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The True Cost : la mode à quel prix ? (1/2)

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BruxellesStyle de vie

Alors que Primark va ouvrir son cinquième magasin belge à Charleroi et que H&M possède 3 900 enseignes dans 61 pays, le groupe des Verts au Parlement européen organisait le 2 mars dernier une projection-débat du documentaire The True Cost

On y découvre les coulisses de la fast-fashion, un système mondialisé dominé par les grandes marques de prêt-à-porter. D'un côté, elles créent une forte demande de vêtements par le biais de la publicité. De l’autre, elles exploitent les travailleurs des pays pauvres pour produire en grandes quantités à bas coût.

Le film d'Andrew Morgan montre aussi que des alternatives existent, comme People Tree, la première marque de vêtements équitables et durables. Sa fondatrice Safia Minney était d’ailleurs l’invitée d’honneur du débat présidé par l’eurodéputée anglaise Jean Lambert

Consommer plus, payer moins

Depuis vingt ans, la fast-fashion pousse les consommateurs à acheter toujours plus de vêtements. Résultat : 80 milliards de vêtements sont aujourd’hui achetés chaque année dans le monde, soit quatre fois plus qu’il y a vingt ans ! 

Jusqu’aux années soixante, 95% des vêtements utilisés aux États-Unis étaient produits … aux États-Unis. Aujourd’hui, 97% de cette production est délocalisée dans les pays en voie de développement, où les marques exigent des prix toujours plus faibles.

Arif Jebtik, propriétaire d’une usine au Bangladesh, témoigne: « Une marque veut vendre un tee-shirt à quatre dollars alors que son concurrent le vend cinq. La marque veut qu’on diminue nos prix, sinon elle part ailleurs. Alors je diminue mes prix. Et ainsi de suite, toujours plus bas. On doit survivre, on n’a pas le choix. »

Pour Livia Firth, directrice d’une agence de conseil en durabilité, les marques profitent de ce besoin de travailler pour transformer les ouvriers en esclaves.

Durant le débat, Mario Iveković, président du syndicat croate Novi Sindikat a souligné que ces conditions de travail étaient aussi une réalité chez nous : « En Europe de l’Est, il n’y a pas de liberté d’association ni de syndicat démocratique dans l’industrie textile. Si les travailleurs demandent de meilleurs salaires, les marques menacent de partir en Asie. »

En tant que consommateurs, nous ne sommes qu’un rouage de plus dans le système créé par ces marques. Leur seul objectif est le profit. D’un côté, elles nous font croire à coup de publicités que leurs produits vont nous rendre heureux et que nous sommes riches puisque nous pouvons en acheter plein. De l’autre, elles exploitent des ouvriers pour produire à bas coût toujours plus de vêtements.

Les fabricants baissent les prix en supprimant les droits syndicaux et sociaux des travailleurs (assurance santé, retraite, congés) et en faisant des économies sur la sécurité. Le 24 avril 2013, plus de 1000 ouvriers textiles sont morts dans l’effondrement de l’usine textile Rana Plaza au Bangladesh. Ce qui est devenu le pire « accident » de l’histoire de l’industrie du textile a révélé au grand public le côté obscur de la mode. Mais Rana Plaza n’est que la partie visible de l’iceberg. Les incendies dans les usines sont fréquents, et le nombre de morts se compte au moins en centaines.

Dans la solitude des champs de coton

Le coton est la fibre la plus utilisée pour fabriquer des vêtements. Avec la fast-fashion, sa demande a augmenté. Pour tenir le rythme, des compagnies comme Monsanto ont élaboré et breveté un coton OGM, qui nécessite une pulvérisation intensive de pesticides très nocifs pour la santé et les sols.

Dans les villages indiens de la région de Pendjab où ce coton est cultivé, des centaines de personnes souffrent de cancers, de retards mentaux et d’handicaps physiques. Les familles s’endettent pour tenter de soigner leurs enfants et leurs proches car les sociétés d’engrais et de pesticides refusent de reconnaître les effets secondaires de leurs produits.   

Les agriculteurs s’endettent aussi pour acheter des graines de coton OGM et toujours plus d’engrais. Après une augmentation de production les premières années, les rendements stagnent car ce type de culture appauvrit les sols. Pour récupérer leur argent, les compagnies saisissent les terres des agriculteurs, qui se retrouvent alors sans ressources pour nourrir leurs familles. Plus de 250 000 agriculteurs se sont suicidés les 16 dernières années. C’est la plus grande vague de suicides qui ait été enregistrée dans l’histoire.

Les compagnies qui produisent ces graines, les engrais et les pesticides sont les mêmes. Ce sont aussi elles qui produisent les médicaments pour soigner les maladies qu’elles créent. Pour la militante écologiste Vandana Shiva, « si vous avez un cancer, cela crée du profit pour ces compagnies : c’est du gagnant-gagnant-gagnant, alors que pour la nature et les gens c’est du perdant-perdant-perdant. »      

Bande-annonce de The True Cost (en anglais)

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Retrouvez ici la deuxième partie de notre article.

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Cet article a été rédigé par la rédaction de cafébabel Bruxelles. Toute appellation d'origine contrôlée.