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Tension financière entre Grèce et Allemagne : les jeunes débattent

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Dans la famille européenne, la dette a fait monter la tension d'un cran. « Arnaque en famille… », titrait le magazine grec Focus le 22 février dernier. De quoi hérisser un peu plus les Allemands fatigués de porter le poids de la dérive financière hellénique. Sur cafebabel.

com, deux babéliens, l’un Grec et l’autre Allemand, débattent sur les possibles répercussions diplomatiques que le différend financier entre leurs États pourrait entraîner.

Giorgos Kokkolis, le Grec : « On lave le linge sale en famille. »

Il a beau lui manquer un bras, la Vénus de Milo suscite l’admiration de toute l’Europe. A en juger par la couverture de Focus où la divine Aphrodite apparait la main levée, on aurait soudain pu croire que les Allemands avaient enfin retrouvé le membre manquant de la déesse. Presque. Sauf que c’est un obscène doigt « d’honneur » que pointe, à la une du magazine, la plus célèbre des sculptures de l’Antiquité gréco-romaine-romaine. La Grèce a plus consommé que produit en 2009, c’est vrai, de quoi rendre furax ses partenaires européens. Mais reconnaissons que les Etats – Belgique, Danemark, Luxembourg - qui encouragent la Grèce à réduire ses dépenses n’ont pas les mêmes priorités que la péninsule hellénique en terme de respect des frontières vis-à-vis du voisin turc par exemple. Assurément, la disparition d’une telle responsabilité réduirait une bonne part du budget militaire de la Grèce. Soit dit en passant, n’est ce pas à l’Allemagne et à la France que le gouvernement d’Athènes achète des armes en vue d’assurer sa défense et celle de l’Union ?

Prétendre que l’Allemagne, par le biais de l’Otan et de l’Union, a payé plus qu’il ne fallait pour la Grèce relève donc du populisme pur et simple. Penchons nous un instant sur la circulation des fonds à l’intérieur de la Communauté. Les états les plus stables payent pour les plus fragiles, rien de neuf là-dedans. Afin de soutenir ces derniers, toute la communauté s’engage. Dans le même esprit, la règle veut que les plus anciens contribuent au développement des nouveaux arrivants. Pour le moment, nous en sommes toujours à parler de la distribution des fonds, non de leur remboursement. Que l’Europe ait accordé à la Grèce durant ces 25 dernières années beaucoup d’argent, nul ne le conteste. Toutefois, si Berlin (via le budget communautaire) a versé près de 1,3 milliard d’euro à Athènes, dans le même temps, les exportations de la République fédérale vers la Grèce ont rapporté environ 4 milliards à l’Allemagne.

Le problème grec est avant tout un problème européen

Le problème grec est avant tout un problème européen. Or, il ne saurait y avoir de véritable union monétaire sans union commerciale. Certes, les règles de Maastricht restaient pertinentes tant que l’Union se trouvait dans sa phase de décollage, mais désormais, force est d’admettre que les choses ont bien changé. Le bon fonctionnement de l’Union nécessite à présent de nouveaux mécanismes concrets afin de pouvoir faire face aux carences futures. L’Irlande, pour ne citer qu’elle, rencontre le même genre de difficultés. Juste après la Grèce et devant l’Espagne, Dublin, enregistre aujourd’hui un déficit de 10,75%. En Grèce, nous avons un dicton : « Ou la mer avance dans le mauvais sens ou bien c’est nous qui naviguons à contre-courant. » Et, tandis que l’euro fléchit face au dollar, les produits allemands apparaissent plus attractifs et plus compétitifs sur le marché mondial. Vous ne pouvez tout de même pas aider un alcoolique en lui offrant juste une bouteille de whiskey. Un petit coup de pouce plus que souhaitable ne devrait donc pas être comptabilisé entre membres de la même famille.

[De Giorgos Kokkolis sur Le Babelblog d'Athènes]

Sonje Schwennsen, l'Allemand : « Discipline ! »

 De quoi les Grecs se plaignent-ils soudain ? Quelles étaient leurs attentes ? Depuis plusieurs années, ils ont caché l’immense déficit creusé par leur politique budgétaire en fournissant de fausses données statistiques aux autres états-membres ; or, au moment où tout se met à merder pour de bon, ils voudraient tout simplement rompre les contrats existants en attendant que les autres les aident à s’extirper du trou dans lequel ils se sont fourvoyés ? ! Ca serait trop facile. Les Grecs ont trop longtemps vécu au-dessus de leurs moyens. Tôt ou tard, on doit payer les pots cassés et c’est à la Grèce elle-même de régler la facture.

Face à la crise grecque, les Allemands se montrent de très mauvaise humeur, L’introduction de l’euro n’a-t-il pas fait d’eux les plus grands perdants dans cette histoire. Avant, quand la Bundesbank (Banque Centrale Fédérale allemande) dominait le marché monétaire européen, les autres pays de l’Union se voyaient contraints de suivre la politique économique allemande. Mais depuis la mise en place de l’Union monétaire, elle a perdu la plus grande partie de son autonomie. En échange, il a été demandé que l’Union monétaire s’établisse sur des bases saines et solides. De cette volonté résultent les critères de Maastricht et du Pacte de stabilité financière. (Notamment, l’engagement pris par chaque état de la zone euro de limiter son déficit budgétaire). Alors que de toute évidence, la Grèce n’a pas respecté ses engagements, il semble compréhensible que l’Allemagne, de son côté, n’ait pas envie de se laisser marcher sur les pieds.

Les médias d’Outre-Rhin se sont montrés ouvertement critiques vis-à-vis des erreurs commises par la Grèce. Non seulement dans la conduite de sa politique budgétaire chaotique, mais également à cause de son manque de compétitivité économique. Or, au lieu d’analyser rationnellement ces reproches, les Grecs en ont fait une question d’honneur. Ils ont pris comme une offense la demande d’un juste retour des Allemands en retour de ce qu’ils donnent, même quand c’est par solidarité. Alors, quand les Allemands (pour qui l’âge de la retraite est passé de 65 à 67 ans) voient les travailleurs grecs descendre dans la rue pour manifester avec véhémence contre le prolongement de la vie professionnelle (devant passer ici de 61 à 63 ans), ils ne peuvent être que consternés.

Que l’Allemagne serve de bouc émissaire pour le déficit budgétaire dont la Grèce est seule responsable, cela n’a aucun sens !

Que l’Allemagne serve de bouc émissaire pour le déficit budgétaire dont la Grèce est seule responsable, cela n’a aucun sens ! Au lieu de calomnier l’Allemagne ou, comme le fait le quotidien Eleftheros Typos, d’invoquer l’intervention d’un occulte pouvoir financier aux mains de quelques groupes cryptos-nazis, la Grèce serait plus avisé de reconnaître ses propres erreurs et de faire face enfin à la réalité. Les Grecs devraient même se montrer reconnaissants de ne pas avoir été éjectés de l’Union monétaire. Alors qu’il semble de plus en plus probable que tous les Etats-membres s’apprêtent à porter financièrement assistance à la Grèce, tous, l’Allemagne en tête, invitent fermement Athènes à ne plus se laisser guider par une seule vertu dans la conduite de sa future politique budgétaire: la discipline !

[De Sonje Schwennsen]

Translated from Griechen und Deutsche über das Finanzdebakel in der Eurozone