Tourisme à Bruxelles : faire face au « Belgium bashing »
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Le « Belgian bashing » est à la mode depuis l'alerte 4 à Bruxelles mi-novembre, fortement relayée par les médias du monde entier. Si les Bruxellois ont rapidement repris leur routine par la suite, il en va différemment des touristes, qui hésitent toujours à revenir à Bruxelles. Pour contrer cette tendance, des campagnes pour redorer l’image de Bruxelles ont été lancées.
Comment reprendre une activité normale après le traumatisme des attentats ? Question difficile s’il en est, mais qui se pose d’autant plus qu’elle n’a pas seulement des implications psychologiques, mais également des retombées économiques. On le sait, la ville de Paris subit les répercussions financières des attentats de novembre, et il en va de même pour sa voisine belge : plusieurs liens ont été établis entre les auteurs des attentats parisiens et Bruxelles. Conséquence directe : quelques jours après les attentats parisiens, la capitale est placée en alerte terroriste maximale. L’image de Bruxelles, ambiance ville-morte, débarque alors sur les écrans du monde entier.
Bruxelles, capitale des pots cassés
On en a vu, des images de l’emblématique Grand-Place de Bruxelles envahie par les militaires, des terrasses de bars vides et des blindés militaires dans les rues. Bruxelles, aux yeux du monde, est devenue une ville dangereuse, avec pour épicentre cette fameuse commune de Molenbeek qui a fait les choux gras de la presse internationale pendant des semaines.
Mais Bruxelles, en plus d’être la capitale de la Belgique et des institutions européennes, est également une destination de choix pour des millions de touristes chaque année (3,4 millions en 2014). Et, à ce niveau, il faut admettre que Bruxelles a souffert de sa nouvelle image, en particulier auprès de ses visiteurs asiatiques et américains. On peut prendre l’exemple d’une chaîne d’appartements-hôtels de standing fraîchement installée à Bruxelles, qui a vu sa boîte mail inondée de demandes d’annulation en quelques jours. Les longs mails de ces clients reflètent leur inquiétude : « J’avais prévu d’emmener ma famille au marché de Noël de Bruxelles (…) Je n’avais jamais annulé un voyage auparavant, mais je ne peux risquer la vie de ma famille. Le marché de Noël peut être la cible numéro 1 de ces fanatiques », ou encore « Les informations ont indiqué que Bruxelles serait encore en alerte maximale pendant toute la semaine et le Département d’État américain vient de déconseiller aux citoyens américains de se rendre à Bruxelles ».
Le résultat ne se fait pas attendre : dans les deux semaines entre le 23 novembre et le 7 décembre, la start-up aura à faire face à une dizaine d’annulations. Le taux d’occupation pour le mois de décembre, pic habituel dans les réservations touristiques, était de 30% dans cette start-up, contre les 65% prévus en novembre.
Call me, baby
Pour contrer cette descente aux enfers, quoi de mieux que d’engager la population locale ? Ses habitants d'origines diverses connaissent Bruxelles mieux que quiconque et peuvent le faire savoir au monde entier. Mais comment s’y prendre ?
Dans trois endroits de la région – au Mont des Arts, sur la place communale de Molenbeek et sur la place Flagey – des cabines téléphoniques ont été installées, et permettaient aux personnes du monde entier de passer un appel à Bruxelles. De l’autre côté, chaque passant pouvait répondre et décrire la situation dans la capitale belge : voici l’objet de l’opération #CallBrussels.
Pendant 5 jours, 12 688 appels ont été passés depuis 154 pays différents. Tout le monde pouvait appeler via Internet, et voir des images en direct grâce aux caméras vidéo placées à proximité. Les images de ces vidéos reflètent une bonne entente entre les interlocuteurs : les habitants de Bruxelles ont pu transmettre des messages d’apaisement aux touristes du monde entier. Le contexte de la campagne (début janvier) a également permis une bonne couverture médiatique, et de faire découvrir Bruxelles avec un clin d'oeil sympathique.
Il y a un grand espoir que la peur se soit atténuée et que le nombre de visiteurs sera en croissance dans les mois à venir, grâce aux efforts consentis par la région dans ses activités de promotion. On verra également si une suite sera donnée à la campagne en elle-même.
Redorer l’image de Bruxelles : un défi
Bien que des attentats ont eu lieu dans d’autres capitales européennes (Londres, Copenhague et Paris) c’est la région de Bruxelles qui assume les pots cassés d’une politique de coopération inefficace au niveau européen, parce qu'elle serait le lieu de planification des attaques de Paris. Les découvertes sur les auteurs et leurs complices qui sont apparues dans les médias suite aux avancements de l’enquête ont terni davantage l’image de la capitale belge et européenne, ainsi que celle des institutions qu’elle abrite.
Néanmoins, le défi de redorer l’image d'une ville n'est pas seulement le problème de Bruxelles (bien que d’autres dossiers se soient ajoutés depuis, et même des déclarations venues d’outre-Atlantique, qui font actuellement les gros titres). La crise de réfugiés de l'été 2015 montrait Budapest comme une ville débordée et sans moyens d’accès, les événements de la Saint Sylvestre mettent en question la sécurité des visiteurs de la ville de Cologne à l’approche du carnaval, et encore plus récemment, l’arrestation d’un homme armé à proximité de Disneyland Paris met en péril la nouvelle saison touristique.
Le tourisme est un levier important de l’économie qui fournit des emplois à tous les niveaux, et, dès lors, aucune ville ne peut négliger l’impact de la terreur apparue en Europe suite aux attentats de Paris. Un point positif : les efforts de gestion de l’image feront travailler les bureaux municipaux responsables du tourisme et de l’économie, ainsi que les créatifs des agences de communication. Réjouissons-nous, car, grâce à eux, on aura l'occasion de redécouvrir Bruxelles - ainsi que d’autres villes européennes - sous une autre perspective.
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