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Pour la Grèce, revenez lundi.

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Bruxelles

Le marathon grec pour renégocier la dette est encore loin d’être fini : à la suite d’un Eurogroupe qui s’est soldé par un échec le 11 février, ce fut dès le lendemain au tour du Conseil européen de botter en touche sur le cas hellénique. L’Europe s’est donnée rendez-vous lundi 16 février pour statuer sur le cas grec. 

« Nous ne sommes pas des élèves qui se couchent devant leurs instituteurs, mais des partenaires » a déclaré avec tonitruance Alexis Tsipras hier lors de sa première conférence de presse au Conseil européen. « La Troïka n’est plus » a-t-il plus tard sentencieusement ajouté, poursuivant qu’à partir d’aujourd’hui, la coalition gouvernementale grecque ne communiquera que séparément avec les trois institutions supranationales, à savoir la Commission européenne, le Fonds monétaire international et la Banque centrale européenne, en vue de renégocier les aides octroyées à la Grèce.

À la fois décontracté et déterminé, le nouveau premier ministre grec à la tête de la coalition de gauche Syriza a su imposer son point de vue, ou tout du moins tenir tête aux institutions européennes et à ses homologues européens. Déjà, le 11 février, Athènes avait refusé de signer une déclaration commune à l’issue de l’Eurogroupe, et ce malgré plus de six heures de négociations louvoyantes entre les différentes parties. Le lendemain, la première réunion informelle - qui n’a d’informelle que le nom - des chefs d’Etat et de gouvernement avait lieu au cœur du massif bâtiment Justus Lipsius.

Sans surprise, aux côtés du conflit ukrainien et de la lutte contre le terrorisme, la Grèce était au centre des discussions, même si comme l’a rappelé le président François Hollande, ou encore le président du Conseil européen Donald Tusk, le cas hellénique ne constituait pas l’objet de ce sommet européen. Sans surprise non plus, aucune avancée majeure sur les négociations des conditions d’aide n’a eu lieu. Pour rappel, les Grecs souhaiteraient obtenir un « prêt-relais » auprès de leurs créanciers, afin que l’exécutif athénien puisse honorer ses dettes tout en mettant en branle son programme économique afin d’infléchir les réformes marquées du sceau de l’austérité menées par les gouvernements Samaras et Papandréou.

Mais le temps presse, le plan d’ « aide » administré par la troïka touchera à sa fin le 28 février prochain et l’état grec sera alors à court de liquidité. Un délai d’autant plus bref si l’on considère que certains États membres comptent soumettre la renégociation du Mémorandum à un vote au sein des parlements nationaux, à la Diète nationale de la Finlande ou encore au Bundestag allemand. Quitte à ne pas respecter l’essence de la démocratie, certains États membres en respectent au moins le formalisme.

Et pourtant, l’optimisme règne…

Malgré des résultats en demi-teinte, les dirigeants européens et présidents des différentes institutions se sont montrés à la fois prudents, optimistes et ambivalents. Les commentaires de la chancelière allemande Angela Merkel étaient en l’occurrence très attendus. Celle-ci s’est pourtant montrée assez laconique, affirmant que la Grèce n’a occupé « qu’un tout petit rôle » lors de ce Conseil, renvoyant ainsi la balle à l’Eurogroupe lundi prochain. Elle a cependant confirmé qu’elle et Alexis Tsipras se sont salués chaleureusement, et a qualifié leur rencontre de  « très amicale ».

Toujours du côté allemand, mais du côté institutionnel européen cette fois, Martin Schulz, le président du Parlement européen, s’est quant à lui dit « optimiste » - même s’il a immédiatement minimisé la portée de son propos en précisant qu’il était « optimiste par nature ». A ses yeux, Athènes a besoin de temps et il faut lui en donner. Il a précisé que ce qui l’inquiétait le plus, c’était les relations entre Syriza et Anel, le parti de coalition de droite souverainiste grec.

La palme du discours cryptique et ambivalent revient au président François Hollande - certainement épuisé par 17 heures de négociations à Minsk et au Conseil européen. Il a tout d’abord rappelé qu’il était nécessaire d’entendre le message des Grecs donné lors des dernières élections. Il a aussi fait mention des mesures d’austérité « particulièrement douloureuses » pour le pays. Selon lui, il faut donc écouter le nouvel exécutif grec, mais aussi se souvenir que « ce qui a été emprunté doit être remboursé ».

Lors de la session des questions-réponses, François Hollande a réitéré son discours à double-fond. « Ce qui était important pendant ce Conseil, c’est le dialogue qui s’est installé. Parce qu’à chaque fois qu’il y a un nouveau membre dans ce Conseil, on le regarde. On se demande s’il va changer les règles, les rites. Généralement, il n’y parvient pas [rires] …sur les rites. Sur les règles, il peut y travailler » a expliqué le président français, le sourire aux lèvres, visiblement très enjoué. Et de nuancer immédiatement : « à lui [Alexis Tsipras] aussi de comprendre que des règles existent et qu’elles doivent être respectées […] L’Europe n’est pas une contrainte qui impose de faire une seule politique. Mais il y a une obligation, c’est de respecter les règles. »

Le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, s’est dit pour sa part inquiet, mais aussi heureux, heureux de constater que le gouvernement grec soit prêt à accepter potentiellement 70 % du programme d’aide des « trois institutions » (le terme Troïka n’est plus de mise depuis ce Conseil européen). « Le gouvernement grec veut annuler un certain nombre de mesures antisociales et certaines le sont sans aucun doute. Mais quand une mesure est annulée, elle devra être remplacée par une autre qui rapportera le même produit fiscal » a-t-il commenté.

Le premier ministre belge, Charles Michel, a pour sa part rappelé que la Belgique avait une position ferme face à la Grèce. « J’ai indiqué avec force que le sérieux budgétaire était une condition importante pour pouvoir revenir à une croissance plus forte en Europe […] Dans le même temps, on devrait encourager des démarches et des réformes structurelles et de soutien aux investissements ». Mais Charles Michel a également cherché à marquer son optimisme en déclarant que « la magie de l’Europe est de trouver des solutions même quand on pense que l’obstacle est infranchissable ».

Possibilité de modifier les règles tout en les respectant, entendre le peuple grec, mais rester inflexible sur le programme : les lignes semblent être dessinées au burin, le gouvernement grec n’ayant qu’une marge de manœuvre très limitée et jouissant d’un soutien de ses partenaires européens tout aussi rationné. Lundi 16 février constituera une nouvelle épreuve de force entre la Grèce et les trois institutions, mais aussi entre la Grèce et ses partenaires européens. Le dénouement - ou non - pourrait avoir des conséquences insondables sur l’Europe et ses peuples.