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La crise économique expliquée aux nuls

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Default profile picture hélène Rivoal

Politique

L’Europe n’est en rien responsable des temps difficiles que connaît actuellement son économie. Notre continent ne peut pas faire grand chose d’autre qu’attendre et espérer un changement des facteurs extérieurs. Retour sur une crise mondiale, première étape : les Etats-Unis.

Lorsque les Etats-Unis s’enrhument, c’est le monde entier qui éternue. Cet adage du 20e siècle ne s’est jamais révélé aussi vrai qu’aujourd’hui alors que les économies européennes vacillent sous le choc d’une crise économique ayant lieu à des milliers de kilomètres. Dans le système financier actuel où tout est tellement interconnecté, ce qui a commencé par quelques décisions de prêt mal avisées aux Etats-Unis s’est répandu à travers le monde et menace d’engloutir ce dernier dans une autre grande dépression.

La crise a maintenant pris de dangereuses proportions. Elle a commencé, après une longue période d’augmentation constante des prix des logements, avec l’éclatement de la bulle immobilière aux Etats-Unis en 2004. De nombreuses familles ont été autorisées à contracter des emprunts pour acheter leur logement. Et les prêteurs avaient alors commencé à s’engager dans une pratique dite des « prêts hypothécaires à haut risque » (« les subprimes ») et donc à accorder des prêts à des emprunteurs « à risque » dont la solvabilité ne les qualifiait pas pour prendre des hypothèques pour l’achat de leur maison. Ces prêts à haut risque étaient généralement accordés à un taux d’intérêt faible pendant les quelques premières années mais révisé fortement à la hausse par la suite.

(monkeyc.net/flickr)

Les risques n’ont en général pas été bien expliqués aux emprunteurs dont beaucoup ont cru qu’ils pourraient aisément refinancer leurs créances en quelques années pour conserver leur bas taux d’intérêt. Les économistes ont averti des dangers mais, globalement, personne aux Etats-Unis ne voulait gâcher l’euphorie de la bulle immobilière. Chacun semblait y gagner de l’argent : les entreprises de construction, les courtiers immobiliers, les banques comme les fournisseurs de matériaux. Les heureux consommateurs pouvaient enfin, pour la première fois de leur vie, devenir propriétaires. Après des décennies de dérégulation constante sous l’égide du parti républicain, le gouvernement américain laissait les mains pratiquement libres à l’industrie.

Siffler la fin de la partie

Mais en 2005/2006, le temps est venu de payer le prix de ces erreurs. Les taux d’intérêt des prêts hypothécaires à haut risque sont montés en flèche. De nombreux nouveaux acquéreurs sont devenus incapables de rembourser ou de refinancer leurs emprunts. La crise aurait dû se limiter aux propriétaires américains. Malheureusement les banques et les prêteurs avaient revendu la dette à des investisseurs. Les créances ont ainsi été découpées (« titrisées ») et revendues à d’autres banques et investisseurs dans le monde entier, selon des montages financiers compliqués que peu de personnes semblaient comprendre correctement. Au cours de l’année 2007, près de 1,3 million d’habitations ont fait l’objet de saisies, chiffre en hausse de 79 % par rapport à 2006. Et ce fut la panique : personne ne semblait avoir aucune idée d’à qui appartenait ces dettes « sans valeur », éparpillées dans l’ensemble du système financier mondial. Soudainement, les banques ne voulaient plus se prêter mutuellement, d’où un resserrement, voire un étranglement du crédit, et une période où le système finit par manquer de liquidités (c’est à dire d’argent) car personne ne prêtait plus rien. Les pertes ont commencé à s’accumuler. Dès juillet 2008, de grandes banques et de grandes institutions financières de par le monde ont annoncé des pertes se montant à environ 435 milliards de dollars.

(Library of Congress/ pingnews.com/flickr)Aujourd’hui les banques et autres institutions financières ne peuvent plus obtenir de crédit et sont coincées avec des actifs « pourris » dans leurs livres de compte. Beaucoup ont dû se déclarer en faillite ou sont à la veille de le faire. Sous peine que leur effondrement porte un coup à l’économie au sens large, les gouvernements ont dû voler au secours de ces institutions et, parmi elles, Freddie Mac et Fanny Mae aux Etats-Unis, le géant de l’assurance AIG, Northern Rock au Royaume-Uni ou Fortis et Dexia en Belgique. L’anticipation de nouvelles faillites a conduit l’administration américaine à élaborer un plan de renflouement de 700 milliards de dollars pour prévenir ce risque de faillites. Le Royaume-Uni préparerait un plan similaire.

Le boom des matières premières s’effondre

La crise des prêts hypothécaires et le resserrement du crédit ne sont pas les deux seuls facteurs responsables de la crise économique de 2008. Les prix du pétrole sont au plus haut, tirés par la croissance des besoins d’énergie des économies émergentes telles la Chine et l’Inde. Cette situation affecte de façon spectaculaire les consommateurs en Amérique du Nord et en Europe, et ce, de manière double. L’envolée des prix que sont forcés de payer les consommateurs pour le carburant de leur voiture et le fioul de chauffage de leur logement a entraîné une augmentation dramatique du prix des denrées alimentaires dont les produits pétroliers permettent d’assurer la production et le transport. Les produits alimentaires sont devenus si chers dans les pays en développement qu’on a même assisté dans certains cas à des émeutes de la faim.

Après la dépression profonde qui avait frappé le prix des matières premières dans les années 80 et 90, les années 2000 ont vu en revanche ces prix exploser. En 2008, le prix du pétrole a atteint un niveau que les gens n’ont plus les moyens de payer, dépassant même 100 dollars le baril pour la première fois dans l’histoire en janvier 2008. Mais même cela ne semblait plus rien en juillet quand le pétrole a atteint le prix de 147 dollars le baril. Tout cela a entraîné un ralentissement rapide des économies nord-américaine et européenne. Le 30 septembre, le Royaume-Uni a révélé une croissance zéro pour le trimestre précédent. De même que l’Allemagne, il devrait entrer officiellement en récession à la fin de 2008. La zone euro dans son ensemble connaît maintenant des indicateurs économiques désastreux.

La crise économique est le résultat d’erreurs humaines aux Etats-Unis et du développement naturel des économies asiatiques. Les prix des produits pétroliers ne reviendront jamais au niveau qu’ils avaient dans le passé, et le monde doit apprendre à s’adapter à cette nouvelle réalité. Dans le même temps, la crise du crédit, qui est née aux Etats-Unis, ne pourra être résolue que par les Etats-Unis. L’Europe ne peut pas y faire grand chose sinon s’arque bouter contre la tempête et chercher à s’en sortir.

Translated from The 2008 economic crisis explained