Quand YouTube vote WOTE
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Walk Off The Earth est un phénomène débarqué de la planète YouTube. Mais avec la récente sortie de leur album et une tournée européenne, ce groupe canadien veut prouver qu’il a plus à offrir qu’une petite centaine de millions de clics. Ce qui valait bien 5 questions.
Essayer de comprendre Walk Off The Earth, c’est plonger dans le monde de YouTube, de Facebook et de la musique qu’on créé, écoute, copie, remixe, transmet, poste sur son Mur. Bref, un aperçu des enjeux existentiels de la musique et des artistes aujourd’hui. Un quotidien pour une génération entière. Un obscur mystère pour beaucoup d’autres. Dans ce monde, la vidéo « Rewind YouTube Style 2012 » est plus ou moins l’équivalent du Zapping de l’année de YouTube. Une tentative de résumer des milliards de vidéos postées en 2012. Et qui apparaît sur la première image de ce clip ? 4 types et une fille en train de jouer sur une seule guitare. Avant que celle-ci ne soit détruite par Psy, le chanteur sud-coréen qui a fait danser la planète entière sur la chorégraphie de Gangnam Style, vue la bagatelle d’un milliard de fois l’an dernier.
Digitalement Wote
La vidéo-phare de Walk Off The Earth (puisque c’est d’eux dont on parle) - une reprise de la chanson « Somebody that I used to know » du chanteur belge Gotye - a quant à elle obtenu 150 millions de clics. Un score qui a tout simplement fait exploser la carrière du groupe canadien. Avec cette vidéo qui s’est répandue comme une trainée de poudre sur Internet, Gianni, Sarah, Joel, Mike et Ryan sont devenus des stars du très petit écran. De clic en clic, de posts en liens, les vidéos défilent. Des reprises des chansons qui inondent non plus la bande FM, mais les IPods, comme « Someone like you », hit planétaire d’Adele ou « One day – Reckoning Song », le remix déjà culte du morceau d’Asaf Avidan.
La marque de fabrique de ces vidéos ? Des instruments qui volent de main en main pour offrir aux hits une nouvelle ligne mélodique, souvent étonnante.Les propres chansons de Walk Off The Earth passent donc au second rang sur YouTube. Ce, malgré de petits bijoux comme le clip de « Red Hands ». Mais les cinq multi-instrumentalistes veulent désormais profiter de leur nouvelle notoriété pour combler ce déséquilibre. Après la récente sortie de leur nouvel album R.E.V.O. (Realize Every Victory Outright), les 5 membres ont enchaîné avec une tournée de trois semaines en Europe. L’occasion de rencontrer Sarah et Joel à Berlin, quelques heures avant leur concert.
cafebabel.com : A quoi ressemblait votre carrière avant cette fameuse vidéo de « Somebody that I used to know » ?
WOTE : Chacun de nous faisait partie de groupes différents avant que nous nous retrouvions. Nous avions aussi déjà travaillé sur YouTube, notamment en mettant des vidéos de concert sur Internet. Mais c’est Gianni qui a changé notre façon de travailler en nous incitant à faire des vidéos explicitement destinées à YouTube. Aller directement vers les fans et voir comment ils réagissent.
cafebabel.com : Comment voyez-vous le changement qui s’est passé pour vous avec la vidéo de « Somebody that I used to know » ?
« S’il y a des millions de personnes sur YouTube, pourquoi ne pas aller là-bas ? »
WOTE : On a adoré cette chanson et on a vu le potentiel que cela représentait. On a fait la vidéo en une nuit, en une très longue nuit. Et le lendemain, tout avait changé. Cette vidéo nous a ensuite ouvert beaucoup de portes. Dans la musique, tu as besoin du mix parfait et tu ne sais pas exactement ce qui fait qu’une chanson marche ou pas. Une des grandes satisfactions a été aussi de voir la réaction positive de Gotye sur Twitter. Cela développe un esprit de communauté entre les artistes sur Internet.
cafebabel.com : Quelle place prennent désormais les réseaux sociaux et YouTube dans votre carrière ?
WOTE : C’est important d’aller voir les messages, de répondre et d’interagir. Joel est plus sur Twitter, Gianni sur Facebook. Mais nous sommes en ligne tous les jours. Quand j’étais jeune, j’aurais voulu être en contact comme ça avec les artistes et me sentir comme une partie du « mouvement ». Je pense qu’aujourd’hui, c’est extrêmement important pour une carrière. Surtout il faut aller là où sont les gens. S’il y a des millions de personnes sur YouTube, pourquoi ne pas aller là-bas ? Mais c’est important pour nous de rencontrer nos fans, de voir leurs réactions pendant les concerts.
cafebabel.com : Comment réussir désormais à mettre en avant vos propres chansons ?
WOTE : Chaque jour pendant trois mois, nous avons travaillé sur notre album. C’est notre défi aujourd’hui. Passer de « Quel est ce groupe qui a fait une reprise avec une guitare ? » à « Quel est ce groupe avec des chansons originales super cools ? ». Ça a très bien démarré au Canada avec notre chanson « Red Hands ». Ce n’est pas parce qu’on se fait connaître avec une chanson que notre carrière est faite. Il y a des millions de groupes qui apparaissent avec une chanson et qui disparaissent juste après.
cafebabel.com : Avec un public aussi au fait des possibilités d’Internet, n’avez-vous pas peur d’être pris à votre propre piège et que peu aient une version légale de votre CD ?
WOTE : Il y a toujours un public pour acheter des CDs. Nous avons essayé de faire de notre mieux sur ce disque et les CDs sont actuellement en tête de gondole à Toronto. Tant qu’il y aura la possibilité de faire des CDs, nous en ferons. Il y aura forcément des gens qui vont obtenir notre musique de manière illégale. Mais nous faisons confiance à nos fans. Et tant qu’ils viennent voir nos concerts et achètent nos T-shirts, cela nous va aussi.
Photos : © Erin O'Connell & Shawn Van Daele ; Vidéos : « Somebody that I used to know » (cc) « Red Hands » (cc) ThisIsVonni/YouTube