Voir Naples...
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philippe-alexandre saulnierRome, Cracovie ou Madrid, les Européens ne manquent pas d’expressions pour parler de leur ville favorite. Tour d’Europe.
Au Moyen-âge, le droit de Cité s’auréoléait d’un tel prestige que tout homme jouissant du privilège de bourgeoisie pendant au moins un an et un jour se voyait ainsi échapper aux rudes contraintes de la corvée et du servage. Ne prétendait-on pas alors que « l’air de la ville rend libre » ? (en allemand « Stadtluft macht frei ! ») Si l’on en croit ce vieil adage germanique, l’ ardente aspiration à séjourner entre ses murs n’avait d’égal que la nostalgie dont se languissaient ceux qui s’en trouvaient bannis.
Tout citoyen zélé s’empressait donc de célébrer avec ferveur le génie tutélaire du lieu de son affranchissement (« genius loci ») et de vanter sa gloire et ses attraits aux quatre coins du monde. D’après les Italiens, pour que la vie vaille la peine d’être vécue, il faudrait « voir Naples et puis… mourir » (« Napoli e poi muori »). Cette expression résulterait d’un jeu de mot associant le nom de Naples à celui d’un petit bourg attenant sur les pentes du Vésuve appelé Muori. Or, le hasard a voulu que ce patronyme corresponde de manière fortuite à l’une des formes du verbe « morire » conjugué à la deuxième personne du singulier de l’impératif présent.
A tout seigneur tout honneur, la capitale de la Castille qui fut aussi celle d’un empire sur lequel le soleil ne se couche jamais, s’ouvre pour les Espagnols comme la dernière porte vers le paradis (« Desde Madrid al cielo »). Est-ce la raison pour laquelle les Polonais, eux-mêmes brûlent de « vivre comme à Madrid » (« Życie jak w Madrycie ») ? En politicien avisé, cédant à la nécessité d’une ultime conversion au catholicisme, le futur Henri IV, impatient de poser son royal séant sur le trône de France, jugea bon de reconnaître que « Paris vaut bien une messe ».
Ce rayonnement multiséculaire du Saint-Siège permet sûrement aux Italiens d’affirmer que « tous les chemins mènent à Rome » (« Tutte le strade portano a Roma ») où, à en croire les Anglais, il est recommandé de se comporter comme un natif pur jus (« When in Rome do as the Romans do »). Ce qui demande parfois du temps. Comme le laissent entendre les Polonais en précisant qu’à l’instar de la Ville éternelle, Cracovie n’a pas été construite en un jour (« Nie od razu Kraków zbudowano »).
Translated from Stadtgespräch