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Recherche colocation avec le Vatican

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SociétéPolitique

Le Vatican et le diocèse romain, qui gère 338 paroisses, 247 écoles et 558 établissements d'enseignement secondaire catholique, conditionnent largement la vie de la capitale italienne.

Le 24 novembre dernier la presse italienne annonçait la « réouverture par le Tribunal pénal de Rome de l'enquête sur le nombre élevé de cas de leucémie et de lymphome autour de Cesano ». Une ville située à la périphérie de la capitale et où sont installés les studios de Radio Vatican. Ambiance...L'empreinte séculaire du catholicisme sur la Ville Eternelle ne manque pas de susciter les commentaires.

Rome, propriété du Vatican

« Le Vatican possède entre 25 et 30 % des immeubles du centre ville, soit un portefeuille immobilier estimé à près de 5 000 millions d'euros », assure Mario Staderini, responsable du Parti radical dans la circonscription du centre de Rome. « Si nous y ajoutons les 2 000 ordres religieux dont le siège se trouve à Rome, cette 'monarchie absolue' qu'est le Vatican contrôle le marché immobilier. Ainsi, 25 % de la place Navona appartient à la Obra Pía [institution ecclésiastique catholique en Espagne] espagnole », souligne-t-il. Le siège même du Parti radical, qui a su maintenir une « alliance anticléricale » avec les socio-démocrates, est la propriété d'une congrégation de religieuses bénédictines.

Francesco Paoletti, responsable de l'Union des athées et des agnostiques rationalistes de Rome (l'UAAR) explique que son organisation « lutte pour que soient enfin retirés les crucifix des édifices publics ». « À Rome », ajoute-t-il, « même si les paroisses n'exercent pas un contrôle absolu, les gens se rendent à l'église de leur quartier pour chercher de l'aide, voire des recommandations pour un emploi. »

Ces jobs sont issus pour la plupart du secteur touristique, « dont l'acteur principal est encore et toujours le Vatican », reprend Mario Staderini. Selon lui, « au cours du Jubilé 2000, les couvents sont devenus de véritables refuges et pas seulement pour les pèlerins. Et par-dessus le marché, le Vatican reste exonéré d'impôts sur ses activités immobilières. »

L'Église est partout

« Pour les Romains, la notion de république reste très subjective. Ils ont leur propre roi : le Pape », assure ironiquement Fabio Mastretta, un Sicilien de 29 ans qui vit à Rome depuis dix ans. Nous sommes au 'Campo dei fiori', la seule place dans cette ville de 2 600 000 habitants à ne pas posséder d'église. En lieu et place, une sinistre statue de Giordano Bruno, penseur italien de la Renaissance, condamné au bûcher pour hérésie.

Mastretta travaille dans un ministère. Difficile dans cette ville où les églises sont légions, de trouver un édifice gouvernemental. La plupart des ministères sont situés à l'extérieur du centre, comme pour ne pas empiéter sur le bien d'autrui. « Ici, vous ne verrez pas souvent de gens vêtus de tailleurs ou de costumes sortant de ministères ou de sociétés financières et discutant entre eux de leurs réunions ou de leurs voyages d'affaire », explique ainsi Alice Kiandra Adams, professeur d'anglais de 36 ans arrivée d'Australie il y a un an et demi.

Rien à voir avec l'ambiance des cafétérias du Paseo de la Castellana à Madrid et ou de la rue de Solférino à Paris, où sont installés tant de ministères. A Rome, il n'est pas rare de voir des groupes de religieuses traversant les avenues ou des prêtres à l'allure aristocratique descendant de luxueuses Mercedes pour pénétrer dans de quelconques chapelles. Dans la capitale italienne, impossible d'imaginer un quartier gay comme le Soho londonien, le Marais parisien ou le Chueca madrilène.

Coexistence religieuse

Micaela Vitale travaille au Centre culturel hébraïque, dans le quartier du Trastévere. Pour elle, « il est pourtant simple de ne pas être catholique à Rome ». « Les juifs de Rome n'ont aucun problème pour organiser des cérémonies religieuses, que ce soit avec les différentes administrations ou avec l'Église catholique », explique-t-elle.

La communauté musulmane non plus n'a rencontré aucune difficulté pour ériger à Rome la plus grande mosquée d'Europe pouvant accueillir jusqu'à 3 000 fidèles. Adams l'Australienne, qui est catholique, ne ressent pas à Rome « un goût pour le spirituel plus prononcé que dans n'importe quelle autre ville ».

La présence de l'Église catholique serait-elle moins oppressante que l'on se plaît à le croire ? « Bien sûr que non », s'empresse d'ajouter Vitale. « Beaucoup de pèlerins font le voyage jusqu'à Rome. Individuellement, ils ne causent aucun dérangement. L'ennui, c'est qu'ils débarquent par centaines dans d'énormes cars qui paralysent la ville entière ! Le mercredi, jour de l'audience papale, il devient carrément impossible de circuler dans Rome », reprend-elle.

Art et spiritualité

Dimanche matin. Les pèlerins prennent d'assaut la place Saint-Pierre à l'heure où le Pape récite l'Angelus. Un magnifique soleil illumine cette chaude journée d'hiver. La foule est beaucoup plus nombreuse qu'au stade de Wembley un soir de match. Pour autant, le silence règne partout. À l'intérieur de la basilique Saint-Pierre de Rome, 1 500 fidèles reprennent en chœur des psaumes et autres chants eucharistiques, enveloppant littéralement les curieux de passage. L'encens pour l'odorat, les gammes pour l'ouïe et les dorures pour la vue. « L'art et la spiritualité qui se dégagent du Vatican sont un bienfait pour la société », soulignent Pilar Domínguez et Antonio Sintas, deux pèlerins espagnols, sous le choc d'avoir pu assister à une messe dans la basilique Saint-Pierre. « Nous aimerions avoir le Vatican chez nous », concluent-ils d'un air pénétré.

Crédits photos : Piazza Navona : Pedro_qtc/Flickr ; Mosquée de Rome : Metaphoto/Flickr : Intérieur cathédrale de San Pedro: Judit Járadi

Translated from Roma: el reto de sobrevivir al Vaticano