La Chambre des Lords: Pourquoi s'intéresser à la deuxième Chambre du Royaume-Uni?
Published on
Translation by:
Sarah DaliLa deuxième Chambre du Royaume-Uni – la "Chambre des Lords" – fait de plus en plus souvent les gros titres. Comment et pourquoi s'intéresser à cette Chambre et à son avenir? Un changement radical est nécessaire pour regagner la confiance des politiques comme des électeurs. Voici une explication pour les lecteurs français.
La Chambre des Lords. Ça sonne bien, non? Avec un léger parfum de snobisme et les élégantes robes assorties. Pourquoi diable s'y intéresser, qu'on soit britannique ou non?
Ces derniers temps, cette question a pris beaucoup d'importance, du fait que la Chambre des Lords a embarrassé le gouvernement conservateur de David Cameron en rejetant un projet de loi sur la réduction des crédits d'impôts. Avant d'expliquer les raisons de cette controverse, nous devrions offrir un aperçu du système politique unique au Royaume-Uni.
Qu'est-ce que la Chambre des Lords?
La structure actuelle, qui date du 14e siècle, comprend deux ‘Chambres’ distinctes: la Chambre des Communes et la Chambre des Lords. Élue tous les cinq ans au suffrage universel, la Chambre des Communes est le principal centre législatif de gouvernement. Aujourd'hui, la Chambre des Lords constitue surtout un organisme consultatif, mais son degré de responsabilité et de pouvoir a évolué au fil des ans, et l'ambiguïté de sa portée législative est justement ce qui a soulevé la dernière polémique.
Actuellement composée de 760 membres, elle inclut un mélange éclectique d'anciens députés, évêques et représentants de différents domaines comme le sport, l'éducation et la santé, entre autres. La majorité sont des "pairs à vie", c'est-à-dire qu'ils sont nommés, non démocratiquement élus, et leur adhésion est garantie jusqu'à leur mort.
À ce moment-là, vous êtes peut-être en train de soupirer (ou de bâiller) en vous demandant une fois de plus pourquoi tout cela est important. Le fait est que cette Chambre est l'objet de controverses depuis des années et, pour beaucoup, une institution qui n'est plus pertinente dans le contexte politique actuel. Pas plus tard qu'en août dernier, un pair de la Chambre des Lords, Lord Sewell, a démissionné dans la honte après un incident impliquant la prise de drogues et des prostituées. Cruelle ironie, Lord Sewell faisait office de gardien de la morale.
La Chambre des Lords est criblée d'autres complexités quant à son rôle dans la prise de décisions politiques. C'est dans ce cadre que s'inscrit le récent vote contre le projet de loi du gouvernement sur la réduction des crédits d'impôts. C'est un sujet complexe, surtout du fait que ces baisses de prestations sociales étaient largement considérées avec suspicion, de crainte qu'elles ne touchent les plus démunis de la société.
Finalement, le Chancelier George Osborne est revenu sur ces propositions, mais avec David Cameron, ils sont toujours furieux de l'ingérence de la Chambre des Lords, qu'ils considèrent comme anticonstitutionnelle. Pour le maire conservateur de Londres, Boris Johnson, les Lords “y sont allés un peu fort”. Cependant, le président de la Chambre des Communes a souligné qu'il n'y avait eu ‘aucun vice de procédure’.
Que faire?
Ce n'est pas facile de démêler toute cette complexité. Ce serait naïf de congédier une institution aussi historique du simple fait qu'elle est difficile à comprendre. Toutefois, il semble évident qu'une importante réforme est nécessaire si la Chambre des Lords veut obtenir le respect du gouvernement en place ou du grand public, mal informé et le plus souvent indifférent à ce qui s'y passe.
Les organes consultatifs devraient toujours être libres de défier la norme politique. Mais la Chambre des Lords est-elle l'outil approprié? La réforme est une option possible: tout d'abord, en remplaçant les pairies héréditaires et à vie par des mandats d'une certaine durée, pour tenter d'avoir un impact sur la politique et les affaires publiques. Ensuite, la réduction du nombre de pairies pourrait constituer un pas de plus. Mais la réforme d'une tradition aussi ancienne sera toujours semée d'embûches.
Un coup d'oeil aux autres systèmes parlementaires en Europe nous donne un aperçu supplémentaire. En France par exemple, le Sénat (ou "chambre haute") est élu par des fonctionnaires appelés "grands électeurs", dont des membres de l'Assemblée nationale démocratiquement élue ainsi que des conseillers régionaux et départementaux.
Beaucoup plus petite que la Chambre des Lords, avec seulement 69 membres, la Chambre haute d'Allemagne, le Bundesrat, joue pourtant un rôle très important dans l'adoption des projets de lois du Bundestag. Ses membres sont nommés par les gouvernements régionaux.
Ces deux Chambres contrastent avec le système britannique, où une assemblée indépendante non élue intervient dans la nomination des pairs. Y aurait-il une place au Royaume-Uni pour une deuxième Chambre directement ou indirectement élue?
Peut-être. Mais de toute évidence, les systèmes électoraux en France et en Allemagne sont nés de différents troubles politiques dans des contextes historiques particuliers. Le transfert global d'un système parlementaire étranger ne conviendrait pas. En revanche, une chose est sûre, c'est que la Chambre des Lords doit subir une profonde transformation pour espérer gagner une crédibilité publique et politique dans les années à venir.
---
Cet article a été publié par notre équipe locale à cafébabel London.
Translated from The House of Lords: Should you care about the UK's second house?