République tchèque et Union européenne : désamour toujours
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La présidence tchèque de l’Union européenne devait signer « le retour des Tchèques en Europe » et la République tchèque allait, enfin, parler à nouveau de l’Europe… Malheureusement, l’inverse se produisit : après de multiples pannes, le gouvernement de Mirek Topolánek, le président de l’UE, est tombé et avec lui l’espoir d’une présidence réussie.
Depuis, c’est l’Union européenne qui parle de la République tchèque et aujourd’hui, seuls 20 % des Tchèques affirment vouloir se rendre aux urnes le 5 et 6 juin à l’occasion des élections.
Alors que l’intérêt pour l’Europe était presque nul en République tchèque au cours des cinq dernières années, en janvier 2009, l’Union connut un certain regain d’intérêt avec l’avènement de la présidence tchèque. Dans un sondage du quotidien Lidové Noviny, 60 % des Tchèques se déclaraient alors « de fiers Européens » et l’hebdomadaire Respekt clamait : « Le début de notre présidence a été un succès. » Puis, un soir de printemps, fin mars, le Premier ministre Mirek Topolánek posa la question de confiance à l’Assemblée nationale et la perdit. Depuis, personne en Europe ne semble vraiment prendre au sérieux la République tchèque ni son nouveau gouvernement « technique » de transition, qui gère les affaires courantes jusqu’aux élections législatives anticipées en octobre. Les Tchèques se sont aussi à nouveau détournés de l’Europe : ces derniers jours, rares ont été les Unes de journaux à parler des élections de juin prochain.
Ces querelles au niveau national semblent surtout avoir provoqué la lassitude des Tchèques pour leur classe politique. Les luttes entre les partis prennent un tour de plus en plus violent et les débats à l’assemblée se terminent souvent avec des insultes du type « débile mental » ou « petite crapule ». Les extrêmes ont resurgi, d’abord sous la forme de l’extrême gauche du parti communiste (KSCM). Dans ce sens, la déclaration populiste du leader social-démocrate Jiri Paroubek de vouloir inclure les « communistes au gouvernement, s’il le fallait » fait déjà craindre le pire. D’autant plus qu’à la faveur de cette dérive populiste émerge également une extrême droite inquiétante, celle de la Delnicka Strana, le « Parti des ouvriers », composé de néo-nazis et de skinheads qui, surtout dans le Nord-Ouest du pays, se rassemble le week-end pour passer à tabac des Roms ou des jeunes issus de l’immigration.
Seule bonne nouvelle devant ce scénario sinistre : les slogans anti-européens ne semblent plus avoir la cote en République tchèque. Si le parti communiste y a souvent eu recours, des slogans comme « Pour le peuple, contre l’Europe » ont disparu de son programme en vue d’une éventuelle coalition avec les sociaux-démocrates. Par ailleurs, la déclinaison tchèque du parti Libertas du millionnaire irlandais Decan Ganley n’obtiendra que 0,8 %, selon un sondage publié par la télévision tchèque le 5 mai, qui donne aussi pour vainqueurs du scrutin le parti social-démocrate CSSD, avec 31 % des suffrages, et les communistes du KSCM avec 12 %. Il reste à savoir quel type de légitimité pourront avoir ces résultats en raison du taux d’abstention.
La publication de cet article est le fruit d'un partenariat entre Eudebate2009.eu et le blog ARTE - L'Europe en débat - édité par les élèves du Collège d'Europe à Bruges. Ce blog aborde en français et en anglais l’actualité européenne sur une base thématique. Son équipe, composée d’étudiants, assistants et professeurs du Collège, privilégie dans ses analyses la comparaison, la mise en perspective et le recul.