La masculinité de 2012 : 50 nuances de mâle
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sarra zarratiAu début il y eut David Beckham. Nous étions en 1994, dix-sept années sont déjà passées depuis que le journaliste anglais Mark Simpson a utilisé pour la première fois le terme « métrosexuel », faisant référence au joueur de football britannique. Depuis cet instant, ces néologismes ne se sont plus arrêtés. L’objectif ?
Chercher à étiqueter la masculinité contemporaine selon un exercice stylistique et sociologique - savamment orchestré par le marché - qui semble brouiller la réflexion sur la femme, et peut-être bien, sous-estimer la fulgurante course de l ‘ex-sexe faible vers la victoire sur le mâle. Récapitulatif.
C’est fini. Les hommes n’existent plus. Vous ne me croyez pas ? Bien, alors vous croirez Hanna Rosin et son dernier livre The end of men (and the Rise of women), dans lequel le concept de fond - comme l’écritStephanie Coontz dans le New-York Times - est que « nous vivons dans un monde nouveau dans lequel ce sont les femmes qui ramènent le pain à la maison, et dans lequel les épouses de la classe moyenne soumettent leurs propres maris, pendant que les célibataires, démoralisés, se réfugient dans une adolescence perpétuelle. »
À quel moment, cette lente agonie du mâle contemporain a-t-elle commencé ? Cela fait désormais vingt ans que l’on cherche à suivre les évolutions et pourtant personne ne les a jamais mises en relation avec sa croissance confuse face à un genre féminin, qui à l’inverse, continuait d’avancer vers son but, sans démontrer la moindre pitié pour un adversaire, peu habitué au combat et à présent destiné à la défaite.
Le « métrosexuel » : voici pour vous l’homme-miroir
La première réflexion révolutionnaire sur les changements du mâle contemporain, se trouve dans un article de Mark Simpson publié dans le quotidien The Independent, dans la lointaine année 1994. Le concept est très simple : même les hommes - pas nécessairement gays ou bisexuels -« désirent être désirés ». C’est le footballeur du moment du Manchester United, David Beckham qui incarne le parfait « métrosexuel ». Le premier à mettre en vente sur les terrains de jeu du monde entier un corps tellement soigné, qu’il en ferait passer au second plan ses mérites sportifs. À cet instant le monde sportif est devenu le lieu idéal pour le nouveau-né homme-miroir. Qui ne se souvient pas de la publicité Dolce&Gabbana dans laquelle les joueurs de l’équipe nationale italienne posaient en caleçons et avec les muscles bien huilés, ou encore le calendrier Dieux du stade ? Voilà deux exemples classiques de « spornography », « une esthétique post-métrosexuelle - écrit Mark Simpson -dans laquelle le sport et la publicité convergent pour nous convaincre de combien le corps de l’homme est irrésistible ». Mais quelle est la limite entre exhibitionnisme et « féminisation » ? « Si pour le métrosexuel - poursuit Simpson - il n’est pas important de sembler girly, mais juste canon », qu’est ce qu’en pense celui à l’inverse qui ne supporte pas que son hétérosexualité soit discutée ?
La « menaissance » et le retour du « rétrosexuel »
« Nous vivons dans un monde nouveau dans lequel ce sont les femmes qui ramènent le pain à la maison »
Le fait qu’Arnold Schwarzenegger au cours de la convention républicaine de 2004 ait appelé ses rivaux « girlie men », montre que la définition est liée à une certaine ambiguïté sexuelle. Si d’une part, en effet, les gays ne voulaient pas être comparés aux métrosexuels, de l’autre côté même les hétéro-traditionnalistes n’étaient pas heureux que l’on fasse la confusion. Le moment était en somme propice pour l’arrivée du « rétrosexuel », une nouvelle figure idiomatique, pensée pour sauver les hommes « normaux ». La série télévisée à succès Mad Men est un des premiers produits culturels à chevaucher l’onde de la « menaissance ». Le personnage principal de la série, Don Draper, représente en fait le « rétrosexuel » : un publicitaire à succès des années 50 marié et avec trois enfants, playboy cigarette à la bouche et le verre de scotch à la main.
Le modèle « fonctionne » et donc on recommence à faire des néologismes. Quelques uns - soit dit en passant inutiles - sont utilisés uniquement pour donner une nuance plus masculine au concept de métrosexuel : « « übersexual », « heteropolitan », « machosexual ». D’autres varient sur le thème vaguement pervers qui semble véhiculer des comportements sociaux à la limite du ridicule : tel est le cas du « hammersexual », ou plutôt du mâle qui « mange seulement de la nourriture d’homme , qui conduit de vieux véhicules militaires en ville et lit des livres d’homme sur comment être un homme » ; ou de la supposée « speedophonia », faisant référence à la discrimination à l’encontre des hommes portant des maillots de bain moulants.
Le « megasexual »
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Si l’homme, en fait, se perd et se retrouve dans des milliers de définitions de lui-même, les femmes - juges sadiques et implacables de ce cirque des horreurs- semblent avoir les idées claires sur l'homme idéal, l’unique - au moins on l’espère - capable de satisfaire leurs désirs. Il s’agit du dénommé « megasexual », celui même que l’écrivain féministe Gabriela Wiener définit comme « un mythe entre le méchant loup et une peluche d’ourson ». Le marché fabrique une nouvelle tendance et les succès tous au féminin de la saga vampirique de Twilight ou du récent ouvrage Cinquante nuances de Grey qui en sont le cheval de Troie. Ainsi, le « ténébreux vampire » Edward Cullen et le jeune, beau et riche - mais sans manières sadomasochistes - Christian Grey deviennent les objets de désir d’une femme désormais veuve de l’homme normal : doux, courtois, affectueux et éduqué, d’une part, monstrueux, diabolique, dangereusement corrompu et vicié d’autre part.
Mais ce modèle d’homme existe-t-il vraiment ? Autant qu’il est possible de jongler entre les bouquets de rose le jour et les menottes le soir, il est plus probable que non. Dans un tel cas, à ces super-femmes modernes, il ne leur reste qu’à se consoler avec des masturbations littéraires et cinématographiques à quatre sous. Ainsi, je me demande : ça ne leur conviendrait pas plus de se contenter de ce qu’il y a sur le marché ? C’est pour une bonne cause : sauver ce pauvre mâle avant qu’il ne soit trop tard !
Photos : Une (cc) hyperxp/flickr (site officiel); Texte : Hanna Rosin © courtoisie de son site officiel, Dieux du stade © courtoisie de la page Facebook officielle des Dieux du Stade
Translated from Cento modi per dire "maschio" prima che sia troppo tardi