter une demande de statut membre aux Nations-Unies, le 23 septembre prochain), nous avons rencontré les trois frères à Paris, et évoqué comment leurs espoirs pour leur pays influencent leur musique.
L’éclairage est tamisé, et le théâtre silencieux. Assis en demi-cercle en face de Youssef Hbeisch, leur percussionniste âgé de 43 ans, trois frères jouent dans un décor tacheté d'orange et de rouge, évoquant une chaleur qui rappelle tant l'Orient. Leur musique commence, douce et profonde. Le regard de ces jeunes hommes, assis très droits, semble fixer une source de lumière. La musique s’accélère. Ils se détendent et se balancent. Ils ont l'air de danser avec leur « oud », un instrument traditionnel arabe, en suivant un enchaînement ludique mais très stylisé. Le 14 septembre, le spectacle acclamé du Trio Joubran au Théâtre d’Ivry, à Paris, est mélancolique et ouvertement exotique. Légèrement, mais avec persistance, il initie le public à l'Orient.
Contraints d'être « palestiniens avant d’être artistes »
En effet, le discours et la musique des trois frères reflètent leurs origines. Samir, l’aîné âgé de trente-sept ans, s'adresse en anglais au public, au sujet du printemps arabe, de ses espoirs et de sa fierté pour la Palestine. « Dans deux semaines, nous aurons besoin de votre soutien », dit-il en faisant allusion à la demande palestinienne d’adhésion à l'ONU. La plupart du public est venu assister à la présentation de la saison 2011/2012 de ce théâtre original. « Nous en avons assez de vivre dans un territoire occupé. Nous aspirons seulement à la paix et à la justice. J'ai espoir. » Après le spectacle, Wissam, âgé de 27 ans, est fermement optimiste : la Palestine « va recevoir son dû. » Si cela ne se produit pas dans deux semaines (je dois cependant le pousser à prendre cette possibilité en considération), alors cela arrivera la prochaine fois. « Tous les pays ont dû suivre cette voie pour se faire reconnaître en tant qu'États, ajoute-t-il. Même Israël. »
« La force de notre peuple »
C'est presque difficile de ramener la conversation sur la musique. Adel Hakim, le directeur du Théâtre d’Ivry, a mis en scène, en arabe, une autre pièce qui implique le Trio et des acteurs du Théâtre National palestinien. Elle tiendra l'affiche, ici, en mars 2012. Adel Hakim décrit les artistes palestiniens, avec lesquels il a collaboré, comme des personnes contraintes d’être « palestiniennes avant d’être artistes ». Ces paroles nous forcent à réfléchir. Selon Wissam, la musique des trois frères se caractérise par une provenance très consciente de leur patrie. « Même si nous jouons dans le monde entier, nous nous assurons de démarrer toute nouvelle production en Palestine, explique-t-il. Pour notre production, nous voulons puiser l’énergie et la force de notre peuple. Effectivement, l’énergie et l’appréciation de notre dernière création nous donnent le courage de réussir dans le monde entier. »
En outre, si les frères sont contraints d’être « palestiniens avant d’être artistes », ils sont aussi des ambassadeurs. En effet, ils utilisent leurs spectacles pour rappeler une culture si souvent perdue dans la politique transfrontalière de leur région. Par conséquent, on ne peut s’empêcher de se demander comment leur musique, si merveilleusement travaillée, serait transformée si la Palestine devenait un État reconnu par le monde entier, et si les frères n'avaient plus besoin de se battre pour préserver leur identité palestinienne. Qu'adviendrait-il alors de leur source d'inspiration ?
De septembre à décembre, le Trio Joubran sera en tournée en France, en Allemagne, en Suisse et en Autriche.
Photos : Une © Trio Joubran/ Myspace; Texte © Trio Joubran; video/ Youtube
Translated from Trio Joubran: ‘It’s hard to be Palestinian musicians in the world’