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Ruth Negga, star sans étiquette

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Irlandaise d’origine éthiopienne, Ruth Negga, 23 ans, a été sélectionnée comme l’un des meilleurs espoirs du cinéma européen lors de l’édition 2006 de la Berlinale. Une actrice théâtrale et métissée.

Novembre en Andalousie : ciel de plomb et météo maussade. Le Festival du film européen de Séville [qui se déroulait du 3 au 11 novembre] s’apprête à présenter aux professionnels du cinéma, au public et à la presse internationale les ‘Shooting Stars’ 2006. Soit une sélection de 19 talents du cinéma européen en provenance des quatre coins du continent, déjà présentés à la Berlinale par la European Film Promotion (EFP) en février dernier. Pour figurer parmi ce vivier prometteur, mieux valait avoir gagné un prix pour un rôle récent ou être apparus dans un film ayant eu un succès national ou international notable.

Bon endroit, bon moment

Après Cécile de France ou Daniel Brühl, Ruth Negga fait partie de ces espoirs du grand écran européen. Née à Addis Abeba d’une mère irlandaise et d’un père éthiopien, elle vit depuis à Dublin où elle a suivi des cours d’art dramatique au Centre Samuel Beckett du Trinity College avant de brûler les planches irlandaises.

A 20 ans, elle est nominée dans la catégorie ‘Meilleur Espoir’ lors de la cérémonie des Olivier Awards 2003 [l’équivalent britannique des Molière] « Lorsque j’ai su que je n’avais pas gagné, j’ai emporté les couverts du dîner de gala chez moi » se souvient-t-elle avec un sourire espiègle. Très vite, elle s’attire les faveurs de la critique pour l’éclectisme de ses rôles, dans des pièces tant classiques que contemporaines. «Au théâtre, on te paye une misère alors que c’est un métier très difficile qui exige un engagement total, aussi bien mental que physique et émotionnel ».

A propos de son Afrique natale, qu’elle a quittée à l’âge de quatre ans, elle affirme qu’ « en Ethiopie, la misère est partout, on peut littéralement la ressentir à chaque coin de rue » avant d’ajouter : « je ne comprends pas qu’on puisse rester assis bien au chaud dans nos maisons de classe moyenne à regarder la télévision sans rien faire et en même temps à critiquer des gens comme Bob Geldoff et sa campagne pour venir en aide à l’Afrique. »

Negga souligne que sa double culture lui autorise une plus grande liberté artistique : « je n’ai pas peur que l’on m’affuble d’une étiquette, car jusqu’à présent, il n’y avait pas de rôle pour les personnages métisses en Irlande. Au contraire de l’Angleterre, » déclarait-elle dans un entretien au quotidien britannique The Guardian.

C'est dans le drame social ‘Capital Letters’ (2004) réalisé par Ciarán O’Connor, que Negga fait ses premiers pas sur le grand écran en tenant le rôle principal de Taiwo, jeune immigrée sans papiers et en fuite. Elle participe ensuite au tournage d’ ‘Isolation’, de Billy O’Brien et endosse d’autres rôles secondaires. « Lorsque l’on est face à la caméra, c’est plus difficile, car il faut se préoccuper d’une foule de détails techniques,  » explique t-elle. « Il faut s’habituer aux premiers plans et au fait que les appareils te suivent ».

Cette année, Ruth Negga participe à son premier rendez-vous cinématographique à Séville. « Un tel festival est une occasion de rencontrer des personnes extrêmement intéressantes et c’est une opportunité formidable pour la promotion des jeunes acteurs », glisse t-elle. » Dans le monde du cinéma, il faut avoir de la chance et se trouver au bon moment au bon endroit,  » résume t-elle.

Nominée pour les Oscars Européens

Elle y présente le film ‘Breakfast on Pluto’, réalisé par son compatriote Neil Jordan, 56 ans. Le réalistateur de ‘The crying game’ ou d’’Entretien avec un vampire’ ne tarit d’ailleurs pas d’éloge sur sa recrue. «Je ne savais pas grand-chose d’elle lorsqu’elle s’est présentée à l’audition, mais après l’avoir vue jouer pendant une minute, j’ai décidé de modifier le scénario pour lui donner un rôle dans le film », a-t-il notamment déclaré.

‘Breakfast on Pluto’, nominé dans la catégorie ‘Meilleur film’ par l’Académie du Cinéma Européen (EFA) raconte l’histoire d’un jeune orphelin travesti, parti à la recherche de sa mère dans le Londres des années soixante-dix et de l’IRA. Cette œuvre originale, aux accents kitsch, mélange la haute couture et le glam-rock et se voit comparée par Neil Jordan au ‘Candide’ de Voltaire : « Le protagoniste est persuadé que tout se termine toujours bien avant de réaliser que ce n’est pas toujours le cas. »

Dans ce long métrage, Ruth Negga joue le rôle de Charlie. « Je suis paralysée par la joie. C’est un film qui vous prend par les sentiments. Le scénario est fantastique ! En outre, il y a une merveilleuse distribution d’acteurs Irlandais », souligne la jeune actrice en faisant référence à Liam Nelson ou encore Stephen Rea qui partagent avec elle l’affiche du film. « Les acteurs anglophones se tournent généralement vers le marché américain,  » explique Negga avec un large sourire. « Je ne crois que cela devrait en être ainsi», reconnaît celle qui avait pourtant déclaré devoir son désir de cinéma à « des films américains tels que ‘Bodyguard’ ».

Almodóvar

Portée par son enthousiasme d’être en Espagne, Negga fait rapidement part de son admiration pour les réalisateurs européens et exprime son désir de « travailler avec Almodóvar. Même si je sais que tout le monde le dit, ses films reste un véritable culte voué à la femme. Les grands rôles sont toujours pour les femmes et il n’y a pas de clichés. On sort de la norme. » La jeune actrice, enthousiaste, confesse adorer des films tels que ‘¡ Jamón, Jamón !’ [Jambon, jambon !], non sans confondre le nom du réalisateur. Lorsqu’un photographe la corrige, elle rougit et porte sa main à sa bouche, en s’excusant du lapsus qu’elle vient de commettre. Il est des oublis pires que celui-là. Ruth Negga espère pouvoir continuer à donner de bonnes raisons pour que l’on se souvienne d’elle.

Translated from Ruth Negga, estrella sin etiquetas