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Roms à Hambourg : tu dois rentrer… volontairement !

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Société

A Hambourg comme dans toute l’Europe, les autorités mettent la pression sur les Roms afin de leur faire accepter l’idée d’un « retour volontaire ». Menace, pression, isolation : comment parler de retour volontaire quand on est obligés de partir ? Cafebabel.com s’est rendu à Billstieg et ont rencontré de nombreuses familles Roms ayant fui les discriminations en Serbie et en Macédoine qui se battent aujourd'hui pour, au contraire, le droit de rester en Allemagne.

Ghetto Billstieg

Billstieg. Ghetto de pauvres, ghetto d’étrangers. Loin des yeux de la population hambourgeoise, les familles roms, irakiennes, afghanes s’entassent dans des appartements vétustes. A Billstieg, il ne passe qu’un bus par heure pour rejoindre les commerces et le centre-ville. Les couloirs sentent mauvais et les poubelles trônent ouvertes à l’entrée du complexe. 500 personnes résident entre ces murs de briques, privées d’un réel contact social avec la population allemande.

La famille d'abord

Marija et Muci sont arrivés durant l’été 2010 à Hambourg avec leurs trois enfants. Ils ont fui la Serbie devant le peu de perspectives qu’ils avaient dans leur propre pays, exclus en tant que roms. Toute la famille parle un allemand impeccable : c’est la seconde fois qu’ils viennent à Hambourg. Salijana, Marija et Tradjko sont venus au monde ici, aux côtés des nouveau-nés allemands. Pourtant aujourd’hui, ils sont menacés d’expulsion, leur demande d’asile ayant été rejetée, considérée « sans fondements ».

La vie devant soi

Sadja attend son cinquième enfant. Cette fois-ci, ce sera un garçon. Le deux-pièces que la famille occupe au dernier étage de l’immeuble résonne continuellement des cris des fillettes. Tous les jours, elles s’en vont à l’école du quartier. Djevrija, l’aînée, traduit déjà du romanes à l’allemand pour ses parents au supermarché et parle de sa nouvelle classe les yeux pleins d’éclats. En Macédoine, Sadja et Sebastian ramassaient les bouteilles et les détritus afin de nourrir la famille et n’avaient plus les moyens de payer l’école à leurs 4 filles. L’accès au marché du travail leur était de facto impossible, ceux-ci étant roms.

Par delà les clichés

Sadja porte le nom de sa mère. Dans les familles roms, cela signifie qu’elle sera la dernière fille. La photographie qu’elle tient entre ses mains, a été prise lors d’un mariage en Macédoine, alors que la benjamine ne savait encore à peine marcher. Derrière elle, sa mère a étalé sur la moquette rouge, tous les clichés que la famille a réussi à emmener avec elle en Allemagne.

Laissez passer, les p'tits papiers

Dans le bâtiment d’en face, Jasa nous accueille avec un sourire las. Elle ne dort plus la nuit malgré les cachets que lui a donnés le médecin. Elle a peur de la nuit. Elle a peur de la police. Elle a peur de devoir rentrer dans un pays qui la rejette. Pour se rassurer, elle étale à même le sol tous les documents qu’elle possède. Le paradoxe ultime du sans-papier : Jasa croule sous la paperasse mais n’a aucun droit de séjour valable.

Souvenirs du présent

Dans le livre qu’elle brandit à la lumière, Barka a retrouvé une photo d’elle et de son fils âgée de 20 ans. A la vue du cliché, son visage s’éclaire comme par enchantement. Au début des années 90, une photographe avait réalisé un travail documentaire auprès des demandeurs d’asile à Hambourg. Barka en faisait déjà partie. 20 ans plus tard, retour à la case départ, retour au centre d’accueil, entassés à 5 ou 6 dans une pièce.

Se cultiver

16h, en plein milieu de la semaine. Les familles roms et les groupes associatifs qui les soutiennent se sont réunis dans une rue du centre-ville d’Hambourg afin de sensibiliser l’opinion locale à la précarité de leur situation. Sur le sol, l’Allemagne est représentée par de la terre. Les jeunes roms viendront planter des carottes dans cette terre noire avec des marteaux afin de symboliser leur volonté de « prendre racine en Allemagne » (« Jugendliche schlagen Wurzeln in Deutschland»).

Devoir de mémoire

Les familles roms récoltent de plus en plus de soutiens, notamment du côté de l’Eglise protestante locale. Un dimanche de printemps, une paroisse des environs d’Hambourg invite à un rassemblement au mémorial de Neuengamme, ancien camp de concentration nazi. Les enfants reconnaissent le mot « Roma » inscrit sur la pierre en souvenir du demi-million de roms exterminés à cette période et déposent des fleurs des champs.

Soutien de choeur

En ronde devant le mémorial, des représentants de l’Eglise prennent tour à tour la parole en soutien aux familles roms. L’évêque d’Hambourg a même fait parvenir un message en faveur d’un droit de séjour pour celles-ci. Muci tourne ses paumes vers le ciel et entame un « Notre Père » en langue rom, repris en chœur par le public.

Le mur des justes

Sur les murs rouges du lieu commémoratif de Neuengamme, les noms des victimes de la barbarie nazie s’affichent par dizaines de milliers. Les adolescents de Billstieg tentent de déchiffrer les inscriptions et repèrent immédiatement les noms d’origine rom. Le lieu, habituellement désert et silencieux résonne soudain des cris des enfants qui jouent à cache-cache.

Le droit de vivre...simplement

Sadja est venue au mémorial accompagnée de ses 4 filles, malgré la venue imminente du bébé qu’elle porte. Elle est fatiguée mais sourit toujours sur les photos. Elle ne sait pas comment la suite se passera. Elle ne sait pas si son fils, qui naîtra en Allemagne, aura le droit de grandir dans ce pays. Elle ne sait pas comment la famille subsistera, si on les force à retourner en Macédoine. Elle aimerait juste avoir le droit de vivre simplement là où elle le souhaite.