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Quel futur pour l'Union européenne ?

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Laurent Pechamat

Bruxelles

Après six années de guerre par procuration en Syrie et la percée fulgurante du groupe terroriste Daesh, une crise majeure frappe aujourd'hui l'Union européenne. Réfugiés, contrôles aux frontières et désunion sont au coeur des préoccupations actuelles. Dans ce contexte difficile, l'UE sera-t-elle capable de conserver ses valeurs sociales et morales ?

La guerre en Syrie, la violence continuelle au Yémen, ainsi qu'au Proche-Orient ont mis l'UE sous pression en mettant à l'épreuve les grands principes de solidarité et d'humanité sur lesquels elle a été fondée. Les deux guerres mondiales, et plus tard les guerres yougoslaves ont engendré le déplacement de beaucoup de personnes, créant un flux migratoire massif vers l'Europe. Mais aucune vague migratoire n'a jamais été aussi importante que celle dont nous sommes actuellement les spectateurs sur le vieux continent.

Selon la Commission Européenne, 147 000 migrants sont arrivés dans l'UE au cours du premier semestre 2015, et 890 000 autres sont arrivés au cours du deuxième semestre, principalement en Grèce et en l'Italie. Au cours de ce dangereux périple, beaucoup sont morts en mer tandis que d'autres ont été exposés à des réseaux criminels de trafiquants en Méditerranée. Depuis le début 2016, les rapports de l'Organisation Internationale pour les Migrations (OIM) estiment que 31 244 migrants et réfugiés sont arrivés en Grèce par la mer. Martin Schulz, le président allemand du Parlement Européen, reconnaît que la menace terroriste ainsi que la crise continue des réfugiés soumet l'UE à rude épreuve en matière de solidité et de stabilité. De plus, Mr Schulz a admis : "Personne ne sait ce à quoi nous devrons faire face au cours de cette année."

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Tout comme la Suisse, la Norvège, le Danemark, l'Allemagne et l'Autriche, la France a temporairement remis en place les contrôles aux frontières, dans le but premier de limiter l'afflux de réfugiés. Mais seule la France a fermé ses frontières pour des raisons de sécurité, tandis que les autres pays l'ont fait à cause des flux migratoires. Pendant ce temps, le Commissaire à l'Immigration Dimitris Avramopoulos a indiqué que la crise des réfugiés s'aggravait. Des voix xénophobes s'élèvent parmi les pays de l'UE, ouvrant une voie dangereuse à une possible désintégration, mais qui s'est d'ors et déjà matérialisée sous la forme de murs, de clôtures en fils barbelés et de contrôles aux frontières.

La Commission travaille sur une série de mesures permettant de mieux traiter cette crise galopante. Pour commencer, le plan de réinstallation des réfugiés sera rééxaminé puisque beaucoup de pays - notamment le Groupe de Visegrád - ont exprimé leur désaccord et leur refus de participer au système de quota. Le Règlement Dublin II, qui indique que les migrants doivent demander asile dans le premier pays européen qu'ils atteignent, est mis sur la table pour une révision prochaine : en effet, la plupart des délégués européens ont finalement admis l'échec de ce règlement. De plus, une liste commune des pays sûrs est en cours d'élaboration, afin de déterminer la priorité de chaque demande d'asile. L'établissement de points sensibles, visant à soutenir les pays lourdement impliqués tels que l'Italie et la Grèce, a été mis en place afin de faire face au flux quotidien de réfugiés. Cependant, Laura Ferrara, membre du Parlement Européen ainsi que du groupe "Europe de la Liberté et de la Démocratie Directe", souligne le manque d'efficacité de ces "points de soutien" : "En Italie, ces points ne fonctionnent pas, le processus d'identification est trop lent. Les gens dont la demande d'asile a été refusée ne sont ni aidés, ni même raccompagnés à la frontière" a-t-elle ajouté.

Désunion de l'Union

Le tumulte grossit, et les États Membres réagissent dans le désordre. Certains pays de l'Espace Économique Européen (EEE), tels le Danemark et la Suisse, incitent à une condamnation internationale ; on le sait, les confiscations d'argent et de bijoux imposées aux réfugiés par les autorités de ces deux pays ont été pointées du doigt. Le 26 janvier, le gouvernement danois votera un projet de loi sur cette problématique, qui a suscité un engouement assez inédit chez les législateurs. Comme pour la Suisse, l'argent confisqué sera utilisé pour compenser le coût des demandes d'asile. Selon Politico, le Secrétaire d'État aux Migrations suisse a expliqué que "si une personne repart volontairement dans les sept mois, alors elle peut reprendre son argent avec elle. Sinon, l'argent couvre les coûts engendrés".

Dans le même temps, une proposition de loi est en cours de préparation au Parlement dont la résolution a pour but "de suspendre les obligations de répartition pour la Suède en tant qu'État Membre pour une période d'un an." Cette proposition répond à une requête formelle de la Suède, faite début décembre 2015 : toujours dans l'obligation de réinstaller plus de 5 000 personnes sur son territoire, elle a ainsi tenté de stopper l'afflux de réfugiés. La Suède, tout comme l'Allemagne, figure en effet en très bonne place dans les pays préférés des migrants. Jusqu'aux événements qui se sont déroulés à Cologne lors du Nouvel An, la politique d'immigration d'Angela Merkel a d'ailleurs été plutôt accueillante : même si Mme Merkel a été critiquée en Allemagne pour avoir été trop tolérante, le directeur de l'Organisation Internationale pour les Migrations William Lacy Swing a exprimé son admiration profonde pour Angela Merkel, au regard de son attitude solidaire et compatissante envers les réfugiés.

Ainsi, l'UE fait face à un défi existentiel majeur - sans doute le plus important depuis sa fondation. La crise migratoire à ses frontières, la montée de l'euroscepticisme au sein de pays influents aussi influents que le Royaume-Uni et la France, ainsi que la question de la séparation de la Grèce de l'UE inquiètent, et les leaders européens ont décidemment beaucoup de travail devant eux. Le plus urgent semble être de trouver une solution pour ces milliers de réfugiés qui frappent à nos portes, et de trouver un moyen adéquat de les réinstaller dans des conditions appropriées. Les barrières et les tensions ont beau avoir divisées l'UE, sapant sa capacité d'action, tous les États Membres de l'UE restent tenus par leur devoir commun de promouvoir les valeurs et les principes fondateurs de l'UE. Si ce n'est l'Europe, qui va aider les réfugiés ? Les États du Golfe n'en prennent aucun, et c'est à l'Europe, en coopération avec des Etats tiers, de garantir la dignité et l'aide sociale à ces êtres humains fuyant la guerre et le conflit. 

Translated from What future for the European Union?