Séville, la ville aux cent potagers
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Gwenaëlle BiasielliTomates, laitues et poivrons cultivés au milieu du béton ? A Séville, les potagers urbains répondent au besoin d'une alimentation saine et leur entretien est une excellente « thérapie occupationnelle ». Conditions d'accès : jardiner pour son propre loisir et de façon 100 % écologique.
Petit détour par l'un des cinq parcs de la capitale andalouse, où les légumes poussent au son des pots d'échappement.
Comme bon nombre de riverains, José Peinado passe son temps sur les plates-bandes du Parc de Miraflores, deuxième espace vert européen en termes d'expansion horticole. La ville en compte cinq. Pour ce citadin, s'occuper chaque jour de ses légumes est une véritable thérapie : « depuis que je viens ici pour entretenir mon jardin, je n'utilise plus ma canne ». Ce doit être vrai dans la mesure où il prend soin de sa petite plantation depuis douze ans maintenant et ce, à heures bien précises : de sept heures à treize heures en été, et de dix heures à midi en hiver.
Non seulement ces potagers urbains contribuent à un environnement plus durable, mais ils remplissent aussi une fonction sociale. « En arrêtant de travailler, l'inactivité devient un danger. Le fait de me soucier de la bonne santé de mes légumes me permet de garder l'esprit en éveil», avoue Paco Gameso, un retraité sévillan de 68 ans. Comme beaucoup, il a décidé de consacrer ses moments libres à la terre. Et c'est précisément l'un des objectifs de cette initiative : allier sensibilisation à l'écologie et nouvelles formes de loisir pour citadins inactifs, le tout sur fond de valeurs telles que le civisme, la coopération et la participation citoyenne.
Plus de vert, moins de béton
En se développant, les agglomérations ont empiété sur les exploitations agricoles, qui ont vu leur avenir compromis par l'urbanisation croissante. A cause des industrialisations massives, les espaces verts ont commencé à disparaître ; les potagers urbains se sont alors développés en réponse à la« bétonisation». Le Parc de Miraflores a été créé en 1989. « Les noyaux urbains se sont étendus sans crier gare, détruisant les zones agricoles. Mais, grâce à la persévérance des citoyens, ces 165 parcelles de 150 mètres carrés ont été préservées. », commente Manuel Lara, président de l'association Comité Pro-parque Educativo Miraflores.
Grâce à cette démarche de conservation, il subsiste aujourd'hui de nombreux sites similaires à travers toute l'Andalousie. Généralement propriété de la Mairie, ces potagers amateurs sont cédés ou loués pour une somme symbolique et un temps déterminé. A Miraflores, le tarif s'élève à « 7 euros par an et la participation reste libre pour l'utilisation des installations », explique l'un des techniciens municipaux en charge de la gestion. « Notre but est de leur rappeler qu'ils ne sont que locataires des lieux et non pas propriétaires. » En contrepartie, les jardiniers s'engagent à travailler leur terre avec des produits totalement écologiques et à ne pas vendre leur récolte, exclusivement destinée à l'autoconsommation.
La propriété des parcelles est constamment renouvelée. Chaque année, dix d'entre elles sont tirées au sort et réservées à des particuliers. En cas d'abandon ou de mauvais usage des installations, les emplacements laissés en désuétude sont réattribués, suivant un ordre chronologique strict. Outre les particuliers, les organisations ont également accès à ces terrains : au total, ce sont huit parcelles de Miraflores qui sont occupées par des associations sociales, sportives... Il s'agit là, une fois encore, de remplir cette fonction sociale qui empreint les lieux. Sont également organisées des activités à l'attention des jeunes étudiants, lesquelles visent à les sensibiliser à l'environnement et rencontrent un succès certain : les écoles primaires et les collèges souhaitant s'inscrire aux visites doivent déposer leur demande un an à l'avance !
Le parc n'est pas épargné par les problèmes. Étant public, il est accessible à tous ; il a déjà été la cible de vols et d'actes de vandalisme. Certains, dont fait partie José Peinado, réclament une surveillance accrue de la Mairie. Selon lui, la municipalité devrait renforcer la sécurité dans l'enceinte du parc. De leur côté, les autorités locales considèrent que ce genre d'actions restent sporadiques, puisque sur les 165 parcelles, seules trois ont subi des dégradations. En plus de ces tracas quotidiens, beaucoup de jardiniers doivent faire face à des soucis d'argent, qui risquent d'asphyxier les cultures.
Une tendance à la hausse
Le parc de Miraflores n'est qu'un exemple parmi d'autres. Les potagers urbains bourgeonnent dans les métropoles et les politiques commencent à prendre conscience de leur importance. A Madrid, un nouvel espace de plus de six mille mètres carrés vient d'être inauguré et à Barcelone, l'agriculture collective suscite un réel engouement.
Cet article fait partie de Green Europe on the ground 2010-2011, la série de reportages réalisés par cafebabel.com sur le développement durable. Pour en savoir plus sur Green Europe on the ground.
Photo : Une © CocteauBoy/Flickr ; Texte: © Silvia López
Translated from Cultivar en el asfalto: Huertos urbanos en Sevilla