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Turquie : l'après coup

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Politique

Après la tentative ratée de coup d'État en Turquie, le gouvernement a arrêté 6 000 personnes et a limogé plus de 2 700 juges et procureurs. Le soulèvement d'une grande partie de la population contre les putschistes n'avait rien de démocratique, affirment certains commentateurs. D'autres, soulagés que la dictature militaire n'ait pas pu s'installer, placent leurs espoirs dans l'opposition.

Allemagne - Deutschlandfunk : tombés pour la fronde 

En s'opposant aux chars, les Turcs n'ont pas pris parti pour les principes fondamentaux de la démocratie, selon le portail Deutschlandfunk : « Ce qui ressemblait de prime abord à la résistance courageuse de démocrates n'était en réalité que l'acte de miliciens prêts à tuer pour leur leader Erdoğan, et, s'il le fallait, à mourir. Ils ont tué des soldats, uriné sur les cadavres de ceux-ci devant les caméras, et même décapité un soldat, à la façon de Daech. (...) Les partisans d'Erdoğan sont descendus dans les rues aux cris de Allah-u Akbar, en faisant le salut des islamistes et des fascistes. À Istanbul, ils ont sillonné les faubourgs alévis et les quartiers où les jeunes boivent de l'alcool. Cette tentative de putsch, quels que soient ses auteurs et ses raisons, a un résultat clair : elle donne la possibilité à Erdoğan de conforter son pouvoir et de renforcer l'amour-propre de ses partisans islamistes. » (17 juillet 2016)

Turquie - Hürriyet Daily News : ouf...

Bien qu’il soit loin d’être un partisan du gouvernement Erdoğan, le chroniqueur Yusuf Kanlı se dit soulagé, dans le quotidien libéral Hürriyet Daily News, que la tentative de coup d'État en Turquie ait échoué : « Le pire gouvernement civil vaut encore mieux qu’une administration putschiste. (…) Le gouvernement a été élu et c’est par les urnes qu’il faut le changer. Cette fois-ci, la Turquie devrait y parvenir(.) Aussi étrange et paradoxal que cela puisse paraître, le gouvernement Erdoğan a été sauvé par ces médias turcs qu’il a su si vigoureusement harcelés ces 14 dernières années. Si des chaînes telles que CNN Türk, NTV et d’autres ne s’étaient pas opposées aux ordres des putschistes, n’avaient pas continué de diffuser leurs émissions et proposé à Erdoğan et à son cabinet une plate-forme pour atteindre les masses et les appeler à descendre dans la rue, il y a fort à parier que le putsch aurait réussi et que ce ne sont pas les hommes de la junte qui seraient en prison aujourd’hui. » (18 juilet 2016)

France - Médiapart : l'opposition n'est pas morte

Même après la tentative de coup d'État, la résistance au président Erdoğan se poursuivra, assure le journaliste et poète Jean-Noël Cuénod sur son blog hébergé par le site Mediapart : « Nanti de ce soutien apporté à la fois par les urnes et par la rue, Erdogan n’hésitera pas à donner un coup d’accélérateur la "sultanisation" de la Turquie et à démanteler ce qui reste encore de laïcité dans les institutions. ... Néanmoins, tout espoir laïque n’est pas forcément perdu. La Turquie des villes comprend des classes moyennes qui restent attachées à la liberté de conscience. Même si les médias sont mis au pas par le pouvoir, les Turcs disposent des réseaux sociaux et de leurs liens avec l’étranger pour s’informer et échanger. La réaction d’une partie des militaires contre le régime de "démocrature" d’Erdogan démontre que l’opposition n’est pas morte. Même si elle sort très affaiblie par ce coup d’État manqué. » (16 juillet 2016)

Chypre - Cyprus Mail : l'Égypte dans le rétro 

Les putschistes turcs ont suivi le mauvais exemple, écrit Cyprus Mail : « Les responsables du coup d'État ont commis la même erreur que les libéraux égyptiens lorsqu'ils ont intimé à l'armée, en 2013, de renverser le président élu. L'Égypte avait alors un président (Mohamed Morsi) que les citoyens redoutaient et détestaient. Mais ils avaient aussi une démocratie qui prévoyait le moyen pacifique de le chasser. La popularité d'Erdoğan se serait étiolée avec le temps. L'économie turque stagne, la politique d'Ankara en Syrie est catastrophique et la corruption de la clique au pouvoir est de plus en plus difficile à ignorer. Tôt ou tard, il aurait perdu les élections. Mais à l'instar des libéraux égyptiens, les officiers à l'origine du coup d'État en Turquie n'ont pas eu suffisamment foi en la démocratie pour attendre plus longtemps. » (17 juillet 2016)

Espagne - El País : blinder la démocratie

El País appelle désormais Erdoğan à conforter la démocratie et à souder le pays : « Maintenant que les tensions sont largement retombées et que nous avons assisté à certaines scènes regrettables de lynchage contre des soldats rebelles, il est plus important que jamais que seule la justice, en toute indépendance, ouvre l’enquête contre les rebelles et leurs soutiens. Mais la révocation, un jour après le putsch, de milliers de juges et de procureurs de la république ainsi que l’arrestation de dix juges de la Cour Suprême nous inquiètent. Ceci pourrait affaiblir encore une séparation des pouvoirs déjà hypothétique et minée par la permanente dérive autoritaire d’Erdoğan. Ce putsch déjoué devrait renforcer la démocratie et l’État de droit et unir le pays face au grand défi auquel il fait face aujourd’hui. Et non pas le polariser encore plus. » (18 juillet 2016)

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Cet article est publié en partenariat avec euro|topics

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Translated from Gescheiterter Putsch polarisiert Türkei