Fusillade à Orlando : on assassine ceux qui s'aiment
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Alexia Bartolini[OPINION] Dans la soirée du 11 juin, Omar Mateen a ouvert le feu au Pulse, boîte de nuit LGBT à Orlando, en Floride, faisant 50 morts et 53 blessés. Mais en se concentrant sur la plus importante fusillade de l’histoire des États-Unis, les médias négligent une autre statistique : c’est également la plus grande attaque à l’encontre des LGBT que le monde occidental ait connu depuis l’Holocauste.
Lors d’une émission de Sky News dédiée à la fusillade d’hier soir, Owen Jones, journaliste pour The Guardian, a quitté le studio après que d’autres intervenants ont refusé d’admettre que les évènements d’Orlando constituaient avant tout une attaque spécifique envers la communauté LGBT.
À travers tout l’échiquier politique, les politiciens se sont empressés d’affirmer que cette attaque soutenait la politique adoptée dans leur programme électoral. Après s’être auto-congratulé dans un tweet affreusement insensible, Donald Trump tient l’Islam pour responsable. La gauche américaine soutient que cette attaque est la preuve que le contrôle des armes à feu devient de plus en plus nécessaire.
En Europe, les réactions fusent. Suite à la revendication de la fusillade par Daech, cette tragédie s’inscrit dans un récit plus large de terreur islamiste mondiale où l’organisation cible les jeunes qui aiment danser. Le journal The Sun titre « Le Bataclan de l’Amérique ». Le Telegraph, quant à lui, proclame que « L'EI poursuit sa guerre contre les gays en Occident ». Le fait que le Pulse soit une boîte de nuit LGBT semble n'être qu'une anecdote face à la menace de cette terreur islamiste.
C’est là une seconde tragédie qui se révèle être la pire fusillade de l’histoire américaine, où 133 fusillades de ce genre ont déjà eu lieu, rien que cette année. Pour couronner le tout, et comme Owen Jones l’a lui-même souligné sur Sky News, l’attaque du Pulse est également le plus grand massacre visant la communauté LGBT que le monde occidental ait connu depuis l’Holocauste. Le même jour, un homme lourdement armé a été arrêté à Los Angeles alors qu’il se rendait à une Gay Pride. L’écœurante nature homophobe des événements d’Orlando saute aux yeux, et crée un précédent si peu de temps après que la communauté LGBT n’ait été privée de son chagrin.
Il peut s’avérer qu’Omar Mateen agissait bien au nom de Daech, mais en attendant que nous en sachions davantage, permettre à l’organisation terroriste de revendiquer si facilement la responsabilité de ces attaques ne fait que favoriser un climat de peur, justifiant une hausse de la violence. Qu’elle soit perpétrée par ceux qui peuvent encore se radicaliser par ce qu’ils voient comme une scission croissante entre Islam et Occident, ou par ceux qui rejettent la faute sur l’homophobie tout en ignorant leur propre culpabilité culturelle, qui nourrit les crimes de haine au sein même de leurs frontières.
En 2016, nous avons un candidat à la présidence américaine qui, en réponse au plus grand crime de haine envers les LGBT que son pays ait connu, a publié une déclaration qui ne mentionne même pas la communauté visée. À l’inverse, le premier maire musulman de Londres a expressément réagi avec un hashtag sur les droits pro-LGBT. En Caroline du Nord, les personnes trans ne peuvent même pas utiliser les toilettes correspondant à leur identité de genre si elles ne sont pas en possession de papiers conformes. Et sur Sky News, la seule voix LGBT invitée au débat s’est vu dénigrer et rabattre son caquet pour avoir osé revendiquer la « propriété » d’une tragédie touchant précisément une communauté dont il fait partie.
D’importants débats doivent être lancés sur le terrorisme mondial, et des mesures urgentes sont nécessaires pour réformer la législation sur le contrôle des armes à feu aux États-Unis. Mais au moins pour les prochains jours, cela ne concerne pas l’Islam. Ni les armes. Le fait est que, en 2016, on continue de tuer ceux qui s’aiment.
Translated from Pulse, Orlando: Terrorism, yes, but undoubtedly an LGBT hate crime