La Dot des nouveaux Etats membres
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alexandra championLes nouveaux Etats membres ne devraient pas se demander « Que peut nous offrir l’Europe ? » mais plutôt « Que pouvons-nous offrir a l'Union? ».
Dans l'un de ses tout derniers romans, l'auteur Tchèque Milan Kundera dresse un portrait satirique d’un scientifique Tchèque qui , examinant sa vie ruinée par l’expérience communiste, ressent une « fierté mélancolique », et qui attend de ses collègues d'Europe occidentale une certaine reconnaissance pour ce qu'il a enduré.
Notre société semble aujourd’hui souffrir d’un mal analogue. Nous interprétons l'offre d'intégrer l'Union européenne comme une rectification des erreurs des autres, où on peut citer un grand nombre d'accusés : Hitler, Staline, Roosevelt, Chamberlain...Mais nous oublions de faire la liste de nos propres responsabilités.
Pour une société politiquement engagée
L'année dernière, on a pu observer un paradoxe intéressant alors que nous étions, nous Tchèques, pour la première fois à même de décider de notre futur européen immédiat : tandis que la demande d'un référendum était forte, la participation réelle ( 55%) lui était largement inférieures. L’apathie, l’indifférence, la résignation, qui caractérise nos relations aux affaires publiques - héritage de la période communiste – n’est qu’un moyen de faire porter le chapeau aux autres. Les gens demandent-ils à leurs dirigeants politiques « Qu’apportons nous à l'Europe ? » ou « Quelle route voulons-nous que l'histoire de l'Europe emprunte ? ». Non. La majeure partie des questions tourne autour de ce que l'Union va mettre dans notre porte monnaie ou combien les hommes politiques (élus précisément à cette fin aux cours des dernières élections) tireront-ils du veau d’or bruxellois.
Or, comme le soulignait l'ancien Premier ministre Tchèque, Miloš Zeman, si l'argent était le principal motif d’adhésion à l’UE, la République tchèque aurait mieux fait de rejoindre les Emirats Arabes Unis. Il est de notre intérêt national de ne pas seulement considérer l'Europe comme une sphère économique , mais aussi comme un espace politique, culturel et avant tout social. De plus, même si les avantages économiques constituent sans aucun doute une des raisons importantes pour laquelle nous intégrons l'UE, les hommes politiques ont oublié de rappeler aux électeurs que même à Bruxelles, on ne trouve pas de repas gratuits. Même si un certain nombre de fonds, structurels ou autres, sont attribués à la République Tchèque, ces sommes ne seront débloqués que pour des projets biens préparés et sécurisés par des co-financements. Ils ne constituent en aucun cas des chèques en blanc.
Renaissance de l'Europe Centrale
Etant donnée notre taille et nos capitaux financiers et humains, il est évident que l'on ne peut pas réaliser d'exploits pour nos premières années dans l'UE. Certes, grâce aux Tchèques, aux Slovaques, aux Polonais, aux Hongrois et aux Slovènes, l'Europe a retrouvé une dimension importante - celle de l'Europe Centrale. Avec la deuxième Guerre Mondiale, l’espace culturel unique qu’est l'Europe Centrale a disparu de l'histoire européenne. Le génocide nazi des Juifs (qui ont joué un rôle important dans la création culturelle en Europe Centrale), suivi de l'expulsion des Allemands et des Hongrois de Tchécoslovaquie, de Pologne et des Balkans, ont contribué à l'achèvement du processus de « nationalisation » et d’homogénéisation ethnique des états d'Europe centrale. Le rideau de fer a parachevé ce développement par la stricte séparation entre Europe de l'Ouest et Europe de l'Est.
L'entrée des pays d'Europe centrale dans l'Union a ouvert à nouveau une troisième option, centrale, longtemps opprimée. La République Tchèque, la Pologne, la Slovaquie, la Hongrie, et ces autres pays ne deviendront pas occidentaux du fait de leur entrée dans l'Union mais, en s’y joignant ils pourront saisir l'opportunité de faire revivre l'identité culturelle et politique des pays d'Europe Centrale. Quatre-vingt-dix ans après le début de la première Guerre Mondiale, ces pays vont à nouveau pouvoir partager un espace politique de valeurs partagées, bien plus démocratiques que celles qui dominaient ces régions auparavant.
Qu’offrir à l’Europe ?
Le personnage de Kundera déjà mentionné utilise son expérience communiste comme alibi pour justifier son impuissance. Une alternative à cette approche serait d'utiliser le passé comme point de référence négatif pour le présent. Après tout, ce sont les leçons tirées des guerres nationalistes des derniers siècles et qui ont culminé dans la seconde Guerre Mondiale qui ont donné naissance à l'intégration européenne. Notre passé devrait nous rendre nous et le reste de l'Europe plus sensibles à la façon de mener le système démocratique (pas seulement dans un pays mais à l’échelle européenne) afin de le valoriser, de le respecter et de bien le développer. Car nous savons, à la lumière des dernières décennies, que la démocratie peut nous échapper de façon rapide et inattendue.
Translated from What do the new member states have to offer?