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Proche-Orient : des étudiants britanniques toujours mobilisés

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Société

Les combats dans la Bande de Gaza ont cessé mais pas les sit-in organisés, via des mails et Facebook, dans 21 universités en Angleterre. Les revendications des étudiants : notamment des bourses d’études pour les Palestiniens. Une campagne qui « ne fait que commencer »

En plein week-end, les salles de cours sont calmes à King’s College, l’une des prestigieuses universités de Londres. Pourtant, 25 étudiants sont encore vissés aux bancs d’un amphi transformé en QG de la cause palestinienne. King’s est la quatrième, sur une liste de 21 universités britanniques, a être occupée en signe de protestation contre l’offensive israélienne qui a eu lieu dans la Bande de Gaza en janvier 2009.

Une poignée d’étudiants antimilitaristes se sont d’abord installés le 13 janvier, dans une galerie de la School of Oriental and African Studies (SOAS). L’initiative a été reprise dans la foulée à la London School of Economics (LSE), puis à Sussex University, Oxford et Cambridge. En moins de deux semaines, les « comités d’occupation » ont fleuri dans quinze autres universités. Les étudiants exigent une condamnation de l’action d’Israël, des bourses d’étude pour les étudiants gazaoui et le boycott des produits israéliens sur le campus. À King’s College, l’enjeu est surtout la révocation du doctorat honorifique accordé par l’université au président israélien Shimon Peres, le 18 novembre dernier.

Mugabe, docteur d’honneur

Samedi 31 janvier : trois ambassadeurs du « comité d’occupation » négocient avec Rick Trainor, le principal de l’université et président d’Universities United Kingdom (UUK), l’institution représentative des universités du Royaume-Uni. Les négociateurs déclarent bientôt victoire. Comme à SOAS, LSE ou à Sussex, la direction a donné son accord de principe pour l’attribution de bourses d’étude, une collecte de fonds et l’envoi de matériel à des universités palestiniennes. Pas d’explosion de joie parmi les militants pourtant, le principal n’envisage pas de révoquer le doctorat honorifique. Il a juste accepté de mentionner la polémique dans un communiqué officiel.

«L’occupation est terminée, mais la campagne ne fait que commencer!»

Talha Abdulrazaq, 21 ans, en première année de « war studies », motive la troupe. « L’occupation est terminée, mais la campagne ne fait que commencer. Souvenez-vous que la révocation du doctorat de Mugabe a été obtenue après deux ans de lobbying ! » En juillet 2007, l’université d’Edinburgh avait en effet déchu le président Zimbabwéen, Robert Mugabe, d’un doctorat honorifique attribué 23 ans plus tôt. Ailleurs dans le pays, l’issue des négociations est similaire pour des occupations qui ne dépassent pas deux semaines. Les étudiants organisent comités de suivi et ateliers de travail dédiés à concrétiser les mesures promises. Les universités publient de consensuels communiqués sur Internet, reprenant la déclaration faite par le professeur Rick Trainor au nom des universités du Royaume-Uni : « UUK soutient les appels à résolution du conflit à Gaza et au-delà. Nous sommes particulièrement attentifs au fait que la perte de nombreux civils a eu lieu alors qu’ils se trouvaient au sein d’établissement éducatifs. »

Ken Loach en soutien

Les étudiants britanniques se réjouissent surtout des garanties offertes par leurs facs pour l’attribution de bourses. « Imaginez, nous avons obtenu cinq bourses d’étude, c’est la vie de cinq familles qui va changer là-bas ! », s’enthousiasme Talha. Pour Ibrahim Adwan, un Gazaoui de 28 ans, ancien boursier et aujourd’hui journaliste à Londres, la mesure est symbolique. Selon lui, l’allocation de fonds pèse peu en temps de conflit. « Des bourses d’étude, c’est bien, mais il en existe déjà, et puis à quoi serviront de nouveaux fonds si les étudiants ne peuvent même pas sortir de Gaza ? »

« Ce sont de maigres victoires », concède Simon Englert, 19 ans, militant actif de l’occupation de Sussex. Pourtant, comme ses pairs, il compare la campagne naissante au mouvement anti-apartheid des années soixante. Ce n’est pas l’avis de Rodney Barker, professeur et chef du département de sciences politiques à LSE. Il a assisté avec intérêt à l’occupation de son campus mais pour lui, il faut relativiser, il n’y a rien de semblable à l’activisme des sixties. « Leurs revendications ne sont pas révolutionnaires. Ils ont une façon courtoise de manifester pour influencer des politiques, tout en respectant les termes du système existant. Il s’agit d’une manifestation polie, pas d’une insurrection. »

Les manifestations étudiantes mobilisent peu. Une centaine de personnes sur chaque campus, une minorité des 2, 5 millions d’étudiants que compte le Royaume-Uni. Mais les militants ont bon espoir de voir grossir leurs rangs, avec Internet comme principale tribune. À chaque occupation, des blogs sont alimentés quotidiennement. On peu déjà y lire les messages de sympathie de certaines personnalités comme Noam Chomsky et Ken Loach.