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Mélissa Laveaux ou quand le blues se justifie

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N. T.

Le Puy de Babel

Par Benjamin Boyer et Noémie Melin « Je ne veux pas de cadavre en face de moi », c'est ironiquement sa propre assertion qui justifie le paradoxe Mélissa Laveaux. Cébazat, la grande salle du Sémaphore est pleine. En ce mercredi 2 décembre la jeune artiste tentait alors tant bien que mal à concilier communication de ses agents et échange artistique personnel avec le public.

Loin de nous l'envie de s'aventurer dans des rimes vitriolées aux accents « zemmouriens », ce concert que la politesse nous impose de ne pas trop vous décrire fut sensible, chargé de cette ambiance nacrée qui sied au jazz, éclairé par des lumières tamisées à l'instar des mythiques cafés de La Nouvelle-Orléans, et bercé par un ton lancinant couleur black, esprit voyage. C'est pourtant en arène d'un contresens aussi charmant que maladroit que se transforme la scène dominée par cette jeune femme aussi talentueuse que tiraillée. C'est le passage de la « rencontre-discussion » à la scène qui révèle ce paradoxe. Mélissa semble être assise dans ce wagon des jeunes artistes embarqués dans le train à grande vitesse de l'industrie musicale où s'affrontent identité et exigence de communication.

Préférant ne pas céder à une analyse musicale qui ne relève pas de nos compétences et dont les arguments eurent été prémâchés dans un dossier de presse produit à cet effet, c'est autour de cafés noirs que nous avons préféré essayer de connaître la personne, l'artiste Mélissa Laveaux, en tant que telle. L'identité de cette merveilleuse artiste, là est l'enjeu ou devrait-on dire le jeu du chat et de la souris auquel assiste un spectateur, et plus intensément encore, quelques chanceux rédacteurs...

Mélissa Laveaux 2 Contre toute attente, derrière les jolies couvertures d'album se cache un trésor bien plus intéressant et pour le moins inattendu : des études en sociologie, une passion pour l'éthique, un long parcours associatif et universitaire auprès des femmes battues et violées ou encore un sens familial très affiné.

« Mon père jouait de la guitare à la maison, c'est un peu sa gloire inavouée que je fasse quelque chose dans la musique », explique l'artiste canadienne. À la rencontre du personnage, on est surpris de trouver quelqu'un qui exprime rapidement ses opinions ainsi que les détails personnels de sa vie. Quand on lui demande « Avez-vous une affection particulière pour la France ? », c'est un non catégorique qui tombe comme un cheveu sur la soupe.

« En France dès qu'il y a un artiste de couleur, il faut absolument qu'on parle de ses origine ; au Canada c'est véritablement considéré comme superficiel et il ne faut pas faire une communication particulière là-dessus. Pire encore, il faut systématiquement que tu dises pourquoi tu as le droit d'être là », explique Mélissa Laveaux en s'interrogeant sur le rapport entre cette attitude française et le Président Sarkozy. Pourtant c'est dans un étrange argumentaire chancelant entre maladresse et doute que la chanteuse raconte que la politique ne doit pas avoir sa place dans sa musique.

La communication officielle, c'est peut-être ce qui nuit le plus à Mélissa Laveaux

L'artiste parle vite, très vite, difficile de lire entre ses notes le calme qui berce le jazz. Il y a un réel décalage entre les moments de chanson et ceux d'échanges directs avec le public. Dans ses remerciements, Mélissa Laveaux confond Cébazat et Sémaphore, jongle sans balle avec la situation des chanteuses grosses pour aboutir à une impression de manque absolu de confiance scénique.

Il y a pourtant non seulement un talent indéniable mais surtout un potentiel considérable dans cette jeune artiste, encore faut-il que les professionnels qui organisent sa communication la laissent un peu respirer et s'exprimer non pas en clichés du blues black, mais en potentiel musical aussi dynamique que novateur qui trouverait probablement son sens dans une acceptation scénique de qui est Mélissa Laveaux.

© Crédits photographiques personnels.

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