Vesela Kazakova, drôle de dame
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anne laigrozLa comédienne bulgare Vesela Kazakova est en pleine ascension. C’est au théâtre qu'elle a fait ses premiers pas à l’âge de quatre ans. Elle en a désormais 28 et a participé à plusieurs productions cinématographiques européennes.
Festival international du film de Moscou 2005. Vesela Kazakova obtient le prix du meilleur rôle féminin, un Georges d’argent, pour le film « Otkradnati Otschi » (Stolen Eyes). Dans son discours de présentation, l’actrice américaine Daryl Hannah, qui a joué notamment récemment dans le Kill Bill de Quentin Tarantino lance : «Cette fille m’a émue aux larmes. Elle est superbe et fascinante. »
Autant de raisons de se réjouir de rencontrer la comédienne bulgare. Le festival de la Berlinale 2006 bat son plein dans le froid pinçant de la capitale allemande lorsque l’étoile montante de l’Est arrive très ponctuelle à notre rendez-vous. Un mètre soixante-dix de finesse, une taille de guêpe, mon invitée est vêtue très simplement : tee-shirt moulant de couleur claire porté sur un jean. Mon regard reste involontairement captivé par ses yeux sombres et étincelants. Dès qu’elle sourit, ceux-ci s’illuminent chaleureusement. Pas d’allures de star, pas de manières : Kazakova parle franchement. D’ailleurs son prénom lui va à ravir : Vesela signifie « drôle » en bulgare.
Héritage maternel
Hier, mon interlocutrice a acheté à la dernière minute une nouvelle tenue pour son entrée en scène à Berlin et la veille au soir, elle a joué au théâtre Hambara à Sofia. « Je ne sais pas à quand remonte ma dernière véritable nuit de sommeil », raconte t-elle en soupirant. En Bulgarie, elle est très active dans le domaine du théâtre alternatif, écrit des scénarios et compose la musique de pièces. Véritable enfant de la balle, Kazakova est sur scène depuis ses 4 ans : elle faisait alors partie d’une troupe théâtrale nommée ‘Clochette’ avec sa sœur jumelle, Bilyana. L’amour pour le métier d’acteur, elle en a hérité de sa mère, Snezhina, grande comédienne. Kazakova a ensuite étudié à l’Académie nationale du théâtre et du cinéma à Sofia, dans la classe de Stefan Danailov, l’actuel ministre de la Culture bulgare.
Elle boit du thé et a arrêté de fumer depuis quelques mois car elle doit suivre à la lettre un régime alimentaire spécial. Pour le rôle d’une call-girl de luxe hongroise dans le film Prima Primavera, Kazakova doit prendre dix kilos. Pour l’instant, elle en a seulement gagné deux. « Pour chaque rôle, je me donne à 100%. Là, je dois être plus pulpeuse», m’explique cette adepte de la méthode Actors’ Studio.
Carrière par petites annonces
Après la Berlinale, Kazakova doit en outre apprendre son rôle pour le film… en hongrois. Un grand défi car elle ne maîtrise pas les subtilités de cette langue ouralo-altaïque qui n’a rien à voir avec sa propre langue. Cet été, le tournage doit commencer en Hongrie, à Budapest. Elle s’en réjouit d’avance car elle aime tous les pays européens même si elle avoue un faible pour l’Italie « et l’art de vivre de la péninsule si ‘dolce vita’. » « Je trouve aussi ça génial que la Bulgarie entre dans l’UE », raconte-t-elle.
C’est seule que Kazakova est venue à Berlin. Comme la plupart de ses compatriotes comédiens, elle n’a pas d’agent en Bulgarie en raison du manque de moyens. Résultat : c’est généralement par hasard que les acteurs bulgares apprennent les nouveaux castings, « par le biais d’annonces affichées à l’entrée de l’Académie de Théâtre de Sofia, » précise-t-elle. « Cette méthode freine la libre concurrence, » reprend t-elle excédée « car l’absence d’une plate-forme d’échange d’informations dans la branche augmente les chances des postulants qui ont des relations grâce auxquelles ils entendent parler des castings à temps. »
C’est après l’un de ces castings à Sofia qu’elle a obtenu son rôle dans le film du réalisateur Radoslav Spassov « Otkradnati Otschi » (Stolen Eyes) pour lequel un Georges d’argent lui a été décerné. C’est face à plus de 300 candidates qu’elle avait dû s’imposer pour décrocher le rôle. Le scénario de 'Stolen Eyes' évoque une page sombre de l’histoire bulgare. En 1986, le gouvernement a imposé à la minorité turque de Bulgarie de prendre un nom bulgare sous peine de sanctions. Ayten, jouée par Vesela Kazakova, perd ainsi son fils puis tombe amoureuse du soldat responsable de son exécution. Cette coproduction turco-bulgare est une histoire d’amour peu ordinaire, empreinte de nostalgie, qui tente de panser les plaies de l’histoire par un happy end. Il suffit d’ailleurs de voir le film pour comprendre Darryl Hannah.
Translated from Vesela Kazakova, fröhlich und talentiert