Prix du pétrole et sports collectifs
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Boum, ça y’est, c’est l’Euro ! Trois semaines de concours de T-shirts mouillés et de glorification du sport par les vendeurs de bières et de chips. Trois semaines d’enthousiasmes collectifs et de subtils calculs tactiques. Enfin et surtout, trois semaines pour mettre leur misère à ces #*%¤!@# d’Italiens (Vous ai-je dit que je suis français, au fait ? Ah bon, vous aviez remarqué…)!
Mais en ce moment, il n’y a pas que les footeux qui jouent collectif. Du côté des pêcheurs et des routiers, c’est un peu les championnats d’Europe de la manif’. La raison ? Le prix du pétrole évidemment ! Et comme d’habitude dans cette discipline particulière, c’est la France qui a lancé le mouvement, bientôt suivie par l’Espagne, l’Italie et le Portugal.
Et je les vois d’ici, les euro-béats de service, s’extasier la bouche en cœur : « Oh oui, des manifs européennes, c’est trop bien ! Ahh, l’émergence d’une opinion publique européenne, d’un sentiment continental, c’est bon ! »
Bon, on se calme. Qu’est-ce qu’ils demandent les pêcheurs et les routiers ? Ils demandent des mesures nationales ! Des baisses de taxes, des aides directes etc. Les grands classiques du bon vieux corporatisme d’Etat, quoi !
Et puis aussi ils demandent le gel de mesures écologiques comme les éco-taxes. Parce que tout de même, les manifs de routiers et de pêcheurs c’est un peu l’assemblée générale des Pollueurs réunis !
Alors, les manifs européennes, c’est bon ou c’est pas bon pour l’Europe communautaire ?
Le truc intéressant, c’est que ces mouvements sociaux expriment une préoccupation continentale. Le pétrole, ça augmente pour tout le monde. Et là, que va faire l’Europe ? Va-t-elle renvoyer la balle aux Etats membres en leur rappelant que, attention, ils doivent continuer à respecter le droit communautaire ? Ou va-t-elle prendre des mesures elle-même ?
En fait, le problème qui se pose à nous est le suivant : c’est bien joli de profiter de la hausse des prix des matières premières pour passer à une économie plus durable. Mais les gens qui bossent dans les activités polluantes, on en fait quoi ? En somme, comment on gère la transition ?
Il faut sortir d’un système binaire dans lequel les Etats veulent donner des aides et l’Union européenne refuse systématiquement. C’est cohérent avec le droit des aides d’Etat, mais politiquement ça devient suicidaire.
Ce qu’il faut faire, c’est coordonner les politiques nationales sur ce point. Il faut que la structure et les critères d’aides pour faire face au prix du pétrole soient décidés ensemble.
Ainsi, on pourra interdire toute aide directe et non conditionnée mais autoriser des aides au ferroutage, à la reconversion, ou encore pour l’achat d’équipements moins polluants.
On pourrait également instaurer une sorte de taxe européenne sur les entreprises pétrolières, qui ne se déclencherait qu’à partir d’un certain niveau de prix du pétrole, et qui financerait les aides décidées en commun.
L’objectif de ces réflexions est de permettre de donner une véritable réponse européenne à ces manifestations. Ainsi, pour une fois, l’Europe aurait l’air de réagir rapidement aux événements politiques… Le conflit actuel nous propose une problématique intéressante : Comment mettre en place un programme intelligent qui utilise les prix du pétrole comme une opportunité pour le changement, tout en rassurant les catégories les plus touchées ?
En Europe, on a pas de pétrole, mais on va vite savoir si on a des idées !