Plus de joker pour la France
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Après avoir joué ses deux premiers matchs du Mondial, l’équipe de France est en danger. Troisième de sa poule derrière l’Irlande et l’Argentine, elle disputera vendredi 21 septembre au Stade de France un match couperet face à l’Irlande.
Une défaite signifierait pour les Tricolores la fine prématurée de leur aventure et une désillusion majeure pour une équipe se situant dans le Top 5 de l’Ovalie mondiale et organisant l’épreuve à domicile. Une première. Une victoire face aux Irlandais, au contraire, assurerait quasiment la qualification en quart de finale, soit face à l’ogre néo-zélandais sur la pelouse de Cardiff (Pays de Galles), soit face à une équipe plus à la portée des Bleus, l’Ecosse ou l’Italie, à Paris. Mais pour que la France poursuive son chemin dans cette coupe du Monde, un espoir toujours permis au XV de France, il faut comprendre comment elle en est arrivée dans cette position inconfortable.
Avant l’heure, c’est pas l’heure
Le 7 septembre dernier la France a ouvert la coupe du Monde de rugby 2007 par la pire des manières possibles : une défaite contre l’Argentine. Les matchs de préparation organisés et remportes cet été face à l’Angleterre (deux fois) et au Pays de Galles avaient pourtant laisse entrevoir une défense extrêmement solide (rapidité de placement, résistance physique sur les impacts, solidarité entre coéquipiers) et une palette offensive assez fournie faite de variations entre percées des lignes arrières et montées au front des avants. L’Equipe de France avait l’air prête, et solide.
Faux départ
L’entame du Mondial n’en fut que plus décevante. On vit ce soir-la les Argentins mériter leur surnom de Pumas en montant en défense tout au long du match sur les joueurs français avec une vélocité et un détermination dignes du carnassier des Amériques, et en livrant un combat féroce et incessant sur les phases de conquête, notamment dans les mêlées ouvertes et les mauls. Il serait donc exagéré de dire que la France s’est battue toute seule. Elle ne s’est cependant pas simplifiée la tâche. En perdant 29 ballons, les Bleus gâchaient énormément de munitions par faute de précipitation. Entre deux gouttes dans cette pluie d’approximations, leurs offensives étaient jouées de manière latérale, sans gagner de terrain, et les joueurs au soutien du porteur du ballon s’organisaient trop mal pour que les percées soient concluantes. Pour autant, les joueurs ne modifiaient leur tactique. On vit par exemple trop peu de jeu au pied dans la profondeur. Les attaques françaises s’avouaient stériles au fil des minutes. L’Argentine remportait finalement la partie 17-12. Une France assommée passait du « Songe d’une nuit d’été » au « Voyage au bout de la nuit ».
Encore heureux !
Lors de son deuxième match, dimanche 16 septembre, la France s’est (un peu) rassurée face à la Namibie, une équipe mixte de professionnels et d’amateurs, la plus faible de cette coupe du Monde si l’on en croit le classement de l’International Rugby Board. Elle a certes passe 13 essais aux Namibiens pour une victoire 87-10 facilitée par le carton rouge reçu des la 19eme minute par Nieuwenhuis pour une cravate infligée à Chabal. Mais inscrire une farandole d’essais à quatorze Namibiens relève de la logique sportive tant l’écart est grand entre ces deux nations du rugby. C’est la manière qui fut plus révélatrice, notamment dans les vingt premières minutes disputées à 15 contre 15. Les Bleus, devant gagner ce match en marquant au moins quatre essais pour inscrire un point de bonus offensif au classement (crucial pour espérer se qualifier en quart de finale), ont semblés encore une fois se précipiter en début de matchs, commentant une dizaine d’en-avants et de petites fautes de main dans les vingt premières minutes. En essayant de jouer tous les ballons et d’enflammer l’entame du match, les Français ont certes marqué deux essais, mais ont encore généré trop de déchet dans leur jeu. Ce qui ne fut que des petits ratés face à la Namibie pourrait s’avérer beaucoup plus grave face à l’Irlande et plus généralement aux équipes postulant au titre mondial. Les espaces créés dans la défense et le déséquilibre entre les deux paquets d’avants induit par l’exclusion définitive du numéro 8 namibien ont alors transformé la partie en festival offensif d’une équipe de France paraissant beaucoup plus relâchée.
Un "mental de Français" ?
L’expression est méchante mais reflète le cliché des sportifs français « champions du Monde des matchs amicaux », s’écroulant inexplicablement dès que l’enjeu est important. Mais si c’était le mental, la clé du jeu des Bleus ? Il n’est pas anecdotique que les joueurs argentins aient déclaré que, juste avant leur rencontre, les Français portaient sur leurs visages le poids de l’événement dans le couloir qui menait les 30 acteurs à leur scène. Ils semblaient tétanisés. Face à la Namibie, après quinze minutes moyennes, l’image de David Marty la tête basse, se parlant à lui-même après avoir commis trois en-avant de suite rappelait un joueur de tennis à la dérive cherchant ses repères entre deux points en parlant à sa raquette. La kyrielle de fautes techniques, à la main et au pied, est stupéfiante venant de joueurs de si grande qualité. Alors peut-être l’espoir suscité par les bons résultats récents et par l’organisation en France de la coupe du Monde constituent un fardeau psychologique les joueurs, qui voudraient dès lors trop bien faire. D’où la précipitation, mère des approximations, aïeule des déconvenues. Seuls les joueurs et l’encadrement savent quelles sont les dispositions psychologiques du groupe France. Reste une certitude : il faudra aborder le match de vendredi 21 contre l’Irlande avec un mental de guerrier, car l’erreur n’est plus permise.