Velofabrik : le vélo Made in Bruxelles
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Cette société coopérative, qui a vu le jour à Bruxelles à l’été 2014, est en pleine expansion et prévoit de fabriquer 200 vélos cette année. Nous avons rencontré Jean-Philippe Gerkens, son administrateur délégué, dans ses ateliers.
L’état d’esprit de Velofabrik se devine dès l’entrée dans les locaux. C’est dans un grand hangar situé à quelques mètres de la station de métro Annensens, que se situe l’atelier de cette société coopérative à responsabilité limitée à finalité sociale (SCRLFS). Celui-ci est lumineux, calme et au vu du petit nombre de vélos, on comprend rapidement qu’il ne s’agit pas d’un lieu de production industrielle.
À notre arrivée, nous rencontrons Kim, qui est le mécanicien de Velofabrik depuis octobre dernier et qui nous présente son travail. Il assemble les pièces d’un vélo entièrement monté ici, dans le cœur de la capitale belge, suivant un strict cahier des charges. Ce dernier tient effectivement compte des caractéristiques physiques du client (notamment la taille et le poids), mais aussi de détails techniques demandés au moment de la commande (nombre de vitesses, couleur, type de roues etc.), la majorité des composants venant d’Europe.
De 60 à 80% des pièces venant d’Europe
C’est ce qui fait l’originalité de Velofabrik, qui va bientôt fêter ses deux ans d’existence. Cette entreprise sociale coopérative a décidé de baser sa production sur des pièces essentiellement européennes. C’est ce que nous affirme Jean-Philippe Gerkens, un des fondateurs de la société. « En fonction des vélos, 60 à 80% des pièces sont achetées à des entreprises européennes ». Ainsi, les cadres viennent de République tchèque, les pédaliers du Portugal et les selles d’Angleterre ou d'Italie. Cela présente le double avantage de soutenir l’emploi en Europe et de garantir au cycliste un vélo de qualité.
Cependant, Jean-Philippe nous explique que certaines pièces viennent d’Asie « en raison du prix ou de la qualité ». Il s’agit notamment des pneus, venant d’Indonésie. Et certains composants ne se trouvent quasiment qu’en Asie, en Chine, à Taïwan ou au Japon.
L'assemblage est en tout cas réalisé entièrement à Bruxelles, dans l’atelier de Velofabrik. Il s’agit d’une commande vraiment individualisée, qui répond précisément aux attentes et aux besoins du client. La commande est donc précédée d’une rencontre avec le cycliste et de questions sur l’utilisation du futur vélo. Comme nous le confie Jean-Philippe, ici on conçoit vraiment un « vélo à la carte ».
Si le prix de vente, de 650 à 800€, peut paraître élevé, le fondateur considère que le cycle sera « aussi bon marché qu’un vélo acheté dans un magasin de sport au bout de quelques années. Peut-être que les dépenses sont un peu plus élevées au départ, mais le vélo est solide et rentable. C’est un vélo pour la vie ».
Des coopérateurs passionnés de vélo
Une autre originalité de Velofabrik se situe dans son statut juridique. Étant une société coopérative à finalité sociale, son objet n’est pas uniquement commercial ou lucratif et elle doit répondre à certains critères. Environ 170 coopérateurs contribuent au développement de l’entreprise, et parmi eux « seulement 5% de nos actionnaires sont intéressés par le dividende qu’ils pourraient récupérer de leur investissement. Les autres sont des passionnés de vélo, qui ont une certaine vision pour l’avenir du vélo à Bruxelles. », nous affirme Jean-Philippe.
Mais cette particularité est également due au statut juridique de l’entreprise. Étant sociale, les investisseurs ne peuvent être rémunérés à plus de 6%, ce qui exclut a priori ceux uniquement intéressés par les profits.
Ceci permet ainsi de penser un développement sain de la société, qui s’est peu à peu fait remarquer à Bruxelles. Lancée en 2014, Velofabrik a produit 70 vélos en 2015 et compte en produire près de 200 cette année, même 400 en 2017. Ainsi, si un seul mécanicien est employé en ¾ temps actuellement, Jean-Philippe aimerait pouvoir embaucher d’autres personnes dans les années à venir, que ce soit pour la mécanique, mais également pour la logistique ou la gestion administrative et commerciale.
Cependant, malgré son expansion, la société ne fait pas encore de profit et dispose d’un modeste capital de 120 000 euros. « Pour le lancement, nous avons bénéficié de l'aide de beaucoup de bénévoles. Ma compagne s’investit à hauteur de 20 heures par semaine, totalement gratuitement », nous confie le fondateur.
Financer des bourses de master ou de doctorat
Mais au-delà de la fabrication de vélos, c’est avant tout une certaine vision de la politique des transports qui est défendue ici. « Nous souhaitons développer la mobilité bruxelloise et participer à l’élaboration d’une politique sur le déplacement à vélo. À l’avenir, nous aimerions soutenir le développement du réseau des ateliers de quartier », affirme Jean-Philippe.
Il déclare également que l’administration a besoin d’experts spécifiquement dédiés à la question du vélo, et Velofabrik aimerait pouvoir être impliquée dans des projets concrets.
Jean-Philippe a cependant une idée plus précise quant à une possible réflexion sur les cycles à Bruxelles. « Nous aimerions investir dans un fonds de recherche universitaire sur le vélo, que ce soit sur l’ingénierie, l'urbanisme, le marketing ou les biosciences », nous dit-il. Il s’agirait d’encourager des étudiants de master ou de doctorat à faire des recherches sur la question, au moyen de « bourses que nous financerions, en coopération avec des fondations universitaires et des partenaires privés ».
Il faudra donc sans doute compter avec cette société coopérative pour développer une mobilité alternative à l’avenir, à Bruxelles mais aussi dans toute la Belgique.