Santa Cruz, made in Andalusia
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Jane MeryVéritable incarnation de la richesse culturelle, des monuments, de l'histoire et de la cuisine exquise de l'Espagne… Le quartier touristique de Santa Cruz perd peu à peu son âme dans un dédale d’échoppes et d’hôtels.
L'après-midi, au moment où les habitants de Séville interrompent habituellement leur travail pour la traditionnelle sieste, les ruelles étroites et les petites places romantiques du centre de la ville ne se vident pas pour autant. Ici, il y a sans cesse du bruit et du monde ! De cette confusion, les Espagnols ne sont pas les seuls responsables : il suffit d’écouter quelques secondes les conversations échangées autour d'une des fontaines pour entendre la diversité des langues européennes.
« Les habitants de Séville se promènent souvent dans ce quartier. Pourtant ici, les touristes sont plus nombreux qu'eux et ce sont eux justement qui semblent apprécier le plus ce lieu », explique Justo Gonzalez, responsable de la communication au conseil municipal de Séville. Sans le moindre doute, le patrimoine et l'histoire insolite de cet ancien quartier juif, dont l'épanouissement a décliné sous la domination musulmane en Espagne (autour du 11 et 12e siècle), est l’aspect le plus attractif de Santa Cruz. Ici, l’épreuve du temps se cache presque dans chaque recoin, dans les maisons antiques, les anciennes synagogues, les petites églises et les ruelles.
Les élus pouponnent
A la mairie de Séville, on s'arrange parfaitement de cela. C'est précisément dans l'histoire de ce lieu que sommeille la beauté de ce quartier pour Justo Gonzalez qui souligne que « la municipalité s'efforce de conserver le caractère originaire de Santa Cruz et n'envisage pas d'entamer le moindre changement »
: « Nous nous soucions du quartier et faisons tout pour le maintenir dans un état convenable. Nous portons une grande attention à la propreté, à l'éclairage. Nous encourageons aussi les habitants et commerçants à commencer à prendre des initiatives conjointes concernant l'entretien du quartier. »
Pourtant, Santa Cruz ne serait pas si exceptionnelle grâce aux « soins particuliers » de la ville seule. Justo Gonzalez affirme que « les pouvoirs publics participent activement aux principaux marchés du tourisme nationaux et internationaux, pendant que nous essayons de promouvoir la ville à l'extérieur. » Au cours des vingt dernières années, de nombreux touristes se sont tout simplement installés dans le quartier, sous le charme du lieu. Du coup, à Santa Cruz, presque toutes les maisons appartiennent à ces personnes, des étrangers convertis en négociants locaux ou des propriétaires d'hôtels. Malgré les efforts des pouvoirs locaux pour conserver Santa Cruz dans son état initial… « Actuellement, Santa Cruz est devenue un lieu commerçant avec de nombreux magasins de souvenirs, des hôtels et autres attrape-touristes », observe le membre de la municipalité.
Et de fait, les bâtiments ont été transformés en de modernes et luxueuses maisons familiales. Les nouveaux venus sont avant tout de riches habitants de Madrid et des étrangers qui ont décidé d'acheter un appartement supplémentaire dans ce quartier connu de Séville. Malgré la popularité de Santa Cruz, la nostalgie d’un quartier plus originelle plane sur les échoppes des commerçants.
Flamenco, un art qui fait recette
Mais voilà, le tourisme est un vrai business qui rapporte. Un des meilleurs exemples sont les bains arabes Aire de Sevilla. « Nous avons de 200 à 300 clients par jour », révèle le manager de ce lieu très fréquenté. Aire de Sevilla, ce n'est pas seulement les bains. Installés dans l'un des manoirs du 16e siècle de la ville, une décoration intérieure soignée, des arrangements raffinés, des bains et des massages : tout se combine à la perfection pour faire de Santa Cruz un oasis de luxe pour personnes aisées.
Mais le caractère typique du quartier Santa Cruz vient également du flamenco. Cet art est précisément lié à cette partie de la ville. Alfredo, responsable des réservations lors des représentations de flamenco à Los Gallos, sur la place de Santa Cruz, la décrit comme « le marché du flamenco » : « Il y a encore trois représentations de flamenco dans le quartier. Pourtant celles-ci rappellent davantage les spectacles de maisons culturelles plutôt que de vrais représentations. Pendant notre spectacle, nous nous efforçons de rendre la véritable âme du tablao flamenco. »
Dans la salle de la représentation, on reconnaît rapidement dans la foule les visages de touristes venus du Japon, de Chine, ou de Corée du Sud, ainsi que des Italiens et des Français. Bien que les représentations aient lieu environ trois fois par jour, la salle est chaque fois presque pleine à craquer, et la foule, le manque de places assises, ou encore l'atmosphère étouffante de la salle, ne dissuadent presque personne. Une seule chose unit tous les spectateurs : le désir d'écouter un moment avec attention, l'âme des musiciens et de se délecter de leur passion. Du vieux Santa Cruz, il ne reste déjà plus que le souvenir. Est-ce que les habitants originaires de ce coin luxueux de Séville se trouvent en minorité et devront défendre leurs droits comme les habitants de Venise récompensés par le business du tourisme ?
Translated from Santa Cruz - magiczna esencja Andaluzji o komercyjnym zabarwieniu