Tout nouveau, tout beau, le monde de l’hydrogène
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cléa blanchardL’Europe se targue d’être le leader de la transition vers l’économie de l’hydrogène. A l’heure où le continent tangue et vacille, cette nouvelle forme de production d’énergie peut-elle lui redonner vigueur ? Etat des lieux.
En septembre 2005, on a pu observer une unanimité rarement constatée au sein du Parlement européen. Dans tous les partis politiques, des voix se sont élevées pour réclamer urgemment un changement d’orientation dans la politique énergétique : cesser d’avoir recours aux énergies fossiles telles que pétrole et charbon pour s’engager sur la voie d’une économie « verte », basée sur l’hydrogène. En effet, la nécessité de développer des sources d’énergie alternatives se fait chaque jour plus pressante : les stocks de combustibles fossiles ne sont pas inépuisable, il faut réduire drastiquement les émissions de dioxyde de carbone et diminuer notre dépendance vis-à-vis des pays producteurs de pétrole au Moyen-Orient, aux régimes trop instables.
Les eurodéputés ont ainsi présenté le 12 septembre dernier un « Manifeste pour l’hydrogène », préconisant la mise en œuvre d’un programme en 13 points, susceptible d’aboutir au plus tard en 2025, à une « Troisième Révolution Industrielle ». Recommandation ? Instaurer l’énergie de l’hydrogène en s’appuyant sur des sources d’énergie renouvelables et renforcer la co-opération entre les gouvernement et les représentants du secteur de l’énergie.
L’hydrogène n’a rien de sorcier
L’hydrogène est une forme d’énergie qui n’engendre aucune émission polluante et peut être produit à partir de sources primaires nombreuses et variées, comme le gaz naturel, la biomasse ou encore les hydrocarbures, ce qui garantit la pérennité de l’approvisionnement énergétique. L’hydrogène ne permet certes que de stocker l’énergie, pas de la transporter. « Il est indispensable que les responsables politiques comme les consommateurs prennent conscience de la véritable nature de l’économie de l’hydrogène. Très peu de personnes comprennent que l’hydrogène est comparable à l’électricité, » explique Karen Hall de la National Hydrogen Association aux Etats-Unis. Cependant, l’hydrogène n’existe pour ainsi dire jamais à l’état isolé sur la terre. Son extraction nécessite un apport d’énergie. Or ce procédé ne peut être considéré comme écologique que si l’énergie utilisée provient de sources renouvelables comme le vent, la soleil ou l’eau.
La poule et l’oeuf
Qui donc fera le premier pas qui nous mettra sur le chemin du monde de l’hydrogène ? Les constructeurs automobiles attendent la mise en place d’un réseau de stations-service distribuant de l’hydrogène avant de commercialiser leurs véhicules. De leur côté, les sociétés de distribution attendent que le nombre de véhicules sur le marché soit suffisant avant d’investir dans l’hydrogène. Enfin, le consommateur veut avant tout une technique qui fonctionne sur le champ, ne lui demande pas d’efforts particuliers et ne lui coûte pas plus cher qu’une voiture normale. Tous attendent que l’Etat prenne en charge les risques.
C’est à l’Union européenne de faciliter la transition vers l’économie de l’hydrogène. L’idéal serait d’octroyer des crédits pour la recherche, d’instaurer des abattements fiscaux, de subventionner les constructeurs et de financer la construction d’infrastructures. En outre, Karen Hall espère que « l’UE jouera un rôle pionnier dans l’adoption de cette nouvelle technologie et fera l’effort d’en acheter de grandes quantités. Une initiative qui permettrait de faire baisser les prix pour faciliter ensuite l’accès du grand public à cette technologie. »
Rêve ou réalité ?
En janvier 2004, la Commission européenne a mis en place une « Plate-forme technologique européenne de l’hydrogène et des piles à combustible », chargée de coordonner, à tous les niveaux européen, national ou régional, les projets de recherche, de développement et de financement dans ce domaine. Cette initiative doit imaginer une stratégie de commercialisation des technologies de l’hydrogène et de la pile à combustible. Les objectifs sont évidents : assurer la sécurité de l’approvisionnement énergétique, réduire les émissions de gaz à effet de serre et ouvrir de nouvelles possibilités à l’économie européenne.
La plate-forme a présenté ses recommandations à la fin de l’année 2004 : d’abord un programme de recherche sur dix ans, puis une vision à moyen terme pour 2030 et enfin un dessein visant à généraliser à l’horizon 2050 l’usage de l’hydrogène parmi les pays industrialisés. En tant que carburant dans les transports mais aussi en complément de l’électricité, produit à partir de sources d’énergies renouvelables.
Rien, sur le papier en tout cas, ne s’oppose à l’avènement du règne de l’hydrogène. Mais quelques obstacles doivent encore être surmontés pour que l’utilisation commerciale de l’hydrogène devienne une réalité. La technique n’est pas complètement au point. La réglementation européenne concernant les mesures fiscales incitatives afin de favoriser le développement des nouvelles technologies n’est absolument pas organisée. De même, il reste à traiter les questions de responsabilité et d’assurance, ainsi que les doutes sur la sécurité de la technologie de l’hydrogène.
La concrétisation de quelques projets-phares contribue à rapprocher cette vision de la réalité. On attend beaucoup de l’initiative CUTE (Clean Urban Transport for Europe) lancée par les 25 fin 2001, auquel elle contribue à hauteur de 18,5 millions d’euro. CUTE expérimente la mise en service, en conditions réelles, de bus équipés de pile à combustible alimentée à l’hydrogène. L’objectif est d’avoir 27 bus opérationnels d’ici à 2007 dans neuf grandes villes : Amsterdam, Barcelone, Hambourg, Londres, Luxembourg, Madrid, Porto, Stockholm et Stuttgart. Les premiers pas vers l’économie de l’hydrogène ont été accomplis. Toutes les conditions sont réunies pour que l’Europe devienne le leader technologique du monde de demain, un monde qui fonctionnera à l’hydrogène. A condition qu’elle ne perde plus de temps.
Translated from Schöne neue Wasserstoffwelt