Une exposition pas très orthodoxe
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Depuis le 10 avril, un événement culturel sans précédent se déroule dans les élégants couloirs du Petit Palais. Pour la première fois, les trésors inaccessibles du mont Athos sont visibles dans de cette exposition qui connaît un succès considérable.
Monastère russe. Mont Athos
Et pour cause, les vingt monastères qui abritent les communautés cénobites, et qui renferment les plus beaux trésors de l’orthodoxie chrétienne, ont daigné dévoiler une partie de leur patrimoine aux chanceux parisiens. Fortement liés aux aléas de l’Empire Byzantin (330-1453), arbitres de la guerre entre iconophiles et iconoclastes, les moines du monastère ont défini les canons de la beauté chrétienne orthodoxe, repris ensuite par les nations slaves converties à l’orthodoxie. Aujourd’hui encore, ces vingt monastères dépendent du patriarcat de Constantinople, et non de l’Eglise de Grèce. Vous me suivez ? Il faut dire que chez les Orthodoxes, on tombe vite dans des querelles byzantines, mais en ce qui concerne le patrimoine religieux, c’est Byzance ! Ce ne sont en fait pas moins de deux cents œuvres d’une beauté et d’une ancienneté incroyables qui nous plongent dans les eaux bleus mais troubles des eaux grecques.
Les grandeurs d’un empire millénaire
Le mont Athos se déploie en effet sur une fine péninsule au nord de la Grèce, qui demeure sous un statut particulier. Celui-ci date de l’Empire byzantin, et a été reconduit par la république hellénique de Grèce, lors du traité de Lausanne en 1923, qui met fin à l’Empire ottoman. Il fait figure en quelque sorte du Vatican du monde orthodoxe, sauf que seuls les moines peuvent y vivre, qu’une infime partie des monastères peuvent être vus… par des hommes.
N’en déplaisent à ces dames, les moines qui ont suivis l’installation des œuvres au Petit Palais, ne regardaient pas le personnel féminin de l’exposition notamment celles qui organisent des visites guidées, me confiait l’une d’entre elles avec un sourire gênée : « Ils se mettaient les mains devant le visage, et regardaient du côté opposé au mien. C’est là où j’ai compris les raisons du schisme entre catholiques et orthodoxes». Néanmoins, ces œuvres exposées ont le mérite de nous faire revivre les grandeurs d’un empire millénaire, entre conflits religieux, invasions barbares de toutes parts, dynasties qui se succèdent, higoumènes et moines ermites, icônes dorées et argentées, popes et dévotions en tout genre.
Petit palais, lieu de l'exposition
Une ambiance très religieuse émane de cette exposition, qui peut paraître pesante pour certains. Il est vrai que l’orthodoxie byzantine observe une foi très poignante et exclusive. Cependant, il faut savoir ne pas s’arrêter à cet aspect, et vivre cette exposition comme un voyage dans le temps, en profitant de l’éclairage tamisé et chaud, et en écoutant les psaumes des moines, qui bercent votre visite. Fruit du travail des moines du mont Athos depuis le XXe siècle, cette exposition nous donne à voir le conservatoire de l’art byzantin préservé et magnifiquement restauré. Cette exposition vous permet de voir des œuvres rarissimes, émanant de la volonté des moines de le rendre publiques aux yeux européens. On comprend alors le caractère unique et exceptionnel d’une exposition qui se veut à dimension européenne, et unique en son genre. Le stress et l’attitude désagréable des gardiens en est là pour le confirmer ! L’exposition prendra fin le 5 juillet 2009. Allez- y, Dieu reconnaîtra les siens !
Petit Palais, ParisCrédit photos : Danielle Directo/FlickR et Michel Guilly/FlickRHenri Lacour