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Berlusconi reste : la mécanique d'un miracle

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Lucile Dumont

Politique

« Le moindre geste violent a constitué un vote de confiance de plus accordé au gouvernement Berlusconi ». Les mots sont de Roberto Saviano. Une mise en garde compréhensible contre les casseurs, que tous ne comprendront peut-être pas à sa juste valeur. Car mardi 14 décembre, Silvio Berlusconi aurait dû se faire éjecter selon tous les jeunes qui étaient dans la rue. Pourquoi a-t-il été confirmé ?

Retour sur un vote historique. 

314 non et 311 oui. Deux abstentions. C’est ainsi que la Chambre des députés italienne a rejeté les deux motions de censure présentées par l’opposition : Berlusconi reste donc en selle.

Cela ne fait aucun doute : le 14 décembre 2010 a été le jour le plus long pour l’actuel gouvernement de centre droite, qui était aux prises avec deux importantes motions de censure. Si le résultat du vote au Sénat était plus attendu, les partisans de la majorité y étant plus nombreux (162 votes en faveur de l’exécutif,135 contre et 11 abstentions), c’est à la Chambre des députés que se jouait le match le plus important. Les peaux de bananes et le risque d’une chute définitive n’étaient pas loin, mais Silvio s’en est de nouveau tiré, aux dépens de son ex-allié et actuel Président de l’Assemblée Gianfranco Fini.

Malgré le happy end pour ceux que les journalistes surnomment désormais les « berluscones », les suiveurs du Cavaliere, des ombres planent sur la façade de Montecitorio. En effet, beaucoup suspectent que de nombreux députés aient étés achetés par le parti de Berlusconi, Peuple de la Liberté, afin que celui-ci puisse obtenir la confiance : on raconte donc que des ministères ou des postes de sous-secrétariats seraient promis, que des emprunts personnels seraient remboursés... y tutti quanti.

Tant et si bien que le parquet de Rome a ouvert, le 10 décembre, deux procédures d’enquête pour « achat de voix » présumé. Les intéressés, quant à eux, nient.

Qui a voté contre ?

Mais qui a voté contre la motion de censure ? De toute évidence, le Peuple de la Liberté (Pdl) et la Ligue du Nord s’y sont massivement opposés. S’ajoutent à ces deux partis les votes décisifs de trois députés du parti de Gianfranco FiniFutur et Liberté (Fli), d’un député du Libdem, ceux de Nous Sud et enfin ceux du Mouvement de responsabilité nationale (sic!), soit Massimo Calearo, Bruno Cesario et Domenico Scilipoti, tous élus avec le centre-gauche. Pendant le vote, la Chambre des députés a frôlé la bagarre à plusieurs reprises, entre les partisans de Futur et Liberté et ceux de la Ligue du Nord et du Pdl. Toutefois, la tension maximale a été atteinte lorsque le tour est venu à Catia Polidori (Fli), restée indécise jusqu’au dernier moment, d’aller voter. Elle a finalement décidé d’accorder la confiance à l’exécutif, récoltant par là des torrents d’insultes de la part de ses collègues du Fli. Mais pas seulement : en quelques heures, la page Facebook qui lui est consacrée a enregistré des milliers d’inscriptions, et les insultes y pleuvent sans discontinuer.

Une « victoire à la Pyrrhus » ?

On ne saura que dans les prochains mois s’il s’agit d’une « victoire à la Pyrrhus » pour Berlusconi and co. En y regardant de plus près, aujourd’hui c’est bien la défaite politique de Gianfranco Fini et le démembrement de son groupe parlementaire, Futur et Liberté, qui constituent l’unique certitude. Il a cependant déclaré à la presse qu’il ne quitterait pas la Présidence de la Chambre des députés.

Quoi qu’il en soit, il semble qu’Umberto « Nostradamus » Bossi et les siens avaient vu juste : depuis des mois, la Ligue du Nord répète en effet que des élections anticipées auront lieu au printemps, avec la pensée tournée vers la retraite à vie touchée par les députés après deux ans, six mois et un jour de législature. Mauvaise surprise pour les nombreux parlementaires qui n’en sont qu’à leur premier mandat : à compter de la législature actuelle, cinq ans de législature sont nécessaires afin de pouvoir prétendre à la fameuse rente à vie.

Laissons un regard extérieur conclure cette affaire. Dans un article du quotidien britannique The Guardian le 14 décembre, on se demandait « dans quel pays un leader politique pourrait-il survivre à une motion de censure après avoir été accusé d’avoir passé des accords énergétiques avec la Russie, d’avoir été lié à Cosa Nostra, d’avoir acheté des voix au parlement, et d’avoir abusé de son pouvoir afin de faire libérer une jeune femme impliquée dans des jeux érotiques appelés "bunga bunga" ? Et le tout en seulement deux petits mois ? »

En Italie. Évidemment.

Photo: (cc)Roberto Rizzato/flickr

Translated from E Silvio sotto l'albero trovò la fiducia...