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Un bateau pour Gaza : je désobéis donc je suis

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Société

Les paysans démontent des McDo, les salariés prennent leur patron en otage, les profs n’écoutent plus leur ministre, les gamins font le mur et les bobos fument de la ganja. Désobéir, c’est tendance. Sur la mer aussi.

Transgresser l’interdit, ça fait du bien. Comme les femmes de Barbe-bleue, dès qu’on nous interdit d’ouvrir une porte, on l’ouvre. Cinq ans de blocus israélo-égyptien, ça forge l’insubordination, même chez le plus légaliste des juristes. Ça en deviendrait presque trop facile de désobéir, mais bon, il faut bien.

Un petit brin de désobéissance civile qui inspire la campagne ?

Crier « Restez humains »

Alors, vogue, commence et recommence la galère, un an après l’assaut meurtrier du Mavi Marmara. L’arche de Noé, version militante, avec activistes, personnalités du monde associatif, anonymes, politiques, journalistes, au secours de Gazaouis sous Le Déluge (un mythe qui relate des pluies catastrophiques), en mer pour une deuxième flottille de la liberté, baptisée « Restez humains ».

L’objectif ? Pas seulement apporter une aide humanitaire, 6 000 tonnes de biens arrivent déjà quotidiennement à Gaza. Plus que cela. Faire du bruit, et lancer fort et loin des bouteilles à la mer, surfant sur la vague des indignados et de Stéphane Hessel. Créer, pas une vague, mais un tsunami, qui contamine les opinions publiques avec une radioactivité rebelle qui enthousiasme ou hérisse les poils.

Désobéir ? Parader !

Agitateurs partisans, rêveurs détachés des réalités, bonnes âmes, les navigateurs inexpérimentés n’ont décidément rien compris.

Car les marins d’un jour sont des cumulards. Désobéissant à Israël, désobéissant à l’ONU, l’Union européenne, les Américains et les Russes, qui craignent avec les flottilles une nouvelle escalade de la violence, désobéissant à la Grèce, berceau européen d’une démocratie que les indignés en ciré ne mettent plus qu’entre guillemets lorsqu’ils parlent des Héllènes. Ça fait beaucoup. Alors, quand le journal français le plus lu à l’étranger, le sérieux Le Monde, « embarque pour Gaza », les commentaires se multiplient. « Du flan », un « baroud du déshonneur », une « exhibition », « une blague », une « croisière de GO ».

Les blasés de la désobéissance seraient-ils moins humains que les matelots ? Non. Seulement, tout autant persuadés d’avoir raison que les autres. Agitateurs partisans, rêveurs détachés des réalités, bonnes âmes, les navigateurs inexpérimentés n’ont décidément rien compris. Ils ne savent d’ailleurs rien, leurs bateaux sont petits et leurs coupes de cheveu dépassées.

Un citoyen qui vote va-t-il moins loin qu'un militant qui vogue ?

Réalisée par le collectif "I resist"Refuser d’obéir, c’est un art de vivre, un peu comme le feng shui (art d’harmoniser la l’énergie de l’environnement). Tout le monde n’y est pas sensible. C’est même un peu plus que cela. Il va pas nous ressortir Stanley Milgram, quand même ? Eh bien si, il vous le ressort : il faut connaître Milgram en soirée. Sa fameuse expérience nous apprend que sous l’ordre d’un scientifique, dans le cadre d’une expérimentation factice, à peu près deux tiers des participants infligent des électrochocs de 450 V à des cobayes, bidons eux aussi. Face aux ordres, on a l’habitude d’obéir. Le citoyen doit aussi apprendre à désobéir. Rony Brauman, l’ancien président de Médecins sans Frontières, et Eyal Sivan intitulèrent Éloge de la désobéissance le livre accompagnant leur documentaire sur le procès du criminel nazi Adolf Eichmann. Tendance, pensez-y.

Photos : Une (cc) Nwardez/flickr ; Jack Sparrow (cc) Tugoriodetom/flickr ; I resist Neverbeforethecampaign/flickr ; Vidéo, Bateaugaza.fr/Youtube