Le goulasch, hors-d’œuvre de la culture hongroise
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Delphine LeangEn plus de cette spécialité culinaire, la Hongrie recèle d’une grande richesse intellectuelle. Imre Kertész en est la plus spectaculaire vitrine, usant d’une des langues les plus complexes au monde.
De sa vie avant le prix Nobel de littérature en 2002, Kertész écrit : « En tant qu’artiste méconnu d’Europe de l’Est écrivant dans une langue non Indo-Européenne, je n’avais pas le moindre espoir ». Il est devenu une sorte de célébrité, pas seulement en Hongrie, mais aussi en Allemagne où il est particulièrement populaire, en France, et aux Etats-Unis. Kertész est né à Budapest en 1929. Sa première œuvre Sorstalanság (Etre sans destin) est l’histoire complètement immoraliste d’une victime d’un camp de concentration. Kertész a lui-même été prisonnier à Auschwitz durant la seconde guerre mondiale.
Hongrois et Européen à la fois
Dans son discours de réception du prix, le romancier a déclaré que son pays « a besoin de ce succès » pour toutes les souffrances endurées. Mais, son écriture s’adresse à tout le monde, et ce n’est pas cet écrivain très peu nationaliste qui dirait le contraire. Alors que dix nouveaux Etats intègrent l’UE, c’est une chance que la richesse littéraire qu’incarne Kertész appartienne aussi bien à l’Europe qu’à la Hongrie. Ilona Kocsi, rédacteur en chef d’un important journal hongrois Magyar Hirlap , le décrit comme « un vrai citoyen européen et hongrois. »
La Hongrie n’a jamais manqué de talents. Cependant, aussi triste que vrai, beaucoup de ses génies ont été obligés de fuir le pays à un moment ou à un autre de son passé mouvementé fait d’occupations successives : une fuite des cerveaux, si on peut dire. Ce temps-là est révolu et la Hongrie fait maintenant partie de la bande. Et, malgré son passé, le pays est un leader reconnu dans l’ingénierie, la médecine, et les sciences économiques. Et puis, il y a cette langue.
« Cette langue cauchemardesque »
La langue hongroise n’est pas facile. En fait, les experts disent qu’elle est la langue la plus difficile au monde après le mandarin. En Europe, elle est apparentée seulement au finnois et à l’estonien. Et encore, cette parenté est distante. Le Hongrois est maintenant une langue officielle de l’UE. Cette bonne nouvelle pose cependant quelques problèmes. Péter Fiedler, expert en communications, pense que la langue pourrait dresser une barrière importante entre son pays et le reste de l’UE. Des problèmes pourraient survenir dans le processus d’élaboration des lois, ajoute-t-il. « En raison des traductions-relais (du français vers l’anglais, puis vers le hongrois, par exemple), certains sens sont perdus ». Néanmoins, la traduction s’est déroulée sans accroc lors de l’expérience menée à Strasbourg l’an dernier avec les nouveaux candidats. Il semble donc que politiciens et auteurs hongrois peuvent être compris par tout le monde. Mais, si ceux qui prétendent que l’écriture nécessite plus ou moins un exil ont raison, espérons que l’entrée de la Hongrie dans l’UE ne tarira pas son imagination littéraire.
Translated from Hungary: More Than Just Goulash