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Partie I : Le sens caché des jours fériés

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Bruxelles

Nous arrivons à la fin du mois de mai, connu et apprécié pour ses nombreuses fêtes qui permettent ses grandes enjambées festives souvent prolongées par la pratique largement répandue du pont. Cependant, sous des apparences bénignes et bienfaitrices, ces fêtes soulèvent bien des débats au sein de nos sociétés actuelles.

Sur le plan so­cial, elles marquent une pause dans la vie ac­tuelle des hommes en­tiè­re­ment or­don­née au­tour du dip­tyque pro­duire/consom­mer. Elles per­mettent de cette ma­nière une res­pi­ra­tion so­ciale et ca­dencent les exis­tences. En re­vanche, sur le plan éco­no­mique, elles font l’ob­jet de ré­gu­liers coups de bou­toir dans le champ po­li­tique et mé­dia­tique quant au coût qu’elles fe­raient peser sur les éco­no­mies na­tio­nales, coût qui se­rait d’au­tant plus in­sup­por­table à l’heure où les États membres de l’UE tra­versent une crise struc­tu­relle sans pré­cé­dent.

Il se­rait ré­duc­teur tou­te­fois de cir­cons­crire les jours fé­riés à leur simple di­men­sion éco­no­mique, de simples jour­nées chô­mées qu’il fau­drait faire pas­ser par pertes et pro­fits. Ces fêtes ont une fonc­tion au sein de nos so­cié­tés et jouent pour cer­taines en­core un rôle sym­bo­lique fort dans l’ima­gi­naire col­lec­tif -même si elles ont été peu à peu évi­dées de leur sens pre­mier au fil du temps et dé­tour­nées par le consu­mé­risme am­biant de ces der­nières dé­cen­nies. Qu’elles soient chan­tées ou dé­criées, elles ont rem­pli et rem­plissent en­core une fonc­tion struc­tu­rante au sein des so­cié­tés qui va bien au-delà de la simple pul­sa­tion de la vie so­ciale : elles par­ti­cipent à des lo­giques de sur­vie d’or­ga­ni­sa­tions so­ciales à grande échelle.

Le jour férié re­lève d’une stra­té­gie de sur­vie

À l’ori­gine cer­tai­ne­ment ap­pa­rus de façon spon­ta­née puis ré­pan­due par mi­mé­tisme ou par contrainte, la plu­part des jours fé­riés cé­lé­brés en­core au­jour­d’hui ont été créés dans une lo­gique de conso­li­da­tion de groupes d’hommes par ho­mo­gé­néi­sa­tion de leurs pra­tiques au ser­vice d’une su­per­struc­ture plus ou moins abs­traite (l’Église, plus ré­cem­ment la na­tion, la classe ou­vrière) sou­vent en état de guerre lar­vée ou ou­verte contre une ou d’autres su­per­struc­tures (le pa­ga­nisme, les autres re­li­gions mo­no­théistes, les na­tions ri­vales, la classe bour­geoise).

Ainsi, trois grands types de fêtes co­ha­bitent à l’heure ac­tuelle, celles re­li­gieuses, celles na­tio­nales et celles as­so­ciées à des re­ven­di­ca­tions de di­vers ordres.

Les fêtes re­li­gieuses : un outil de lutte contre le pa­ga­nisme

Au sein des so­cié­tés eu­ro­péennes struc­tu­rées du­rant ces deux der­niers mil­lé­naires en grande par­tie au­tour du chris­tia­nisme, les fêtes re­li­gieuses sont les plus an­crées à tra­vers le conti­nent et par là même les plus com­mu­né­ment cé­lé­brées. Vé­ri­table liant so­cié­tal tran­seu­ro­péen et trans­con­ti­nen­tal, elles avaient pour rôle pre­mier de créer un cadre pro­pice à la « com­mu­nion » des hommes au­tour de l’ins­ti­tu­tion re­li­gieuse et ainsi d’as­su­rer une forte iden­ti­fi­ca­tion des pre­miers à cette der­nière, de créer un rap­port de do­mi­na­tion par hé­gé­mo­nie cultu­relle pro­gres­sive au pro­fit d’une ou plu­sieurs élites (clé­ri­cales et de no­blesse). Par­tant, elles contri­buaient à la mise sur pied d’une « po­lice d’adhé­sion » au sein de la com­mu­nauté chré­tienne d’une part et de forces de lutte contre les cultes et re­li­gions ri­vales d’autre part.

Il est in­té­res­sant à ce titre de consta­ter que nombre de fêtes re­li­gieuses ont été construites sur la base de cé­lé­bra­tions païennes dé­diées aux sai­sons, aux astres, à la na­ture. Ainsi Pâques, fixés au pre­mier di­manche sui­vant la pleine lune de l’équi­noxe de prin­temps, trou­ve­rait son ori­gine dans des cultes bien an­té­rieurs à l’ère chré­tienne, cer­tains y voyant la cé­lé­bra­tion d’At­tis, d’autres de Tam­muz, deux di­vi­ni­tés as­so­ciées à la re­nais­sance et à la fer­ti­lité et qui étaient lar­ge­ment vé­né­rées à tra­vers l’Em­pire ro­main. De même, la jour­née do­mi­ni­cale est vé­ri­table pa­ga­nisme ré­si­duel, qui du­rant plu­sieurs mil­lé­naires a été consa­crée au so­leil - d’où le Sonn­tag al­le­mand ou en­core le Sun­day an­glais - avant que l’Église ne se l’ap­pro­prie et la fasse cor­res­pondre au sep­tième jour de la Ge­nèse, celui du repos de Yahvé.

Le pro­sé­ly­tisme chré­tien était en effet à la fois bru­ta­le­ment ex­cluant et in­si­dieu­se­ment in­clu­sif. Par exemple, il sem­ble­rait que l’ico­no­gra­phie chré­tienne ait été pro­gres­si­ve­ment élar­gie par la mul­ti­pli­ca­tion de saints pré­sen­tant des pro­prié­tés dif­fé­rentes, afin de mieux in­té­grer la di­ver­sité des di­vi­ni­tés is­sues des re­li­gions po­ly­théistes.

Les fêtes re­li­gieuses ont pu être ainsi une arme de choix dans l’ar­se­nal ec­clé­sias­tique dont le but était de ga­ran­tir la sur­vie de l’ins­ti­tu­tion dans un pre­mier temps et sa conso­li­da­tion dans un deuxième temps. Ainsi jus­qu’au bas Moyen-Âge, près d’un quart à un tiers de l’an­née était consa­cré à des fêtes re­li­gieuses qui étaient chô­mées.

Or, à par­tir de la fin du XVIIIe siècle, l’Église, qui s’était éver­tuée à an­ni­hi­ler le pa­ga­nisme, à as­su­rer sa sur­vie puis à sta­bi­li­ser son en­vi­ron­ne­ment, doit faire face à l’es­sor du ca­pi­ta­lisme in­dus­triel et à la mon­tée des na­tio­na­lismes en Eu­rope. Per­dant peu à peu les le­viers de pou­voir qui lui per­met­taient de ré­gler la vie des chré­tiens, elle cède du même coup nombre de jours re­li­gieux qu’elle avait ins­ti­tués avec l’aide des ré­gimes mo­nar­chiques qu’elle sou­te­nait – d’où leur es­sence di­vine - et qui se sont au fur et à me­sure étio­lés si ce n’est ef­fon­drés.

Le ca­pi­ta­lisme est par na­ture contre l’ins­tau­ra­tion de jours fé­riés, car vus comme une perte de pro­duc­tion et donc de pro­fit. La na­tion au contraire pré­sente des ca­rac­té­ris­tiques si­mi­laires à celles de l’Église et des mé­ca­nismes ho­mo­logues pour as­su­rer sa sur­vie. Elle a, selon cette lo­gique, ap­posé ses propres jours fé­riés sur le ca­len­drier des hommes.

Les fêtes na­tio­nales : la cé­lé­bra­tion d’un peuple ou de peuples ( sou­vent contre d’autres peuples)

Les fêtes na­tio­nales ré­pondent par­tiel­le­ment de la sur­vie de la na­tion, qui est, tout comme l’Église, un objet so­cial construit de façon plus ou moins consciente par une élite in­tel­lec­tuelle et po­li­tique en in­ter­ac­tion per­ma­nente avec la so­ciété qu’elle cherche à or­don­nan­cer à son pro­fit. En outre, la na­tion se construit par né­ga­tion d’autres su­per­struc­tures de même na­ture, en l’oc­cur­rence ici l’émer­gence d’autres na­tions.  Ces fêtes na­tio­nales rythment et scandent la vie des ci­toyens na­tio­naux, cé­lèbrent la mé­moire de per­son­na­li­tés his­to­riques, des morts tom­bés au front pour la pa­trie, ou en­core com­mé­morent la fon­da­tion d’un ré­gime d’État, qui se­rait ipso facto l’éma­na­tion de la vo­lonté du peuple. Par un lent pro­ces­sus d’ac­cul­tu­ra­tion, de ri­tua­li­sa­tion, à l’ins­tar de l’Église, la na­tion a été peu à peu déi­fiée, et pa­ra­doxa­le­ment peu à peu dotée de qua­li­tés hu­maines, douée de mé­moire, douée de sen­ti­ments, tels que la joie et la dou­leur. Par la même, les fêtes na­tio­nales ont eu un rôle pri­mor­dial à jouer.

Ce­pen­dant, contrai­re­ment aux fêtes re­li­gieuses, qui sont par na­ture ins­crites dans le champ spi­ri­tuel, les fêtes na­tio­nales sont ins­crites dans celui tem­po­rel, car liées à l’ac­tion po­li­tique. Par consé­quent, elles sont plus éphé­mères et aussi clai­re­ment plus dis­pa­rates au ni­veau d’un conti­nent comme l’Eu­rope, mor­celé entre dif­fé­rents peuples iden­ti­fiés en au­tant de na­tions. Ainsi qui se sou­vient de la cé­lé­bra­tion de la Saint-Na­po­léon sous le Pre­mier et le Se­cond Em­pire en France, de la date de cé­lé­bra­tion des trois glo­rieuses sous la deuxième Ré­pu­blique fran­çaise, du Kai­sers Ge­burts­tag, de la jour­née de Sedan fêtés sous l’Em­pire al­le­mand bis­mar­ckien ?

Une autre illus­tra­tion est le 8 mai qui marque la vic­toire des forces al­liées contre l’Al­le­magne nazie en 1945. La ca­pi­tu­la­tion al­le­mande est sans sur­prise cé­lé­brée en France, en Ré­pu­blique tchèque mais ne l’est, et c’est bien lo­gique, pas en Al­le­magne et parmi les pays vain­cus. Les rai­sons de l’exis­tence de cette com­mé­mo­ra­tion peuvent sem­bler au­jour­d’hui ana­chro­niques et un brin re­van­chardes. Ceci dit, sa fonc­tion ini­tiale était d’unir un peuple dans la vic­toire face à une autre na­tion bat­tue. Le 8 mai, comme le 11 no­vembre –jour férié seule­ment en France, en Bel­gique –cor­res­pondent ty­pi­que­ment à la cé­lé­bra­tion guer­rière, celle d’une su­per­struc­ture, la na­tion, et de sa lutte pour sa sur­vie par la­quelle elle gagne une cer­taine ma­té­ria­lité. Les morts en at­testent. De nom­breuses fêtes na­tio­nales re­lèvent de cette lo­gique : la Grèce fête l’in­sur­rec­tion contre la do­mi­na­tion ot­to­mane en 1821, la Ré­pu­blique tchèque son in­dé­pen­dance vis-à-vis de l’Au­triche-Hon­grie en 1918, la Po­logne fête son in­dé­pen­dance ac­quise en 1918, etc. L’Es­pagne, pour sa part, fête le Jour de l’his­pa­nité le 12 oc­tobre, en com­mé­mo­ra­tion de la dé­cou­verte de l’Amé­rique. Une fête na­tio­nale qui pour­rait être consi­dé­rée comme l’en­vers des jours na­tio­naux cités pré­cé­dem­ment, l’apo­lo­gie de l’ex­pan­sion d’un peuple, de son apo­gée im­pé­ria­liste, et non de sa vic­toire sur un op­pres­seur.

Un autre exemple in­té­res­sant est celui du 9 mai qui cé­lèbre le dis­cours fon­da­teur de Ro­bert Schu­man, dont l’ob­jet était la créa­tion d’une ins­ti­tu­tion su­pra­na­tio­nale fon­dée sur des sec­teurs éco­no­miques clés, qui de­vien­dra la Com­mu­nauté eu­ro­péenne du char­bon et de l’acier, afin de réunir des peuples jus­qu’alors en­ne­mis au­tour d’en­jeux ma­té­riels et de pro­duc­tion. Au­jour­d’hui, le 9 mai n’est pas en­core férié (sauf au sein des ins­ti­tu­tions eu­ro­péennes), mais pour­rait être vu comme un signe fort de l’émer­gence d’un nou­veau ré­gime, d’une nou­velle en­tité qui se construi­rait à la fois à par­tir des na­tions, avec et à terme contre elles. Nous pou­vons ima­gi­ner, sauf dans le cas d’un re­flux na­tio­na­liste suf­fi­sam­ment puis­sant, qu’à l’ave­nir le 9 mai de­vienne férié et que les com­mé­mo­ra­tions de vic­toires na­tio­nales et guer­rières comme le 8 mai ou le 11 no­vembre dis­pa­raissent. Ce qui mar­que­rait sym­bo­li­que­ment la vic­toire d’un nou­veau ré­gime sur l’an­cien.

Par ailleurs, il est re­mar­quable que les ins­ti­tu­tions eu­ro­péennes aient conservé les fêtes chré­tiennes les plus im­por­tantes et les plus par­ta­gées parmi les na­tions. L’in­fluence de l’Église est en effet his­to­ri­que­ment bien plus pro­fonde et géo­gra­phi­que­ment plus éten­due que celle des na­tions, et cor­res­pond par voie de consé­quence aux be­soins de l’UE en vue de créer une iden­ti­fi­ca­tion parmi les hommes à un ni­veau trans­na­tio­nal.

Les autres fêtes : l’exemple du 1Er mai

À côté des fêtes re­li­gieuses et na­tio­nales, il existe celles que l’on pour­rait nom­mer « de re­ven­di­ca­tion ». Il s’agit ici de cé­lé­bra­tions d’évè­ne­ments mar­quant sou­vent la vic­toire d’un groupe d’in­di­vi­dus sur un autre groupe, et qui a pu in­fluen­cer à un mo­ment donné le pou­voir en place voire s’en em­pa­rer un temps et par la même oc­ca­sion in­fluen­cer une so­ciété.

Le 1er mai en est un bel exemple, peut être la seule fête fé­riée de ce type dans de nom­breux pays. Elle illustre la lutte de classes, celle ou­vrière dé­ten­trice de la force de tra­vail d’un côté, contre celle de la bour­geoi­sie dé­ten­trice des forces de pro­duc­tion d’autre part. Elle com­mé­more une grève mas­sive dé­clen­chée à Chi­cago le 1er mai 1886 puis ré­pri­mée dans le sang par les forces ar­mées. En 1889, le congrès de la IIe In­ter­na­tio­nale so­cia­liste, réuni à Paris pour le cen­te­naire de la ré­vo­lu­tion fran­çaise, choi­sit le 1er mai comme jour de lutte pour la classe ou­vrière et sa­la­riale à tra­vers le monde. Au len­de­main de la 1re Guerre mon­diale, alors que la grogne so­ciale ré­sonne par­tout en Eu­rope, que la Rus­sie tsa­riste a été ren­ver­sée par les so­viets, que des Conseils d’ou­vriers et de sol­dats émergent de-ci, de-là et font trem­bler les ré­gimes en place, no­tam­ment en Al­le­magne, mais aussi en France à Stras­bourg, le Sénat fran­çais ra­ti­fie la loi ins­tau­rant la jour­née de huit heures et dans la fou­lée dé­clare of­fi­ciel­le­ment le 1er mai 1919 jour­née chô­mée. En Al­le­magne, les so­ciaux-dé­mo­crates avec l’ap­pui des cen­tristes lors de la Wei­ma­rer Na­tio­nal­ver­samm­lung es­saient d’ins­tau­rer le 1er mai comme fête du tra­vail, mais sont  mis en échec par la droite bour­geoise conser­va­trice et li­bé­rale. Il fau­dra at­tendre 1933, l’Al­le­magne nazie et sa vive in­cli­nai­son en fa­veur du cor­po­ra­tisme, pour voir le 1er mai lé­ga­le­ment de­ve­nir une jour­née chô­mée. De même en France, c’est le ré­gime de Vichy, qui ins­taure sous oc­cu­pa­tion al­le­mande le 1er mai comme « fête du tra­vail et de la concorde so­ciale». La me­sure sera re­prise par le gou­ver­ne­ment fran­çais  en 1947, do­miné par les com­mu­nistes du PCF, alors à son apo­gée, et les so­cia­listes de la SFIO.

Ainsi la fête du tra­vail peut être vue comme l’ex­pres­sion d’un rap­port de force, d’une lutte mo­men­ta­né­ment ga­gnée par un groupe so­cial, ici, la classe ou­vrière. Sa re­mise en ques­tion ré­gu­lière par des forces po­li­tiques li­bé­rales en canon avec di­verses or­ga­ni­sa­tions pa­tro­nales, la baisse de l’en­goue­ment parmi les tra­vailleurs pour ce jour de fête, se­raient au­tant de signes d’un in­ver­se­ment des rap­ports de force.

Symp­tômes de l’évo­lu­tion de nos so­cié­tés

Les fêtes, en par­ti­cu­lier celles chô­mées, ont donc un sens caché. Elles ont pour fonc­tion de conso­li­der une so­ciété, en as­su­rant une forte iden­ti­fi­ca­tion par la mise en place pro­gres­sive de toute une série de ri­tuels en vue de cé­lé­brer une su­per­struc­ture, qui est par  ailleurs sou­vent au ser­vice d’un groupe so­cial. Par­fois, ces fêtes exaltent une su­per­struc­ture face à une autre. Elles ex­priment alors l’état d’un rap­port de force et fluc­tuent en fonc­tion de l’évo­lu­tion des luttes entre ces su­per­struc­tures. Il existe quan­tité de jour­nées com­mé­mo­ra­tives non fé­riées qui jouent aussi un rôle ac­cul­tu­ra­tif, mais celles fé­riées sont les plus char­gées de si­gni­fi­ca­tion, les plus struc­tu­rantes dans une so­ciété don­née. L’ac­tuelle co­ha­bi­ta­tion de jour­nées fé­riées de na­ture dif­fé­rente pour­rait être le re­flet de la co­exis­tence de dif­fé­rents types de su­per­struc­tures sur un ter­ri­toire donné, qui construisent en­semble une re­la­tive co­hé­sion entre les hommes. En Eu­rope, les jours re­li­gieux sont les plus par­ta­gés et sont l’ex­pres­sion d’une su­per­struc­ture conti­nen­tale, sur la­quelle se re­pose par­tiel­le­ment la construc­tion de l’iden­tité eu­ro­péenne de l’Union, dont la vo­ca­tion est de struc­tu­rer les so­cié­tés hu­maines au-delà des na­tions. Dans cette pers­pec­tive, il sera bon de sur­veiller l’évo­lu­tion lé­gale des jours fé­riés, des fêtes na­tio­nales, no­tam­ment celles com­mé­mo­rant la vic­toire d’une na­tion contre une autre, mais aussi de la jour­née de l’Eu­rope, pour l’ins­tant fé­riée seule­ment au sein des ins­ti­tu­tions eu­ro­péennes. Le sta­tut du 8 et le 9 mai pour­raient alors consti­tuer un in­di­ca­teur in­té­res­sant du rap­port de force entre ces deux su­per­struc­tures, qui, même si la se­conde émane de la pre­mière, sont sous cer­tains as­pects an­ti­no­miques.