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« Pas de camps hors de l’Union »

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L’Europe deviendra-t-elle un forteresse ? Friso Roscam Abbing, porte-parole de Franco Frattini, Commissaire en charge de la Justice, la liberté et la sécurité tente de répondre à nos interrogations.

L’Italien Franco Frattini, en plus de sa fonction de Vice-Président de la Commission européenne, est en charge des politiques d’asile et d’immigration de l’Union européenne. Son porte-parole répond à café babel.

La Constitution permettra-t-elle de renforcer la libre circulation des personnes ?

Cette compétence n’est pas uniquement du ressort du Commissaire Frattini mais aussi du Commissaire McCreevy, en charge du Marché intérieur et des services.

En ce qui concerne le mandat de M. Frattini, on peut noter deux choses importantes : d’abord une directive votée le 30 avril 2004 facilite la libre circulation des personnes et entrera en vigueur en avril 2006. Ensuite, il y a la Constitution européenne qui n’induira cependant pas beaucoup de changements en la matière. Seule la délivrance de passeports et de cartes d’identité deviendra une compétence communautaire. Mais n’oublions pas qu’il faut encore que les décisions soient adoptées à l’unanimité par le Conseil. Une prise en charge communautaire des passeports facilitera le contrôle par les autorités car les documents seront harmonisés selon certaines règles.

Que pensez-vous de la proposition de création de camps hors de l’Union européenne destinés à trier les réfugiés ?

Sur ce plan, il faut être très clair. Il n’y pas de plan concret ni même d’intention d’installer de tels camps. Il s’agissait d’une proposition du Premier ministre britannique Blair qui n’a pas été retenue. M. Frattini a opté en faveur d’une politique compréhensive qui associe le développement et les migrations, affaires intérieures et extérieures, en tenant compte de la dimension internationale de l’immigration et de l’asile. Une communication intitulée Améliorer l’accès aux solutions durables a été publiée en juin 2004. A sa suite, le Conseil des Affaires extérieures a adopté des conclusions politiques en octobre 2004 –réitérées en novembre dans le Programme de La Haye et celui de Tampere II – qui ont renforcé le Programme régional de Protection de l’Union européenne (European Union Regional Protection Programs) qui n’inclut pas le traitement des demandes d’asiles par les pays d’origine ni par les pays de transit ni par pays de l’UE.

En revanche le Programme de La Haye demande à la Commission de faire deux études de faisabilité : la première examinera les demandes d’asile au sein de l’UE de façon conjointe et la seconde analysera la possibilité de procéder de façon conjointe hors de l’UE.

Selon le Parlement européen, l’expulsion de réfugiés de Lampedusa en Italie vers la Libye n’a pas été réalisé conformément avec les normes européennes et le droit international. La Constitution européenne évitera-t-elle que des épisodes de ce genre se renouvellent ?

Le Vice-Président Frattini a demandé à son homologue italien, le ministre Pisanu, un rapport sur les évènements de Lampedusa. Nous n’avons pas encore ces informations détaillées. De plus, la Commission n’a juridiquement pas encore le droit de commencer une éventuelle procédure d’infraction à l’encontre des pays qui ne respecteraient pas les procédures communautaires en matière d’asile. A cet égard, une directive doit encore être adoptée et il faudra dès lors attendre une période de transposition de deux ans.

A part la Constitution, le Programme de La Haye est lui aussi important : il a clairement souligné que l’UE doit appuyer les Etats membres qui, en raison de leur position géographique, comme Malte ou à la frontière extérieure est (la Slovaquie par exemple) subissent des pressions supplémentaires. Une aide technique, juridique et évidemment économique est nécessaire. Franco Frattini a proposé un projet applicable dans le cadre des nouvelles perspectives financières 2007/2013. Il envisage la création d’un fonds pour le retour des réfugiés -après avoir équitablement et justement examiné leurs dossiers-, d’un fonds pour les frontières extérieures et d’un fonds européen sur les réfugiés afin de compenser les Etats membres qui accueillent plus de réfugiés que les autres. Par exemple, Malte, qui est très petit, a plus de difficultés à intégrer les réfugiés [que des pays dotés de plus de moyens].

Dans la Constitution, la politique d’asile fait partie d’un principe général de solidarité et de répartition des charges. Evidemment, on peut douter de l’efficacité d’une décision à caractère « politique » mais ces fonds permettront de traduire ces décisions politiques sur le terrain.

Donc une politique d’immigration applicable pour toute l’Union n’entraînerait pas de perte de contrôle ?

En ce qui concerne l’immigration légale, la Constitution réaffirme la compétence des Etats membres en ce qui concerne la gestion du nombre d’immigrés autorisés à s’installer sur leur territoire pour des raisons économiques. Néanmoins, une approche générale est prévue en ce qui concerne les critères sur lesquels ces autorisations se basent et sur les droits des migrants. Le Conseil européen a demandé à la Commission de mettre en place une approche harmonisée pour améliorer la gestion des mouvements migratoires.