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« Soufi, mon amour » : Quand le théâtre nous fait tourner la tête

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Alix Barré

Bruxelles

« Est, Ouest, Sud ou Nord, il n'y a pas de différence... Si vous voyagez intérieurement, vous parcourrez le monde entier et au-delà. » Les mots universels de la romancière Eli Shafak, mis au théâtre par Christine Delmotte, nous parlent d’amour, de spiritualité et d’unicité au ryhtme des derviches tourneurs.

Cafébabel Bruxelles s'est rendu au Théâtre des Martyrs afin de découvrir le monde spirituel du soufisme dans la pièce Soufi, mon amour, tirée du roman d’Eli Shafak. C'était l'occasion de s'entretenir avec Christine Delmotte, en charge de la mise en scène, de la scénographie et de l'adaptation.

Une pièce qui réchauffe le cœur

Soufi, mon amour est, au départ, un roman racontant l’histoire d’Ella Rubinstein, une femme au foyer de 40 ans ordinaire, vivant à Northampton avec son mari, ses 3 enfants et son chien. Sa vie va changer lorsqu’elle accepte de relire pour son travail un manuscrit qui retrace la rencontre entre le grand poète du 13ème siècle, Rûmi, et le plus célèbre derviche tourneur du monde musulman, Shams de Tabriz

L’amitié entre le poète et le derviche est une révélation pour Ella, ainsi que le début d’une histoire d’amour avec l’auteur du manuscrit, Aziz Z. Zahara, qui bouleversera sa vie, comme Shams a boulversé celle de Rûmi. 

Tourne, tourne, tourne…

Le soufisme est une branche spirituelle de l'islam, pour laquelle « La connaissance qui ne vous emmène pas au-delà de vous-même est bien pire que l'ignorance ». Le mot « derviche » vient du persan et signifie « mendiant », car ils vivent dans l'austérité et recherchent "l'unisson" avec Dieu. Ils dansent la Sama, en tournant inlassablement sur eux-même, dans le but d'atteindre un état de transe. Comme Shams le dit si bien, la Sama « est une danse spirituelle exécutée pour l'amour et l'amour seul ».

Ce n'est pas par hasard que Christine Delmotte a choisi, cette fois-ci, de se consacrer au soufisme. Son oeuvre entière est fortement imprégnée de spiritualité et nombre de ses pièces y sont entièrement dédiées. Pour Soufi, mon amour elle a souhaité aborder la spiritualité à travers l'angle de l'islam, en réponse à toute la haine qu'il peut provoquer aujourd'hui en Europe. Ce spectacle doit unir toutes les populations de Bruxelles dans le Théâtre des Martyrs.

Une histoire universelle

Delmotte a choisi pour cette histoire une mise en scène énergique, visuelle et esthétique. Entre le début et la fin de la pièce, les acteurs nous transportent sans heurts du 13ème au 21ème siècle. 

Ce n'est pas la première fois que Christine Delmotte s'attelle à l'adaptation d'un roman au théâtre; souvent son choix s'arrête sur des textes contemporains d'auteurs belges, comme Amélie Nothomb. « C'est un très long processus qui demande beaucoup de patience », nous explique-t-elle. 

Les comédiens sont en costumes contemporains. « Je ne voulais pas que ce soit exotique, pour moi c'est une histoire universelle qui n'est pas dans un lieu particulier », continue Delmotte. En effet, que l'histoire soit au temps de Rûmi ou celui d'Ella, les costumes restent les mêmes. Seule la jupe bleue de Stéphanie Van Vyve est un clin d'oeil au costume traditionnel des derviches tourneurs, ajoutant une note de magie aux scènes dansées. Deux des danseurs pratiquant la Sama, Yumma Mudra et Michel Raji, l'ont apprise aux comédiens en seulement deux jours.

Les comédiens transmettent l'énergie de cette histoire de manière impressionnante. Le rire, le sourire et la réflexion se sont succédés dans nos esprits pendant leur performance. 

La pièce remporte jusqu'à présent un franc succès. « Les gens étaient contents, je pense, par rapport au message d'amour. Je crois que c'est une chose qu'ils ont envie d'entendre, ont besoin d'entendre », affirme Christine Delmotte.

Les mots d'Ella citant la règle 40 du soufisme sont peut-être ceux qui résument le mieux l'esprit de la pièce: « Une vie sans amour ne compte pas. Ne vous demandez pas quel genre d'amour vous devriez rechercher, spirituel ou matériel, divin ou terrestre, oriental ou occidental... Les divisions ne conduisent qu'à plus de divisions. L'amour n'a pas d'étiquettes, pas de définition. Il est ce qu'il est, pur et simple. » À bon entendeur.

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