!!! : Offer et au moulin
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Si la mère de Nic Offer n’avait pas interdit à son gamin en crise d’écouter Kiss sur un magnéto, il n’aurait probablement pas épris de disco pop, ce petit vent de fraîcheur qui souffle sur !!! dont il est leader depuis 1995. Fin avril, les Californiens ont sorti Thr!!!er, leur cinquième album. De Nile Rodgers à Mickey Mouse, rencontre avec un chanteur bicolore.
« Ça vous dit de prendre l’air ? J’ai envie de me poser dans un parc. » A moins de trois heures de son concert à la Machine du Moulin Rouge, Nic Offer enchaîne sa troisième interview de l’après-midi. A défaut du jardin promis par le chanteur, nous voilà assis sur une rambarde des allées du boulevard Rochechouart, dans le 18ème arrondissement de Paris. Tout en décontraction, le chanteur nous parle de sa carrière, de son nouvel album, le cinquième, vécu comme une « concrétisation du chemin parcouru jusqu’à maintenant. Plus libre, plus en phase avec nos intentions de départ ».
Chacun son Thriller
Ça va même plus loin. Car pour Nic, Thr ! ! ! er est carrément le disque qui ponctue une carrière, « le genre d’album que tous les groupes essayent un jour de produire ». La référence à Michael Jackson est explicite en tant qu’album-repère mais l’Américain cite également Discovery des Daft Punk, Appetite for Destruction de Gun’s n Roses… Autant de références qui témoignent de la richesse de l’univers musical de ! ! ! . Souvent rangé par la presse dans la catégorie « dance punk », le groupe ne nie pas avoir été influencé par Chic, Early Black Flag ou les Clash même si Nic avoue que « quand tu fais de la musique tu veux être original mais tu te rends compte assez vite que ce n’est pas le cas. Tu appartiens forcément à un courant musical ».
Pour ce nouvel album, le groupe de Sacremento a travaillé sous la houlette de Jim Eno, leader de Spoon. Cette collaboration a été envisagée de manière assez naturelle, « après avoir passé quelques jours en studio à écouter beaucoup de funk et de disco, on a voulu continuer dans ce sens la avec lui. » Sans qu’on lui demande quoi que ce soit, Nic bifurque : « Travailler avec un mec comme Nile Rodgers qui n’a rien sorti de bien depuis 30 ans ne nous branchait pas. » Pourquoi, il y a eu des contacts ? Non. C’est juste que « le single de l’album « One Girl/One Boy » sonne très Rodgers » et que Thr ! ! ! er est sorti la même semaine que « Get Lucky » (le tube de Daft Punk sur lequel Rodgers a travaillé). Pour le scoop, allez voir ailleurs. Et quand bien même, selon Nic, « on aurait jamais pu se le payer ».
« Jeune et libre »
Thr ! ! ! er sort après 18 ans de carrière. Et chaque album correspond à une époque bien précise de la formation. Si on lui demande d’associer chaque disque à un mot, Nic répond par l’ « insouciance » du premier album - « nous étions jeunes et libres » - ou les premiers doutes qui planent sur le second : « on fumait pas mal au moment de la création du deuxième. Je dirais brumeux ». Puis vient Myth Takes qui sera entouré d’ « histoires ». Pour Strange weather, isn’t it Nic Offer admet avoir eu, au moment de composer, quelques liaisons dangereuses avec des disques enregistrés sous Trofanil comme ceux de Joy Division (Unknown Pleasure) et d’Iggy Pop (The Idiot) « L’atmosphère de ces albums a incarné la couleur de leur pochette : noir et blanc », ajoute Nic.
T-shirt Mickey et slip de bain
Pourtant, si ! ! ! fait parfois référence à une cold-wave bicolore, la manière dont les six membres appréhendent la scène est haute en couleur. Il faut dire que Nic Offer ne lésine pas sur le style. La grande tige se dandine sans complexe, vêtue tour à tour d’un slip de bain ou d’un t-shirt Mickey taille XS. Un mode de vie ? Le Californien revient, amusé, sur un épisode assez cocasse : « En 2010, on jouait un soir à Liverpool pour Halloween. On avait décidé de se déguiser. Quand on est arrivés sur scène, on a commencé à hurler : ‘ vous savez qui on est ? ’Et là un gars dans la foule à répondu en gueulant : des GAYS ? On était déguisé en… Frankie Goes to Hollywood ».
Dans sa façon de se déhancher, il nous rappelle un certain Jarvis Coker. Tout comme le Britannique, Offer surfe sur la vague du kitsch et façonne, sous ses pas maîtrisés, une certaine idée du swag. Plutôt flatté de la comparaison, il nous montre une photo sur son portable où son frère et lui sont respectivement déguisés en Cocker et en Drake, le rappeur américain.
Au moment de conclure, un quinquagénaire nous accoste dans la rue. Il a reconnu le chanteur, et pour cause, il est venu de Dunkerque (extrême nord de la France, ndlr) pour voir le concert. « Ça va être fou », prévient-il. « Je les ai déjà vu vous allez voir, il met le feu ». La suite : le leader de ! ! ! allume une première mèche en improvisant un cours de danse dans la fosse. Quelques heures auparavant, Nic Offer - 41 ans - nous avouait envier Sonic Youth pour avoir choisi « l’un des meilleurs noms de groupe, quelque chose de frais et de dynamique. » Certes, mais 3 points d’exclamation, c’est indémodable.