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Scandale Volkswagen : l'Europe à toute épreuve ?

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Politique

Après les difficultés économiques et la crise des migrants, un nouveau sujet de friction s’invite au sein de l’arène européenne : la question environnementale. La révélation du scandale Volkswagen, joint à la récente décision du Parlement de ne pas créer de commission d’enquête parlementaire sur l’affaire, fragilise un peu plus la cohérence et la stabilité des institutions européennes.

À quelques semaines de la COP 21, les difficultés internes à l'Europe ainsi que les points de tension politiques semblent faire une nouvelle victime : l’environnement. Le 20 septembre 2015 éclatait aux yeux du monde l’un des plus gros scandales de l’histoire automobile : le géant de l’industrie allemande Volkswagen reconnaît alors officiellement avoir eu recourt à des logiciels fraudeurs afin d’échapper aux normes environnementales imposées aux véhicules diesel. L’affaire concernerait plus de 11 millions de véhicules.

Das fraude

Un mois après, le 27 octobre 2015, le Parlement européen rejette la création d’une commission d’enquête parlementaire visant à définir le rôle joué par la Commission et les États membres dans la mise en oeuvre des réglementations européennes en matière environnementale. La proposition, déposée par le groupe des élus Verts, soutenue par le centre (ALDE) et la  gauche radicale (GUE),a récolté 209 suffrages positifs et 453 voix contre.

Le rejet de la proposition d’enquête est d’autant plus surprenant que les preuves sont fiables et les éléments scientifiques à l’appui. En mai 2014, l’International Council for Clean Transportation, organisation non-gouvernementale, publie un rapport saisissant indiquant que les niveaux émis par certains véhicules diesel, notamment la Jetta, excèdent jusqu’à 35 fois les seuils d’émissions tolérés. Ce rapport, validé par l’Agence de l'Environnement Américaine (EPA), fournissant une abondante base de données, fait donc foi scientifiquement et légalement.

Comment alors  expliquer un tel revirement du Parlement européen, et ce à quelque mois de la COP 21, échéance cruciale dans les négociations environnementales ?

                      -  L’influence des facteurs politico-économiques 

Certains seraient tentés d’expliquer ce refus pour des motifs politiques. Le quotidien britannique Financial Times avait en effet révélé que Janez Potocnik, le précédent commissaire à l’environnement, était au courant de l’affaire dès février 2013 et en avait informé Antonio Tajani, alors commissaire à la politique industrielle. Sur la base de ces faits, certains en concluent, à l’instar de Pascal Durand (député européen EELV, ndlr), que les intérêts privés ont désormais pris le pas sur la défense de l’intérêt général.

                       - Les faiblesses d’une législation européenne jeune et vacillante

Le groupe des élus Verts  reconnaît également les actuelles failles de la législation européenne en matière environnementale. Selon la législation actuelle fixant les seuils de pollution, adoptée en 2007, les tests visant à mesurer les émissions de polluants sont réalisés dans des laboratoires, et non dans un cadre urbain. Les résultats ne reposent donc pas sur la circulation et la conduite réelle des véhicules, et auraient donc peu de validité empirique.

L'Europe est trop faible face aux enjeux environnementaux

De la même manière, dans la foulée du scandale Volkswagen, la Commission européenne a émis une proposition visant à établir une nouvelle procédure de test pour les émissions des véhicules. Toutefois, cette nouvelle procédure prévoit de nombreuses exemptions : les fabricants seraient autorisés à vendre des véhicules dépassant les seuils légaux de 50 à 60%.

Le choix de rejeter la mise en place d’une commission d’enquête parlementaire semble donc une fois de plus montrer la difficulté de l’Europe à se saisir d’un sujet conflictuel qui dépasse les bornes de l’État-Nation. De facto, cette décision renvoie le jugement de l’affaire aux juridictions nationales, et s’impose comme un nouveau défi au projet d’unité européenne. Les États membres devraient se prononcer définitivement sur la question durant les semaines à venir.

À quelques semaines de la COP 21, enjeu planétaire, il apparaît que l’Europe ne soit pas la mieux armée pour lutter dans le domaine climatique. Bien que les efforts entamés méritent d’être salués, la régulation européenne en matière environnementale demeure extrêmement jeune, peu adaptée aux réalités du terrain et soumise aux aléas politico-économiques. Un élément est toutefois clair : l’environnement est plus que jamais un sujet de cristallisation dont le traitement aura un impact certain sur l’organisation juridique et politique de l’Europe de demain.