La Tchéquie prend en main le dossier israélo-palestinien
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Christophe LuccheseInaugurée par la trêve fragile survenue au terme de trois semaines de combat, la Présidence tchèque de l’UE doit poursuivre les démarches entamées par Sarkozy pour une paix pérenne au Proche-Orient. Une tâche pour le moins difficile.
« Le Proche-Orient est au moins aussi vital pour l'Europe que l’est le Mexique pour les Etats-Unis. Alors qu'elle se définit elle-même pas à pas, l’Union européenne va progressivement essayer d’asseoir ses positions. » Zbigniew Brzezinski est un Américain né en Pologne et ancien conseiller de Jimmy Carter. Voilà ce qu’il écrit dans l’essai Hegemonic Quicksand, publié en 2003, dans lequel il définit parfaitement ce que l'issue du conflit israélo-palestinien signifie pour l’UE.
La campagne militaire israélienne dans le territoire occupé palestinien de la Bande de Gaza a commencé le 27 décembre, suite aux envois réguliers de roquettes du Hamas sur les villes israéliennes frontalières. Après trois semaines de guerre, un cessez-le-feu unilatéral a été déclaré le 18 janvier. Au final, 1 300 Palestiniens ont été tués, dont 700 civils parmi lesquels des enfants, contre 13 morts dont quatre soldats pour le camp israélien. Les combats ont peut-être cessé mais les problèmes demeurent : les écoles de l’ONU à Gaza ont été bombardées et les pertes civiles ont entrainé la condamnation de cette offensive israélienne dans le monde entier. La communauté internationale doit désormais jeter les bases d’une paix durable.
Le rôle de la présidence tchèque au Proche-Orient
« La présidence européenne doit s’efforcer de faire entendre une seule voix, une seule position et une seule politique au Proche-Orient », a déclaré l’eurodéputée Jana Hybášková, qui prend ses distances vis-à-vis de son gouvernement national tchèque et fait plutôt valoir son rôle au sein du Parlement européen. « L’Union européenne doit peser davantage en tant qu’investisseur le plus important de la zone », poursuit-elle.
En 2008, 73 millions d’euros ont été investis par l’UE dans cette région : « C’est un signe que l’Europe demande à être entendue et acceptée, lance Jana Hybášková. Le Hamas ne peut pas être considéré comme un interlocuteur légitime s’il reste une organisation terroriste (selon le classement fixé par les Etats-Unis et l’Union européenne, ndlr). La Bande de Gaza doit être démilitarisée. Sa population doit arrêter de supporter le Hamas, sans quoi elle ne pourra plus recevoir les centaines de millions d’euros que l’Europe lui donne. Le problème des camps de réfugiés qui existent depuis plus de 60 ans à Gaza doit être résolu. Les Etats arabes, dirigés par l’Egypte, devraient commencer à jouer un rôle plus actif dans le processus de paix. »
« Les Tchèques essayent d’assurer une continuité dans la politique de l’Union européenne envers Gaza »
Aux portes d’une Europe qui s’élargit, le Proche-Orient est une priorité pour l’Union Européenne. Le conflit a démarré à la toute fin de la présidence française. « Chaque présidence est légèrement différente de la précédente», confie Jana Hybášková. Toutefois, la plupart des initiatives prises par la République tchèque se basent sur l’action de la France. Selon le ministre des affaires étrangères tchèque Karel Schwarzenberg : « Les Tchèques essayent d’assurer une continuité dans la politique de l’Union européenne envers Gaza. »
Jusqu’à présent, les politiques étaient plutôt influencées par des facteurs économiques. L’Union européenne intervenait plus comme payeur que comme partenaire. Beaucoup d’experts estiment qu’il est temps de changer. « Il doit absolument y avoir une influence proportionnelle à l’argent que l’UE dépense à Gaza, lance l’eurodéputée tchèque. Les différentes positions devraient s’assembler dans une politique commune. Toutefois, la structure législative actuelle ne le permet pas. »
Elections opportunes ?
La situation au Proche-Orient devient, tous les jours, plus complexe, surtout si l’on envisage la crise humanitaire, la contrebande de nourriture et d’armes ainsi que les prochaines élections parlementaires israéliennes du 10 février prochain. Des commentateurs voient dans les actions militaires des manœuvres politiques. Les élections doivent avoir lieu après que la ministre israélienne des affaires étrangères Tzipi Livni (surnommée « Olmert en jupe » par la presse étrangère) a échoué à former un gouvernement en octobre 2008, pour remplacer le premier ministre sortant Ehud Olmert, démis pour affaires de corruption.
« Il doit absolument y avoir une influence proportionnelle à l’argent que l’UE dépense à Gaza»
Talal Nizameddin, analyste politique à l’université américaine de Beyrouth, estime que ce sont bien les affaires politiques internes à Israël qui ont poussé le pays à répondre soudainement aux jets de roquettes palestiniens ; ce que nient les leaders israéliens. D’autres étayent cette thèse : cette opération militaire aurait un objectif électoral. Livni argumente : pour elle, ce sont les militants du Hamas, qui en lançant un total de 800 roquettes en 2007, ont préparé le terrain à une telle réplique de la part des Israël.
Dans une telle situation, l’Union européenne ne peut ni ne souhaite rester à l’écart des négociations. Jana Hybášková propose une politique européenne plus efficace sous la forme d’un traité similaire à celui du traité de Lisbonne. « Cela devrait approfondir la dimension de l’intégration européenne, et tout spécialement dans le domaine des affaires étrangères, de la sécurité et de la défense. » Voilà ce que prescrit la République tchèque pour qu’Israël et la Palestine « barrent le t » et « mettent les points sur les i », comme dirait Zbigniew Brzezinski.
Translated from A Czech prescription for the Middle East, the EU’s ‘Mexico’