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Chômage des jeunes en Europe : arrêtons l'hypocrysie 

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H. Viseur

L’Union européenne compte 5,5 millions de jeunes sans emploi âgés de moins de 25 ans ce qui ne fait que nourrir l’inquiétude face à la crise du chômage chez les jeunes. L’augmentation du chômage chez la jeune génération ces cinq dernières années et les conséquences sociales et politiques qui en découlent ont déjà eu une fâcheuse influence sur le futur économique, social et politique de l’Europe. 

Il semble que presque tous les décideurs toutes formations politiques confondues sont d’accord sur une chose : le chômage chez les jeunes est un problème à prendre très au sérieux. On prononce des discours pleins de verve, on donne des statistiques, mais les actions restent, quant à elles, extrêmement rares.

De bien des façons, l’UE est la plus critique envers l’inaction quant au chômage des jeunes en Europe. En janvier, lors d’un discours au Parlement européen, László Andor, commissaire pour l’emploi, les affaires sociales et l’inclusion, a demandé que l’on arrête de verser des larmes de crocodile sur l’emploi des jeunes. En mai, Martin Schulz, président du Parlement, a, quant à lui, indiqué lors d’une intervention devant le Conseil européen que « nous devons enfin reconnaître que les jeunes ont autant d’importance que les banques ».

Pétard mouillé

Les appels à répétition pour une action radicale et concertée afin de lutter contre le chômage chez les jeunes ont eu l’effet d’un pétard mouillé. Beaucoup de partenaires sociaux de l’UE ainsi que de jeunes Européens ont été déçus de l’investissement de six milliards d’euros pour l’initiative « Emploi des Jeunes » en février. Le très attendu Conseil européen du 27 et 28 juin qui promettait de faire de l’emploi des jeunes une priorité a seulement réussi à pré-approvisionner l’investissement existant pour la période allant de 2014 à 2016. Une fois que cette somme aura été totalement épuisée, les états membres ont annoncé qu’ils travailleraient pour déterminer s’ils pouvaient débloquer des fonds non dépensés pour lutter contre le chômage chez les jeunes. Ce sont de petits pas en avant, mais qui semblent plus dérisoires que révolutionnaires.

Début juillet, le sommet pour le chômage chez les jeunes organisé par Angela Merkel n’a servi qu’à aggraver la situation. La chancelière allemande a déclaré qu’il était du devoir de tous de réduire les contraintes liées au chômage des jeunes et, en ce sens, elle a proposé d’investir huit milliards d’euros en 2014. « À notre prochaine rencontre, il devra y avoir eu des progrès », a-t-elle dit. En d’autres termes, c’était une réunion pour mettre en place des actions pour une autre réunion. Les seuls jeunes qui ont réellement tiré profit de ce sommet de juillet sont ceux qui travaillent dans les hôtels cinq étoiles de Berlin que fréquentaient les dirigeants européens.

Cela fait maintenant plus d’un an que l’Organisation internationale du travail (OIT) a demandé un investissement de 21 milliards d’euros pour l’emploi des jeunes. Nombre de sociétés civiles ont directement soutenu cette démarche, mais trouver de l’argent pour l’emploi des jeunes s’avère bien plus complexe que pour le renflouement des banques. 

Compter sa monnaie 

Alors que tous les ministères des Finances de l’Europe raclent les fonds de tiroir, des études ont déjà été lancées afin de déterminer les conséquences qu’aura l’augmentation du chômage chez les jeunes ces cinq dernières années sur le futur de l’Europe. Les effets du chômage chez les jeunes sont aussi multiples que ses causes, mais certaines tendances générales se profilent déjà.

En 2011, près de 30 % des jeunes Européens risquaient de tomber dans la pauvreté ou d’être exclus socialement contre 24,2 % de toute la population. Le taux de pauvreté a augmenté de façon constante en Europe depuis 2010 et malgré une perception faussée de la pauvreté et  de la discrimination qui touche les jeunes dans certains pays, il est un fait que la crise économique pousse de plus en plus cette tranche de la population vers la pauvreté, la perte de domicile et l’exclusion sociale. 

Il y a aussi le problème de la cohésion sociale. En juin, l’OIT a publié son Rapport sur le travail dans le monde et a souligné une augmentation du risque de malaise social en Europe qui est passé de 34 % en 2006 à 46 % en 2012. Ce malaise social peut se manifester sous différentes formes et même si les grèves et les manifestations ne sont pas des phénomènes forcément négatifs, la réémergence et la montée de mouvements d’extrême droite dans un grand nombre de pays européens ont de quoi inquiéter.

Alors qu’une petite minorité de jeunes tombe dans les filets de ces mouvements extrémistes, beaucoup préfèrent l’apathie et le désengagement. L’année dernière, la Fondation européenne pour l'amélioration des conditions de vie et de travail (EUROFOUND) a publié des statistiques qui montrent que les jeunes qui ne travaillent pas, ne suivent pas d’étude ou ne sont pas en stage (les NEET) sont moins enclins à s’impliquer dans des partis politiques ou des organismes bénévoles et font moins confiance aux institutions. 

Histoires d’argent

Ce sont cependant les problèmes économiques qui vont probablement encourager les décideurs de l’UE à prendre des actions. En 2012, EUROFOUND a calculé que les 14 milliards de NEET de l’UE ont coûté 153 milliards d’euros en 2011. Selon les auteurs de ce rapport, c’est une estimation assez prudente. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) a aussi affirmé que la crise de l’emploi chez les jeunes pourrait avoir des effets désastreux à long terme sur les jeunes ce qui aura aussi des répercussions sur l’économie européenne comme sur la société en général.

Peu importe quelles décisions seront prises les prochains mois, la crise de l’emploi qui dure depuis 2008 a déjà eu de graves conséquences sur le développement de l’Europe et ce sera encore le cas pour les années à venir.

« L’avenir », voilà comment est appelée, parfois avec condescendance, la jeune génération porteuse de tous les espoirs. Malheureusement, on oublie souvent que les jeunes sont aussi le présent et que les décisions qui sont prises maintenant ont une influence directe sur l’Europe. Il est encore temps d’empêcher que la crise ne vire à la catastrophe, cependant les occasions se font de plus en plus rares. 

Translated from Youth unemployment in Europe: an end to crocodile tears?